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Atout France : "Vanter les mérites de la loi de 1992 est une aberration !"

l'interview de Christian Mantei, Directeur Général d'Atout France


Pour Christian Mantei, directeur général d'Atout France, il est faux de penser que la loi Novelli de 2009, serait directement à l’origine d’une émergence de cas de paracommercialisme ou encore d’opérateurs en ligne qui contourneraient la loi. Il revient dans une interview pour TourMaG.com sur le cheminement de la loi Novelli, et sur les cas soulevés dans notre article ["Expedia, Opodo, Edreams : la nébuleuse juridique des agences en ligne borderline.


Rédigé par C.E. le Mardi 14 Janvier 2014

Christian Mantéi : "Mais ce n’est pas parce que l’on n’a pas la compétence, que l’on ne fait rien pour autant. Nous avons une obligation d’informer ou de solliciter l’autorité qui peut agir." Crédit : O.Gombert.
Christian Mantéi : "Mais ce n’est pas parce que l’on n’a pas la compétence, que l’on ne fait rien pour autant. Nous avons une obligation d’informer ou de solliciter l’autorité qui peut agir." Crédit : O.Gombert.
TourMaG.com - Au regard de la concurrence de certains acteurs implantés à l'étranger, et de certains cas de paracommercialisme, certains acteurs se demandent parfois ce que la loi Novelli de 2009 a réellement apporté ?

C. M. :
Tout d’abord je tiens à signaler que vanter les mérites de la loi de 1992, comme j’ai pu le lire récemment, est une aberration.

L’ancien régime était extrêmement complexe avec 4 régimes d’autorisation.

Certaines conditions étaient devenues absurdes (obligation d’un local, conditions d’aptitude professionnelle trop strictes), le système était totalement opaque (à l’exception de la région parisienne, il était très difficile de savoir qui avait une autorisation) et enfin le fonctionnement des CDAT n’était pas du tout optimal.

Pire encore, les contrôles sur les autorisations n’étaient pas exercés sur des parties importantes du territoire.

Je rappelle que lors de la période de régularisation des anciennes licences par la commission d’Atout France, 46% des demandes ont dû faire l’objet d’une instruction complémentaire du fait de l’absence de contrôle durant plusieurs années par les préfectures.

Une bonne partie ne savait même pas s’ils avaient toujours leur garantie financière !

Une réforme comme celle issue de la loi adoptée par le Parlement en 2009 en concertation avec toutes les organisations professionnelles était donc nécessaire même s’il faut relativiser sa portée.

L’objectif de cette réforme était surtout de simplifier, moderniser et rendre plus transparent le système. Elle a introduit un régime unique et centralisé.

Le rôle de la commission d’immatriculation est d’immatriculer l’ensemble des opérateurs de voyages sur un registre public, librement accessible sur le site Internet d’Atout France et régulièrement mis à jour.

Il s’agit d’une nouvelle condition de transparence du système pour le consommateur.

TourMaG.com - Pensez-vous que la loi de 2009 a réellement mis sur un pied d'égalité tous les acteurs de la profession et n'a-t-elle pas permis l'arrivée de nouveaux entrants plus facilement ?

C.M. :
La loi prévoit des règles de saine concurrence entre les opérateurs, soumis aux mêmes conditions de garantie financière, de responsabilité civile professionnelle et d’aptitude professionnelle, des conditions maintenues afin de garantir une protection suffisante du consommateur.

Les professionnels le disent eux-mêmes : le dispositif d’immatriculation a non seulement permis de moderniser le régime juridique de la vente de voyages mais également de placer sur un pied d’égalité l’ensemble des opérateurs immatriculés, de simplifier les démarches en dématérialisant la procédure et de rendre accessibles au public l’identité et le nombre des opérateurs immatriculés (registre public accessible a tous).

Par ailleurs, si le nouveau régime a permis à certains secteurs particulièrement stratégiques de rentrer un peu plus facilement dans le système (secteur des congrès, incentives qui pouvaient avoir eu une licence auparavant mais dans des conditions d’une grande complexité), il n’a cependant pas eu pour effet l’ouverture significative du marché à de nouveaux opérateurs, les garanties demandées pour l’obtention de l’immatriculation restant très strictes.

Je constate que le nombre d’opérateurs reste fixé à 7000 depuis déjà plus d’un an.

Le marché de la vente de voyages s’est ainsi stabilisé voire contracté par rapport à l’ancienne réforme de 1992.

