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Justice : Ryanair condamnée, que faut-il retenir du jugement ?🔑

Une cinquantaine de passagers indemnisés pour "non-respect de leurs droits"


Compagnie majeure en Europe, Ryanair se retrouve régulièrement devant les tribunaux. Parfois face à ses salariés, en d'autres occasions face à ses distributeurs. Mais en décembre dernier, ce sont des passagers qui l'ont emporté face à la low cost, pour de nombreux retards, annulations et refus d’embarquement sans indemnisation. Des condamnations qui pourraient avoir un effet boule de neige...


Rédigé par le Mardi 20 Février 2024

Retards, annulations, refus d’embarquement sans indemnisation... En décembre dernier, Ryanair a été condamnée pour ne pas avoir respecté les droits de ses passagers entre avril 2016 et juillet 2019 - DR : DepositPhotos.com, photovs
Retards, annulations, refus d’embarquement sans indemnisation... En décembre dernier, Ryanair a été condamnée pour ne pas avoir respecté les droits de ses passagers entre avril 2016 et juillet 2019 - DR : DepositPhotos.com, photovs
Si elle vient de remporter une bataille en Italie face à Lastminute à propos de son modèle de distribution, Ryanair a également essuyé, voilà deux mois, une condamnation pour non-respect des droits de ses passagers, devant le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence.

L'information passe difficilement inaperçue, elle figure même en page d'accueil du site de Ryanair, sous la forme d'un message intitulé "Communiqué judiciaire".

Dans un cadre rouge, avec des termes surlignés en gras, la mention est visible par tous les clients de la low cost.

"Ce message est une des sanctions du jugement du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence en date du 12 décembre 2023. La compagnie low cost a été condamnée pour ne pas avoir respecté les droits de ses passagers entre avril 2016 et juillet 2019.

Plus précisément, pour de nombreux retards, annulations et refus d’embarquement sans indemnisation des passagers, contrairement au Règlement européen sur les droits des passagers aériens
", explique dans une communication l'UFC-Que Choisir.


57 passagers de Ryanair indemnisés

La publication du communiqué judiciaire sur le site de Ryanair - Capture d'écran site Ryanair
La publication du communiqué judiciaire sur le site de Ryanair - Capture d'écran site Ryanair
L'organisme s'est associé, conjointement avec plusieurs dizaines de consommateurs, contre Ryanair dans cette bataille judiciaire.

Si la décision du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence est susceptible de recours, elle vient en première instance lourdement sanctionner la compagnie en insistant sur "la résistance caractérisée, abusive et condamnable de cette dernière à reconnaître et verser les indemnités prévues par la législation européenne", ajoute l'UFC-Que Choisir.

Ainsi, 57 passagers éligibles à l’indemnisation relevant de l’article 7 du Règlement CE n°261/2004 du Parlement Européen et du Conseil du 11 février 2004, ont obtenu 250€ de dommages et intérêts chacun, en plus d'une indemnité légale de 250€.

L'association de défense des consommateurs a obtenu, quant à elle et en raison de cette même "résistance fautive", 150 000€ de dommages et intérêts en réparation du préjudice à l’intérêt collectif des consommateurs.

Quelles leçons tirer de ce jugement ?

Mais alors, quelles leçons retirer de ce jugement, notamment pour les passagers ?

Tout d'abord, que le Règlement européen CE n°261/2004 leur donne droit à indemnisation dans plusieurs cas de figure : refus d’embarquement ou surbooking (article 4) ; annulation lorsqu’elle ne relève pas de circonstances extraordinaires (article 5) ; différents cas de retards identifiés dans l'article 6.

L'article 7, quant à lui, précise le droit à l’indemnisation dont le montant est fixé à :

a) 250 euros pour tous les vols de 1 500 kilomètres ou moins ;

b) 400 euros pour tous les vols intracommunautaires de plus de 1 500 kilomètres et pour tous les autres vols de 1 500 à 3 500 kilomètres ;

c) 600 euros pour tous les vols qui ne relèvent pas des points a) ou b).

En ce qui concerne les cas de retard, le jugement rappelle l’arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (ex-CJCE) du 19 novembre 2009 (Affaire C-402/07 et C-432/07), qui précise que : "Les articles 5, 6 et 7 du règlement n°261/2004 doivent être interprétés en ce sens que les passagers de vols retardés peuvent être assimilés aux passagers de vols annulés aux fins de l'application du droit à indemnisation et qu’ils peuvent ainsi invoquer le droit à indemnisation prévu à l’article 7 de ce règlement lorsqu’ils subissent, en raison d’un vol retardé, une perte de temps égale ou supérieure à trois heures, c’est-à-dire lorsqu’ils atteignent leur destination finale trois heures ou plus après l’heure d’arrivée initialement prévue par le transporteur aérien.

