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Qu'on se le dise... même les vols retardés donnent droit à des compensations !

La chronique de Me. David Sprecher*


La Cour de Justice des Communautés Européennes a rendu le 23 octobre 2012 un arrêt qui constitue, sans aucun doute, une avancée majeure dans l’interprétation des règles à appliquer aux mesures d'assistance et de compensations concernant les passagers dont les vols sont annulés ou retardés.


Rédigé par Me David SPRECHER le Jeudi 23 Août 2012

Qu'on se le dise... même les vols retardés donnent droit à des compensations !
Le 23 octobre dernier, la Cour de Justice des Communautés Européennes a rendu un jugement important concernant le cadre à appliquer aux mesures d'assistance et de compensations concernant les passagers dont les vols sont annulés ou retardés.

Ce jugement suit un premier arrêt que cette même Cour avait rendu le 19 novembre 2009 et communément appelé Arrêt Sturgeon du nom des parties demanderesses.

Cet arrêt constitue sans aucun doute une avancée majeure dans l’interprétation des règles à appliquer en ce domaine et il est très important d'en rappeler les principales.

Divers textes ont été promulgués et qui régissent les droits accordés aux passagers.

Le Règlement Européen 261/2004 : celui-ci sera applicable (1) à tous les vols quels qu’ils soient et nonobstant la nationalité du transporteur effectif au départ d’un aéroport européen ; (2) à tous les vols opérés par un transporteur effectif européen au départ d’un aéroport non européen vers un aéroport européen.

Il est donc impératif de bien connaître l’identité du transport aérien qui effectue le vol.

La Convention de Montréal 1999 : n’est applicable qu’au transport aérien entre deux pays l’ayant signé. Elle accorde des droits plus importants que la Convention de Varsovie 1929 qu’elle remplace mais uniquement lorsque les deux pays l’ont signée et ratifiée

Le cadre légal

Me David Sprecher /photo JDL
Me David Sprecher /photo JDL
En préambule il est nécessaire de bien préciser qu’il n’est pas indiqué que seuls les passagers munis de billets peuvent prétendre à des mesures d’assistance ; cependant leurs droits se trouvent confirmés lorsqu’ils possèdent le précieux billet.

Lorsque le Règlement Européen est d’application, ses dispositions prévoient que les passagers ayant un vol retardé, pour quelque raison qui soit, ont droit à des mesures d’assistance telles le réacheminement sur un autre vol le plus rapidement possible ou à leur demande le remboursement de leurs vols ainsi que les vols de correpondance devenus inutiles !

De plus, les mesures d’assistance incluent aussi l’hébergement et les repas si le vol rereouté part le lendemain.

Voici d’ailleurs l’article correspondant du Règlement européen :

Article 8
Assistance: droit au remboursement ou au réacheminement
1. Lorsqu'il est fait référence au présent article, les passagers se voient proposer le choix entre :

a) - le remboursement du billet, dans un délai de sept jours, selon les modalités visées à l'article 7, paragraphe 3, au prix auquel il a été acheté, pour la ou les parties du voyage non effectuées et pour la ou les parties du voyage déjà effectuées et devenues inutiles par rapport à leur plan de voyage initial, ainsi que, le cas échéant,

Annulation de vol : les mesures d’assistance

- un vol retour vers leur point de départ initial dans les meilleurs délais;

b) un réacheminement vers leur destination finale, dans des conditions de transport comparables et dans les meilleurs délais, ou
c) un réacheminement vers leur destination finale dans des conditions de transport comparables à une date ultérieure, à leur convenance, sous réserve de la disponibilité de sièges.

2. Le paragraphe 1, point a), s'applique également aux passagers dont le vol fait partie d'un voyage à forfait hormis en ce qui concerne le droit au remboursement si un tel droit découle de la directive 90/314/CEE.

3. Dans le cas d'une ville, d'une agglomération ou d'une région desservie par plusieurs aéroports, si le transporteur aérien effectif propose au passager un vol à destination d'un aéroport autre que celui qui était initialement prévu, le transporteur aérien effectif prend à sa charge les frais de transfert des passagers entre l'aéroport d'arrivée et l'aéroport initialement prévu ou une autre destination proche convenue avec le passager.

