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Kérosène aux Antilles : les compagnies réclament des millions à l'Etat ! 🔑

Air France, Corsair et Air Caraïbes ont attaqué l'Etat français en justice


C'est l'histoire d'un bras de fer qui dure depuis maintenant deux ans. Pour éviter d'éventuels débordements sociaux dans les Antilles françaises, le Gouvernement a fait payer la hausse du carburant aux... compagnies aériennes. La Fédération Nationale de l'Aviation Marchande (FNAM) a pris part à l'offensive, en vain. Air France, Corsair et Air Caraïbes ont alors assigné l'Etat en justice. Elles lui ont réclamé près de 18 millions d'euros de réparations. Découvrez le 3e épisode de la série.


Rédigé par le Lundi 15 Avril 2024

Air France, Corsair et Air Caraïbes ont attaqué l'Etat français en justice - Depositphotos @VectorMine @Kreativ @Kanoktuch
Air France, Corsair et Air Caraïbes ont attaqué l'Etat français en justice - Depositphotos @VectorMine @Kreativ @Kanoktuch
Le secteur de l'aérien pourrait bien nourrir l'inspiration des auteurs de scénarios de séries !

Nous sommes en juin 2022. Alors que les vols reprennent timidement leur rythme de croisière, entre la métropole et les DOM-TOM après deux années délicates, le Gouvernement décide de faire peser la hausse des cours du pétrole aux compagnies aériennes plutôt qu'à population.

Bilan : depuis presque deux ans, les transporteurs sont engagés dans un bras de fer interminable, dont personne ne voit vraiment l'issue.

"Nous sommes vent debout contre cette proposition, c'est inadmissible. D'autant que cela s'ajoute à un carburant que nous achetons déjà plus cher dans les Antilles françaises.

Pour les compagnies c'est une sorte de double peine,
" nous confiait un responsable de la FNAM.

Les préfets de Guadeloupe et de Martinique, en accord avec l'exécutif alors dirigé par Elisabeth Borne, avaient augmenté de 15% les taxes pesant sur le kérosène.

En Guyane la hausse n'était à ce moment là, que de 5%.

Depuis les compagnies ont porté l'affaire en justice et attaqué l'Etat, en demandant non seulement l'arrêt de cette pratique, mais aussi des compensations.

Et d'après les documents que nous avons pu consulter, leurs avocats ont eu la main lourde, au moment de coucher les chiffres évaluant les préjudices.


Air France, Corsair et Air Caraïbes demandent 18 millions d'euros de réparation

Dans le 1er épisode, la FNAM avait porté l'affaire sur la place publique pour faire réagir les pouvoirs publics.

Face à l'immobilisme étatique, le Syndicat avait alors décidé de passer à la vitesse supérieure, pour annuler cette hausse. Nous ouvrions alors le deuxième épisode.

Les compagnies entamaient alors un recours contentieux en se basant sur l'irrégularité légale de la pratique.

"Autant le prix de l'essence est réglementé par l'Etat, autant le kérosène ne l'est pas.

La Société anonyme de la raffinerie des Antilles (SARA) et les autorités publiques ont mis en place un dispositif pour augmenter le prix du carburant utilisé dans les avions,

Nous explorons la voie juridique,
" nous expliquait alors Laurent Timsit, le délégué général de la Fédération Nationale de l'Aviation Marchande (FNAM).

Mais cette action a été rejetée.

Les principales intéressées se sont alors saisies du dossier en attaquant l'Etat en justice. Et voici le synopsis du nouvel opus.

Selon les rendus de la 1ère chambre du Tribunal administratif de Martinique, que nous avons pu consulter, les avocats d'Air Caraïbes, de Corsair et d'Air France demandaient au gouvernement français des dédommagements.

Des sommes "en réparation des préjudices résultant de l'illégalité de la décision non formalisée par laquelle le préfet de la Martinique aurait décidé de modifier la formule de détermination du prix de vente du kérosène dans les Antilles françaises et la Guyane."

Air France, Corsair et Air Caraïbes : comment les avocats justifient-ils leur action ?

Du 4 août 2022 au 28 avril 2023, le manque à gagner assorti des intérêts de retard était estimé à 10,51 millions d'euros pour Air Caraïbes, 2,44 millions d'euros pour Corsair et 4,99 millions d'euros pour Air France.

