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Aérien : le vrai du faux de NDC

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La convention des Entrepreneurs du Voyage (EDV) à Lille les 22-24 novembre 2017 étaient l'occasion d'une présentation NDC. Si elle a permis d’avancer vers davantage de compréhension du sujet, bien des questions restent en suspens.


Rédigé par Rémi Bain-Thouverez le Jeudi 14 Décembre 2017

Les Journées des Entrepreneurs ont eu lieu à Lille du 22 au 24 novembre 2017 DR
Les Journées des Entrepreneurs ont eu lieu à Lille du 22 au 24 novembre 2017 DR
D’incrédules, nous sommes passés à septique. Mais les agences de voyages restent encore, à l’heure actuelle, en mode interrogatif.

Jean-Pierre Mas, le président des Entreprises du Voyages (EDV) le résumait parfaitement : « En soit, nous n’avons rien contre NDC. Nous voulons simplement avoir la garantie de pouvoir continuer à bénéficier d’outils de comparaison, d’industrialisation des flux comptables et du traitement des modifications du PNR par l’agence ! »

En réponse, Yannick Hoyles, en charge du projet NDC chez Iata présentait un exposé dont l’objectif était la pédagogie. Pourtant certaines affirmations, en étant elliptiques, peuvent prêter à confusion. Efforçons nous de dégager le vrai du faux.

NDC Présentation

Selon Yannick Hoyles,

• NDC est un standard de distribution basé sur la norme Internet XML. Il permet d’échanger davantage d’informations que les standards actuels entre compagnies aériennes et agences de voyages.

• L’utilisation de l’XML permet d’échanger beaucoup d’informations, et donc des images, vidéos etc.

Vrai : XML est un protocole informatique ‘’plutôt’’ récent. Il est très employé par les acteurs du net et permet de pousser une plus grande diversité de flux que ne peuvent le faire les normes ATPCO/ OAG utilisées par les GDS depuis plus de 25 ans.

• NDC vise à moderniser la distribution des produits aériens auprès des agences de voyages, des entreprises et des voyageurs individuels.

Vrai : Il est incontestable que NDC laisse envisager des perspectives prometteuses de par sa capacité à transmettre des flux riches en informations. Par exemple, avec cette norme, il est parfaitement possible de présenter un siège Premium avec un verre de champagne accompagné de sa photo. C’est un exemple, mais il n’est pas réalisable sous normes ATPCO/OAG.

Faux : si le langage est moderne, il a besoin d’un système pour traiter le contenu. NDC ne propose rien de la sorte. Il permet un accès à un contenu. Parler de ‘’moderniser la distribution" ne s’entend qu’à partir du moment où les agences peuvent continuer de bénéficier d’un système apte à leur apporter faculté de comparaison et garantie de productivité. Il faudrait plutôt parler de régression si rien ne remplace les plateformes GDS.

IATA défend ici ses commanditaires compagnies aériennes sans prendre en compte le besoin des agences de voyages de disposer, comme le soulignait Jean-Pierre Mas, « d’outils de comparaison, d’industrialisation des flux comptables et de traitement des modifications du PNR par l’agence ».


Le GDS n'est pas qu'un intermédiaire

• NDC s’accompagne d’un changement de process de distribution, puisque la compagnie aérienne crée l’offre dans son environnement informatique, et que le GDS (ou agrégateur) est seulement un intermédiaire entre la compagnie aérienne et l’agence de voyages.

Vrai : NDC permet effectivement aux compagnies aériennes de créer l’offre dans son environnement informatique. Elles n’ont d’ailleurs pas attendu NDC pour lancer leur propre site internet BtoC.

Faux : Par contre la phrase laisse entendre que l’agrégateur ou le GDS n’est ‘’qu’un’’ intermédiaire ! C’est passer sous silence le fait qu'il est indispensable pour la distribution. Pour vendre un aller et retour Paris/Los Angeles, on peut aller directement sur le site d’une compagnie. C’est ce que propose NDC.

Mais si le voyage le moins cher ou le plus adapté en terme d’horaires consiste à emprunter plusieurs vols sur des compagnies différentes ou bien si des modifications sont à apporter en cas de changement d’horaires à l’initiative des Compagnies, l’agence n’est pas alertée comme aujourd’hui elles le sont via les GDS. La distribution ne peut pas se passer de cet intermédiaire qui garantit au voyageur final la bonne exécution du voyage acheté.


La personnalisation au coeur des enjeux

NDC n’est pas un système ni un modèle commercial, affirme Yannick Hoyles en listant les avantages pour les compagnies aériennes et pour la distribution.