Cependant, un tel retard ne donne pas droit à une indemnisation en faveur des passagers si le transporteur aérien est en mesure de prouver que le retard important est dû à des circonstances extraordinaires qui n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises, à savoir des circonstances qui échappent à la maîtrise effective du transporteur aérien.
"

Ryanair condamnée pour "résistance abusive et fautive"

Autre mention très importante rappelée par ce jugement en ce qui concerne les indemnisations prévues par le Règlement : si les passagers sont en droit de les exiger, le transporteur, en revanche, n'est pas tenu à un "versement spontané au passager de ces indemnités".

Autrement dit, c'est au passager d'en faire la demande ! "Si le transporteur est défaillant à l’exécution de ses obligations, le passager doit dans ces conditions présenter une réclamation formelle auprès du transporteur, valant mise en demeure de ce dernier, à cette date, d’avoir à s’exécuter", indique le Tribunal.

De même, le Règlement "ne précise pas de délai spécifique quant à leur versement effectif" (hormis le délai de 7 jours prévu pour le remboursement du billet d’un vol annulé non remplacé).

Autre point à retenir, cette fois-ci sur "la résistance abusive et fautive" de Ryanair. Dans le jugement, on peut notamment lire que la compagnie a mis "entre 45,3 mois (3,8 ans) et 85,4 mois (7,1 ans)" pour reconnaitre l’exigibilité des indemnités relevant de l’article 7 du Règlement, et pour ensuite procéder à leur versement !

"Quelles que soient les justifications invoquées par la Compagnie, ces délais conséquents caractérisent une résistance délibérée, abusive et condamnable, à se conformer au Règlement et sont constitutifs d’un préjudice certain pour les passagers concernés, qu’il y a lieu de prendre en considération", estime le tribunal.

Ce dernier a tenu compte de cet important retard ainsi que des frais supportés par chacun des passagers dans le cadre de cette procédure (honoraires d’avocats, commissions UFC-Que Choisir avec INDEMNIT’AIR, le service d’assistance aux passagers de transports aérien de l'UFC-Que Choisir), pour exiger de la low cost le paiement de 250€ de dommages-intérêts à chacun des passagers éligibles à l’article 7 du Règlement, pour résistance abusive.

Enfin, dans cette affaire, l’UFC-Que Choisir a marqué un point en soulevant le manque de visibilité pour les passagers quant aux dispositions contractuelles de Ryanair, démontrant que "la Compagnie recourt à une pratique commerciale trompeuse par omission sur une information substantielle et au détriment des consommateurs, à savoir sur leurs droits qui sont, a minima, fournis de manière dissimulée et inintelligible".

Si le Tribunal n'a pas reconnu qu'il s'agissait là d'une pratique commerciale trompeuse de la part de Ryanair, au sens de l’article L121-2 du Code de la consommation, le jugement souligne tout de même que "le site Internet de Ryanair est perfectible".

QW ou QX : des taxes remboursables

Au-delà de ce jugement, rappelons également qu'en cas d'annulation de vol ou de no show, les passagers ont la possibilité - s'ils en font la demande - de récupérer certaines taxes, "celles qui sont liées à l'embarquement effectif du passager", commente Me Yves Removille.

Il s'agit là d'une disposition du Code de la Consommation (article L224-66) qui date de mars 2014 et qui prévoit que les taxes aériennes QW (taxe aéroport) et QX (redevance passager) doivent être remboursées.

Toutes les autres taxes - surcharge carburant, sureté, solidarité - ne sont pas remboursables", précise l'avocat spécialisé en droit du tourisme.

Le remboursement doit être effectué dans les 30 jours francs à partir de la date de réception de la demande, laquelle doit être adressée à la compagnie aérienne ou à l'agence de voyages.

"Cette disposition est relativement peu connue des passagers, nombre d'entre eux ne sont pas au courant qu'ils peuvent demander le remboursement de ces deux taxes", ajoute Me Yves Removille. Pourtant elle figure dans les conditions générales de vente et le contrat de transport.

Les compagnies aériennes qui n'effectuent pas spontanément ce remboursement ne s'exposent à aucune sanction. Le passager, de son côté, dispose de 5 ans pour effectuer la démarche, soit le délai de la prescription légale.

"Dans le cas où un passager n'obtiendrait pas le remboursement alors qu'il a fait une demande et qu'il peut en justifier, il peut déposer une réclamation auprès de la DGAC ou la DDPP (direction départementale de la protection des populations, ndlr) en expliquant que la compagnie aérienne ne respecte pas les dispositions du Code de la Consommation", commente l'avocat.

En effet, "il existe des amendes administratives qui peuvent ĂŞtre lourdes pour les compagnies qui ne respectent pas ces dispositions : jusqu'Ă  3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale", poursuit-il.

Lire aussi : Ryanair - agences : vers un réchauffement des relations ? 🔑


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