TourMaG.com - Dans un article "Expedia, Opodo, Edreams : la nébuleuse juridique des agences en ligne borderline" nous avons mis en évidence notamment le cas d'Expedia qui a changé de régime en passant à celui de la libre prestation de services (LPS) Pouvez-vous nous dire un mot sur ce statut ?

C.M. :
En ce qui concerne la libre prestation de services, ce régime existait déjà sous la loi de 1992 sous forme d’une licence de libre prestation de services soumis grosso modo aux mêmes conditions qu’aujourd’hui.

La directive services, transposée par la loi de 2009, a eu pour conséquence de conforter ce régime et d’en modifier quelques modalités.

Pour information, sous la loi de 1992, 22 opérateurs étaient en libre prestation de services et aujourd’hui seulement une douzaine !

Il faut donc relativiser l’importance de ce régime par rapport aux 7000 opérateurs.

Quant à l’exercice illégal de la profession, je rappelle que les règles n’ont pas changé.

C’est au préfet, autorité de police, que revient la responsabilité de sanctionner. C’était le cas sous la loi de 1992 ; c’est toujours le cas aujourd’hui.

TourMaG.com - Comment les informations circulent entre Atout France et le ministère sur les cas litigieux ?

C.M. :
La répartition des compétences est claire.

La commission d’immatriculation ne dispose pas d’autres compétences que celle de traiter les demandes d’immatriculation dont elle est saisie et d’immatriculer les demandeurs si les conditions sont réunies.

De même, elle doit radier du registre tout opérateur qui ne réunirait plus ces mêmes conditions ou encore qui souhaiterait cesser son activité. Des radiations interviennent donc aujourd’hui lorsqu’il y a cessation de garantie financière !

Il en résulte en tous cas que la commission d’immatriculation, dont Atout France assure le secrétariat, n’a pas le pouvoir de contraindre un opérateur à être immatriculé sous tel ou tel régime lorsqu’il apparaît qu’il rentre dans le champ d’application du régime concerné.

Mais ce n’est pas parce que l’on n’a pas la compétence, que l’on ne fait rien pour autant. Nous avons une obligation d’informer ou de solliciter l’autorité qui peut agir.

Ceci vaut pour deux types de cas :

- Lorsque l’opérateur est radié du registre pour non respect des conditions, la commission d’immatriculation informe systématiquement les préfectures de cette situation. Par ailleurs, le registre étant public, l’ensemble des parties intéressées peut agir pour activer les dispositions pénales prévues par le code du tourisme.

- D’autre part, nous informons systématiquement le ministère, dès que nous avons connaissance d’éléments nous permettant de penser qu’une question peut se poser en ce qui concerne l’obligation ou non pour un opérateur d’être immatriculé sous tel ou tel régime.

Nous l’avons notamment fait pour Expédia et pour Travel24.

Je rappelle que Expédia disposait bien d’une immatriculation sous régime normal mais que son immatriculation en LPS existait également depuis 2011. Elle ne date pas de septembre 2013.

TourMaG.com - Comment se positionne la France par rapport à ses voisins européens ?

C.M. :
Le régime de libre prestation de services est applicable dans tous les Etats membres. Il permet également aux opérateurs français de faire de même dans un autre pays européen.

Aux côtés de ce régime spécifique s’appliquant dans toute l’Europe, le régime « classique » est différent selon les pays et effectivement, le régime de droit français est l’un des plus stricts.

TourMaG.com - Au final, quel œil portez-vous sur le cadre juridique actuel ?

C.M. :
Il est faux de penser que la loi de 2009 serait directement à l’origine d’une émergence de cas de paracommercialisme ou encore d’opérateurs en ligne qui contourneraient la loi grâce aux modifications apportées par cette même loi.

Le régime de 1992 n’aurait pas davantage empêché cela.

Il me semble que le défi essentiel pour nos entreprises aujourd’hui c’est la compétitivité dans un contexte international qui évolue très vite.

Encore aujourd’hui, un opérateur immatriculé expliquait qu’il ne renouvellerait pas son immatriculation du fait de la lourdeur des démarches et des conditions exigées.

Alors, à l’heure où l’on constate l’étau réglementaire qui pèse sur nos entreprises, le vaste plan de simplification souhaitée par le gouvernement est peut être la solution pour conférer les conditions d’une vraie compétitivité à l’ensemble de nos entreprises.

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