• Différentiation – Elles pourront mieux décrire les particularités de leurs produits et services via tous les canaux

Vrai : C’est incontestable. Les compagnies aériennes, ayant la main sur les offres proposées et les descriptifs produits/services pourront, avec plus de réactivité, valoriser leur contenu et mieux soutenir leur politique marketing.

• Nouveaux produits - Elles vont mieux commercialiser leurs produits actuels et nouveaux (wifi à bord, accès au lounge, etc.)

Vrai : Un des principaux but d’NDC est celui là : permettre la différenciation des compagnies aériennes et mettre en avant leurs avantages concurrentiels.

• Personnalisation – La compagnie aérienne peut personnaliser son offre – si le client choisit d’être identifié.

Vrai : En réservant directement auprès de la compagnie, cette dernière à la main pour intégrer le profil de son voyageur et aller plus loin dans la personnalisation. Ensuite pour l’exploitation, c’est une question d’algorithme et le champ des possibles est, en-effet, vaste.


Bilan pour les compagnies aériennes : incontestablement, la norme NDC n’apporte que des avantages aux compagnies aériennes. D'autant plus, même si à ce stade de sa présentation Yannick Hoyles ne l’évoque pas, mais c’est sous-jasent, elle permet de court-circuiter un intermédiaire qui a ses yeux est coûteux : le GDS.

Pour le voyageur d’affaire et les agences de voyages, les conséquences ne sont pas les mêmes.

La cible du voyageur d'affaires

Yannick Hoyles s'intéresse ensuite aux voyageurs d'affaires.

• Expérience voyageur – Segmenter les types de voyageurs et fournir une offre personnalisée.

Vrai : Dans un espace restreint via des canaux restreints, c’est-à-dire limité aux outils de réservation B2B ou flux API NDC que chaque compagnie propose aux acteurs de la distribution.

• Offre – une offre plus riche en contenu qui se rapproche des sites B2C des compagnies

Vrai : C’est même le but recherché. Les compagnies ont investi des sommes assez considérables pour valoriser leurs offres. NDC permet un accès à l’intégralité de ce contenu.

• Comparabilité – Des offres plus comparables car incluant les options

Faux : La démonstration de Yannick Hoyles repose sur le fait (avéré) que la norme NDC permet un accès à un contenu plus riche. Cependant, la distribution a besoin, en plus d’une offre plus riche en contenu, d’un système de comparaison pour comparer les offres entre elles.

Pour ce faire, il manque justement l’intermédiaire qui permettrait de comparer les propositions tarifaires émanant des différentes compagnies. Qui peut croire qu’une agence de voyages va prendre le temps de pointer chaque site B2B de chaque compagnie pour sélectionner le meilleur vol ?


Valorisation de l’offre : oui. Comparaison : non.

Tout repose sur le commerce ou plutôt l’e-commerce. Dans les années 70, les hypermarchés ont inventé le système qu'utilise aujourd'hui les sites de vente en ligne : un prix d’appel pour attirer le consommateur et le tour est joué. Par exemple, la compagnie peut vendre un vol au prix de base de 49€ et récupère les marges sur les ventes additionnelles.

La stratégie repose sur ce fameux prix d’appel. En contrepartie, les compagnies doivent accepter d’être comparées.

Ici, 2 logiques s’affrontent :

• Les compagnies aériennes cherchent à se différencier et à valoriser leurs avantages concurrentiels, quel que soit le canal de vente utilisé. Le problème, c’est qu’elles se sentent limitées par le filtre des GDS.

• Les canaux de distribution dont la valeur ajoutée repose, a contrario, sur la comparaison.

A ce stade, toutes les pages ne sont pas encore écrites. Il semble qu’on arrive au bout d’un cycle. Un nombre limité de produits/services ancillaires sont normés ATPCO alors que les compagnies en proposent des centaines sur leurs sites BtoC.

Hormis peut-être pour Travelport qui a développé une plateforme dédiée, ces ventes additionnelles ne sont pas simples à proposer via le canal GDS, et s’apparentent à « valiser » un deuxième billet via l’émission d’un EMD.

Le dialogue GDS/IATA doit donc nécessairement continuer dans la perspective de pouvoir offrir le meilleur à chacun : plus de richesse de l’offre sans que cela se fasse au dépend des outils de comparaison des agences.

