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III. - Aérien : force majeure, circonstances extraordinaires, même combat?

par Me Emmanuelle LLOP, avocat associé Clyde & Co


On a beaucoup lu et tout entendu sur la force majeure, notamment après les arrêts « Océane » et « Thomas Cook » rendus par la Cour de Cassation le 8 mars 2012. Aussi est-il temps de remettre les choses à plat et faire un point en trois étapes. Me Emmanuelle Llop s'y est collée. En voici le 3e et dernier volet : Aérien : force majeure et circonstances extraordinaires même combat ?


Rédigé par Me Emmanuelle LLOP le Mardi 10 Avril 2012

Toutes les circonstances extraordinaires entrainent l’obligation pour le transporteur aérien de prendre en charge les passagers dont le vol a été annulé à la suite de l’éruption du volcan islandais./photo dr
Toutes les circonstances extraordinaires entrainent l’obligation pour le transporteur aérien de prendre en charge les passagers dont le vol a été annulé à la suite de l’éruption du volcan islandais./photo dr
Loin de nous l’idée d’acquiescer aux obligations créées par le Règlement européen 261/2004 du 11 février 2004 à la charge des transporteurs, lorsque le vol des passagers est retardé ou annulé.

Mais ces obligations existent, et imposent au transporteur aérien effectif d’assister et prendre en charge lesdits passagers, même lorsque des circonstances extraordinaires sont la cause de l’empêchement de voler.

En pratique cette règlementation impose aux compagnies aériennes de rembourser le billet non-volé, ou de réacheminer le passager.

Dans ce dernier cas, la compagnie doit restaurer ses passagers et leur offrir des rafraichissements et la possibilité de passer gratuitement deux appels –mails-fax-télex (oui oui …), enfin de les héberger si un séjour d’attente « d’une ou plusieurs nuits » ou un séjour s’ajoutant à celui prévu par le passager est nécessaire.

L’arrêt « Thomas Cook » rendu le même jour que l’arrêt « Océane », par le même Président, et sur des faits similaires, rappelle à la juridiction de proximité de Marseille qu’elle ne peut condamner une agence à assister les clients en se fondant sur le Règlement 261/2004, car ce texte ne concerne que le transporte aérien effectif.

La Cour rappelle que seul le Code du Tourisme régit la responsabilité de l’agence de voyages et renvoie devant la juridiction d’Aix, qui sera chargée de rejuger correctement le litige.

Payer des prestations malgré un cas de force majeure

On peut supposer que le juge d’Aix disposera alors dans le dossier des clients de l’arrêt Océane et qu’il embraiera sur cette nouvelle obligation à la charge des agences, qui consiste à payer des prestations nouvelles au client malgré un cas de force majeure…

A moins que le TO n’appelle cette fois en garantie la compagnie aérienne …

En effet, depuis l’origine les compagnies aériennes concernées auraient dû être présentes dans les deux affaires, par le biais de l’appel en garantie prévu par l’article L. 211-16.

Cela aurait peut-être clarifié les débats dès l’origine, puisqu’en l’état du droit, c’est sur la compagnie que pèse la charge financière des conséquences de la force majeure.

Monsieur BOT, l’Avocat Général de la Cour de Justice de l’Union Européenne le rappelle dans ses conclusions McDonagh vs Ryanair du 22 mars 2012 : toutes les circonstances extraordinaires entrainent l’obligation pour le transporteur aérien de prendre en charge les passagers dont le vol a été annulé à la suite de l’éruption du volcan islandais.

Le Règlement évoque certes les circonstances extraordinaires, qui recouvrent tous les évènements hors du contrôle de la compagnie aérienne y compris les cas de force majeure, mais maintient leurs conséquences financières sur la compagnie : même en cas de grève, instabilité politique, météo, sécurité, défaillances (la liste du considérant 14 du Règlement n’est pas exhaustive), la compagnie aérienne doit payer les coûts liés à l’attente du vol retour.

Comment combiner les 2 décisions et les 2 régimes de droit ?

III. - Aérien : force majeure, circonstances extraordinaires, même combat?
Mais comment combiner les deux décisions et les deux régimes de droit ?

Le Règlement européen ne pouvant être évoqué qu’en présence du transporteur effectif, les agences ou les TO poursuivis par les clients n’ont d’autre solution que de l’attraire dans l’instance, ou de l’inclure dans la négociation avec le client, selon les cas.

L’appel en garantie est un droit des vendeurs de voyages rappelés par l’article L. 211-16, qu’ils devraient exercer - si possible par la voie amiable – dès l’origine d’un litige, car il faut rappeler que les compagnies sont protégées par une prescription de 2 ans des actions à leur encontre, à compter de la date à laquelle le vol concerné aurait dû arriver …

Il reste à espérer que les juges comprennent l’articulation des deux textes, Code du Tourisme et Règlement 261/2004 (ce dernier en cours de refonte), mais il n’est pas exclu qu’on assiste dans certains cas à des partages de responsabilité.

Quoi qu’il en soit, les professionnels – agence de voyages, TO et compagnie aérienne – doivent faire face à ce risque financier supplémentaire, qui se traduira peut-être par un enchérissement des coûts des voyages et des forfaits.

L’Avocat Général ne précise-t-il pas dans ses conclusions McDonagh que finalement, les compagnies aériennes sont libres de « répercuter les coûts engendrés par cette obligation sur les prix du billet d’avion » ? !

Les consommateurs suivront certainement le même raisonnement à l’encontre des agences de voyages et des TO, l’UFC ayant déjà encouragé les clients victimes du volcan à réclamer à leur agence le remboursement des conséquences du volcan …


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