Le passager a-t-il droit au paiement de compensations ?

La lecture brute du Règlement Européen nous enseigne que le passager d’un vol retardé n’a pas droit au paiement de compensations.

Cependant, le jugement du 23 octobre (ci-après Jugement Nelson) en livre une interprétation élargie, d'ailleurs déjà indiquée dans le précédent Arrêt Sturgeon : en interprétant l'article 5(1)(c)(iii) qui exonère le transporteur aérien du paiement de compensation dans le cas d'un vol annulé dont les passagers auront été reroutés sur un autre vol avec une arrivée au plus tard 3 heures après l'heure initialement prévue.

La Cour a jugé que le principe d'équité entre passagers était de nature à comparer la situation d'un passager dont le vol est annulé à celui dont le vol est retardé de plus de 3 heures à l'arrivée

Elle confirme donc définitivement ce principe.

Cependant, la Cour confirme également que le passager n'aura pas droit au paiement de compensations dans le cas de retard dû à des circonstances extraordinaires hors contrôle du transporteur, c'est-à-dire les cas avérés de Force Majeure.

L’arrêt lui nous fournit de précieux éléments nous permettant d’apprécier la qualification de « retard » d’un vol.

En effet, lorsque le vol « retardé » est en fait « annulé », le passager a alors droit au paiement de compensations statutaires variant suivant la distance à parcourir.

Règlement Européen 261/2004 et Convention de Montréal, 1999

Une règle claire, déjà établie dans la jurisprudence et reprise dans le présent jugement : les compensations statutaires prévues par le Règlement Européen (à savoir une somme forfaitaire au pro rata de la distance du vol) s'ajoutent à celles prévues par la Convention de Montréal, 1999.

La différence étant que pour prétendre au paiement de compensations en vertu de la Convention, il reviendra au passager de prouver l'étendue exacte du préjudice causé par le retard.

Une simple perte de temps due au retard ne constituant pas un dommage en vertu de la Convention.

Les critères à retenir pour qualifier un vol de retardé ou d’annulé

1. Un vol est considéré comme retardé si il est effectué conformément à la programmation initialement prévue et si l’heure effective du départ est retardée par rapport à l’heure de départ prévue.

Le terme « programmation initialement prévue » est le facteur essentiel à retenir : on ne pourra donc qualifier un vol d’annulé que si le transporteur aérien effectif annule le vol et reporte le transport des passagers sur un autre vol également programmé mais dont la programmation initiale diffère de celle du vol initialement prévu.

En d’autres termes, il est possible de tracer ces différents vols par leurs plans de vols déposés auprès des autorités compétentes.

Il sera donc intéressant de noter que la simple apposition par un transporteur de son numéro de vol annulé sur un vol ultérieur programmé indépendamment du premier ne pourra donc être considéré comme un vol effectué pour le premier étant retardé mais sera bien un vol emprunté par des passagers dont le vol initial aura été annulé.

2. Ne sont pas repris comme critères pour la qualification d’un vol comme étant retardé ou annulé : la réémission de cartes d’embarquement, les indications sur le tableau d’affichage et les mentions indiquées, la composition du groupe de passagers transportés sur le vol effectif ; la reprise et remise de bagages.

Conclusions

L’arrêt rendu par la Cour de Justice confirme la volonté des autorités européennes à élargir les mesures de protection au consommateur en responsabilisant les transporteurs aériens.

Il convient cependant d’analyser cette jurisprudence au regard des textes et du contexte de chaque cas.

*Me David Sprecher est avocat spécialisé dans le droit du tourisme et de l’aviation civile et par ailleurs avocat du CEDIV. Il dirige les modules Droit des Mastères spécialisés tourisme aux ESC Toulouse et ESC Troyes.

Les informations contenues dans cet article ne peuvent en aucun cas servir de conseils juridiques et tout lecteur doit recourir aux services d’un avocat avant d’engager toute action. Seul le texte de l’arrêt rendu par la Cour de Justice a foi.

Le texte du Règlement Européen 261/2004 est disponible aux professionnels du tourisme sur simple demande à
david.sprecher@sprecher.co.il

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