Comparaison et richesse de contenu

La comparaison c’est justement le rôle de l’intermédiaire. Emmanuel Bourgeat, directeur général de Travelport France explique : « La norme NDC est une opportunité pour les agences de voyages. Devant une offre plus riche, les consommateurs vont avoir besoin de conseils. La distribution, par son expertise, pourra démontrer sa valeur ajoutée. Par contre elle a besoin de disposer des bons outils pour ne pas perdre en productivité tout en gagnant en qualité de prestation. »

Quels seraient ces fameux bons outils ?

• Coût – Une meilleure visibilité des coûts liés aux produits et aux options

Vrai : si la démarche consiste à pointer compagnie par compagnie

Faux : si la démarche consiste à comparer les offres entre elles

Pour les agences de voyages, le dilemme est celui-là : elles sont bien entendu favorables à un contenu plus riche, ce qui est la promesse de la norme NDC, à condition que leur process de travail ne s’en trouve pas impacté au détriment de leur productivité !

• Offre - Pouvoir commercialiser une offre plus riche

Vrai : grâce au langage XML

• Service - Leur permettre de mieux servir le client

Faux : Du point de vue de la distribution c’est faux. Certes elle va accéder à un contenu plus riche, mais ce sera compagnie par compagnie. Le service client est compliqué parce que l'agence n’est plus capable de garantir l’exécution parfaite du parcours du Voyageur. Un intermédiaire lui permettra de rester sur un même écran, de comparer automatiquement les offres, de procéder à des modifications, de bénéficier de l’émission de messages comptables uniques etc.

Mais avec la norme NDC ces intermédiaires risque de disparaître : si les GDS ont investi des centaines de millions d’euros en technologies, il est peu probable qu’un intermédiaire miracle voit le jour. Question de temps et de moyen. Les seuls à avoir vraiment les moyens sont les GAFA. Il est par contre possible de voir apparaître des solutions qui couvriront une partie de la demande. Resaneo et MB3M sont assez en avance dans ce domaine et offrent la comparaison et l’intégration dans le back-office.


Commercialiser une offre plus riche

• Offre - Pouvoir commercialiser une offre plus riche

Vrai : Les contenus sont nativement plus riches via l’XML de la norme NDC

• Productivité - Rendre la vente d’ancillaire plus efficace

Vrai : car le contenu est plus riche.

• GDS et XML quelle est la situation actuelle ?

Si les GDS ont tardé à investir en langage XML, c'est désormais le cas. D'abord avec Easy jet, via une l’API en XML. Au fur et à mesure les autres compagnies low cost ont suivi. Depuis plusieurs années, les GDS proposent la revente de prestations basées sous norme ATPCO/OAG comme sur des échanges XML.

• Les agences se sont-elles lancées dans la vente de ces produits plus ?

Pas vraiment. C’est bien ce qui préoccupe les compagnies aériennes : elles ont massivement investi pour diversifier et valoriser leur contenu mais les agences répondent timidement. Pour pallier à ce manque de réactivité, les compagnies ont créé des packages incluant une série de prestations comprises dans le prix globale. Ces offres (Familly fares ou Branded fares) connaissent un développement exponentiel depuis 2014, mais manquent de visibilité via les GDS.

• Compétitivité - Mieux concurrencer les sites des compagnies aériennes

Faux : la surtaxe imposée par les compagnies met à mal cette affirmation, même si Laurent Briquet de Speed Media précisait à la convention de l’EDV à Lille qu'il ne fallait pas « confondre le commercial et la technologie. La surtaxe GDS est une mesure commerciale. NDC ne rentre pas dans cette problématique, c’est juste un langage informatique ».

Problème : les agences de voyages ne peuvent pas se passer de ces intermédiaires et auront plus de difficultés à justifier les prix proposés. Le consommateur, qui a pris l’habitude de comparer, se sentira lésé par la différence de prix.

La norme NDC pour favoriser l'agilité des compagnies

La norme NDC, basée sur l’XML, un langage informatique massivement exploité par le web, va favoriser l’agilité des compagnies, leur réactivité et la richesse des contenus qu’elles proposent.

Il est faux de laisser croire que la distribution peut se passer d’intermédiaire. Le service d’un agrégateur apte à fournir une solution capable de comparer, d’assurer le suivi, l’après-vente du PNR par l’agence, le message comptable, etc, est indispensable pour la distribution.
La distribution est donc en attente d’un ou de plusieurs agrégateurs pour leur front et back office.

Qui d’un agrégateur miracle, d’un agrégateur opportuniste ou des GDS transformés en super agrégateur, va apporter la bonne réponse ? L’avenir nous le dira, mais la réponse devra être rapide.


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