Les avocats ont justifié l'irrégularité, par des discussions entre le préfet de la Martinique et les responsables des compagnies, les 30 et 31 mai 2022.

"La société Air Caraïbes expose lors de cette réunion, que le préfet aurait déclaré verbalement qu'il appartenait aux compagnies de faire des efforts, et que l'augmentation du prix du pétrole ne pouvait être supportée intégralement par le grand public, qui a déjà subi des hausses de prix conséquentes sur les produits pétroliers courants," précise le document judiciaire.

La décision aurait été prise d'augmenter le prix du kérosène, pour préserver une paix sociale chancelante dans les Antilles.

Malgré tout, le tribunal a jugé qu'il n'y avait une absence de preuve permettant d'établir la teneur des déclarations du préfet de la Martinique.

Ce dernier a maintenu qu'il n'était intervenu en aucune manière dans les décisions relatives au prix de vente du kérosène, prises par la SARA. Celle-ci a publié un communiqué, le 15 juin 2022, pour justifier sa décision.

En outre, les défenseurs ont contesté la mise en cause du préfet de la Martinique qui ne dispose d'aucune compétence pour règlementer le tarif du kérosène. Par ailleurs, outre différents vices de forme, aucun arrêté préfectoral n'a été publié.

Sauf que pour le tribunal, dans la mesure où le préfet de la Martinique "conteste avoir pris part d'une quelconque manière à la décision de la SARA," et en "l'absence d'élément au dossier tel qu'une déclaration publique ou une manifestation concrète", l'illégalité n'a pu être démontrée par les compagnies aériennes.

Voilà pourquoi, le tribunal administratif a rejeté les requêtes aussi bien de Corsair que d'Air France et Air Caraïbes.

Air France, Corsair et Air Caraïbes ont fait appel !

Selon nos informations, les 3 transporteurs ont décidé de faire appel de la décision devant la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux !

Les compagnies ne veulent pas lâcher l'affaire et ce d'autant que le manque à gagner est conséquent.

"C'est toujours un sujet bien évidemment.

Nous devons être persévérants, car tout le monde critique le prix des billets, mais le carburant est un poste de dépense énorme pour les transporteurs aériens.

Nous sommes très surpris du procédé et très mécontents,
" peste un dirigeant interrogé.

Le kérosène représente, tout dépend du cours du baril, entre 32 et 35% des dépenses d'une compagnie.

Un surcoût qui est inévitablement répercuté sur les billets.

L'indice des prix de la DGAC de mars 2024 indiquait que les tarifs des vols dans les DOM-TOM étaient 36,3% plus chers qu'en 2017, l'année de référence.

Tout simplement la hausse la plus importante, avec les lignes vers le Moyen-Orient (+39,3%).

Pour l'heure, le gouvernement ne semble pas vouloir revenir sur cette décision, nous dit-on.

La solution viendra peut-être du tribunal administratif de Bordeaux.

Corsair : un surcoût de 13 500€ par jour !

"Nous avons fait un appel, pour protester, mais nous n'avons plus vraiment d'écho de la part de l'Etat sur ce sujet.

Le fait d'être de concert, nous espérons être visibles et entendus, c'est déjà un premier pas,
" se montre fataliste un patron.

Dans le même temps, la course du baril fonce vers le cap des 100 dollars.

La SARA aurait de nouveau augmenté le montant facturé à compter du 1er mars, le surcoût ne serait plus de 15%, mais de 17% par rapport à la métropole.

"Nous atteignons le niveau, le plus élevé appliqué depuis août 2022, alors que l’indice de référence a baissé de -24% entre ce même mois et février 2024.

Tout ça est totalement incohérent.

Cette décision unilatérale coûte plusieurs millions d’euros aux compagnies. Ce devait être transitoire et maintenant cela devient définitif, ce n'est pas acceptable.
" s'indigne un autre responsable.

Pour Corsair, le surcoût est estimé à 13 500 euros par jour, soit 4,93 millions d'euros, soit l'équivalent du bénéfice budgétisé par ses actionnaires, en 2024 !

Et ce n'est pas tout : alors que les iliens se plaignent de billets devenus trop chers, le redémarrage tant attendu d'Air Antilles va s'inscrire, dans un contexte économique assez peu favorable pour faire éclater la bulle inflationniste de l'aérien aux Antilles.


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