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Le train, un mode de transport de « riches » ?


Entre avril 2021 et avril 2022, le prix des billets de train s’est envolé. Une hausse de 14, 6%, affiche l’INSEE. Et l’augmentation n’est pas près d’être enrayée avec la crise énergétique.


Rédigé par le Mercredi 14 Décembre 2022

L’annonce par la SNCF d’une nouvelle hausse du prix des billets de train de 5% en moyenne à partir du 10 janvier précède déjà l’augmentation prévue d’au moins 10%, si le surcoût entrainé par la situation en Ukraine se répercutait entièrement.

La SNCF a adopté le principe du « Yield » censé s’adapter au comportement des voyageurs. Mais cette pratique suppose une connaissance éclairée de la demande mais également de ses propres capacités, afin de proposer la meilleure place, au meilleur prix, au meilleur client, au meilleur moment.

Comment cette technique commerciale dessert-elle finalement les utilisateurs du réseau ferroviaire, qui n’hésitent pas à le faire savoir sur les réseaux sociaux ?

Faut-il rester sur les rails que le gouvernement dessine, ou prendre son envol pour plus de liberté ?

Une tarification qui exclut les familles et les plus démunis

Dans son communiqué, SNCF Voyageurs affirme simplement que les mesures prises permettront de "limiter la hausse du prix moyen payé par les voyageurs à 5%".

Mais le président de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut), Bruno Gazeau s'inquiète d'une forte augmentation des prix à cause de ce système et demande "un effort de transparence" sur les tarifs proposés.

« La SNCF a mis en place, tardivement, une offre à petits prix qui ouvre le TGV à une plus large fréquentation, à travers, notamment, l’augmentation des liaisons low cost (bas prix) Ouigo. Mais sur au moins trois aspects, la stratégie de la SNCF exclut toute une partie de la population, met en garde Mr Gazeau.

Tout d’abord, sa politique de fixation des prix est très défavorable aux familles. Calquée sur celle des compagnies aériennes, elle privilégie ceux qui peuvent anticiper leur trajet plusieurs mois avant, sont sûrs de ne pas changer leur billet, partent en décalé avec les grands flux et peuvent faire l’avance de trésorerie. Les familles, elles, sont contraintes de voyager le week-end et lors des vacances scolaires : les périodes les plus onéreuses…. À partir de quatre personnes, le TGV devient donc tellement cher que le choix de la voiture l’emporte. Aujourd’hui, les baisses de prix sont allouées à ceux qui peuvent s’organiser pour en bénéficier, et pas à ceux qui en ont vraiment besoin : les familles et les plus démunis.

Des voyageurs pris en otage par le système du « Yield »

« C’est l’alternative la plus écologique pour voyager, mais les prix sont ahurissants », déplore une usagère qui s’envolera fin août pour Barcelone, en Espagne.
« L’aller-retour en avion m’a coûté moins cher (140 €) que le simple aller pour Nice », déplore-t-elle.

En s’y prenant deux semaines en avance les montants dépassent souvent les deux chiffres.
Pour Saint-Malo, en Bretagne, le train le moins cher coûte 115 € (l’aller uniquement). Pour La Rochelle, c123 €. Parmi les trajets les plus onéreux, le Paris-Biarritz ne coûte pas moins de 168,90 €.

« La SNCF, c’est pour les riches et ça commence à devenir emmerdant », s’insurge sur Twitter Marie Blanchard, une Nancéienne devait se rendre en train à Strasbourg cet été.

La politique du « Yield Management », devient encore plus pénalisante en période de grève. Moins de trains circulent, mais comme l’offre et la demande continuent de déterminer le prix d’un billet, les prix explosent en période de grèves. Selon un témoignage accordé à Europe 1, à la mi-septembre, Clément avait réservé un aller-retour Montpellier-Paris pour 54 euros, il a dû payer un nouveau billet aller à 125 euros.

Ce système de management permet en outre de masquer une augmentation réelle du prix du billet effectivement payé par l'usager.
Le rapport Mariton et la FNAUT l’ont dénoncé mais les réponses de la SNCF ne sont pas satisfaisantes : l'affichage du prix moyen ne suffit pas pour éclairer l'usager, sauf à le culpabiliser de ne pas avoir réservé son voyage au bon moment.

Les places manquent, les prix flambent sur les Lignes Grande Vitesse

© Depositphotos
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Mais le président de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut), nous fait remarquer que « les TGV à petits prix sont disponibles uniquement sur les grands axes : Paris-Nantes, Paris-Marseille, Paris-Strasbourg, etc. Mais pas sur les parcours transversaux, comme Lyon-Strasbourg ou Bordeaux-Marseille, par exemple. Or toute la France n’est pas parisienne. La SNCF pense avant tout à sa rentabilité, et pas assez aux besoins des clients. »

Par ailleurs, on obtient un tarif au kilomètre différent suivant que le départ se fait depuis une grande ville ou petite ville.
Les billets PREM’S par exemple n'existent que pour les grandes villes et condamnent les usagers à prendre leur véhicule pour aller chercher le train au meilleur tarif dans les villes de plus grande importance.

« Je le réserve toujours un mois à l’avance et je le paye 20 euros de plus qu’avant pour trente minutes de trajet alors que j’ai la carte avantage ! » désespère Ilona, à la gare de Paris.

« La valeur de départ d’un billet n’a pas augmenté, certes, atteste Christian Broucaret, le président de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports de Nouvelle-Aquitaine (Fnaut). Mais les prix étant basés sur le principe du Yield management, plus la demande est forte, plus vous achetez votre billet tard et plus le tarif augmente. Ce sont la rareté des trains combinée à la hausse de la fréquentation et l’impact sur la maintenance qui viennent amplifier les algorithmes. Les prix des billets deviennent donc plus vite plus chers qu’en 2019 même s’il n’est pas possible de savoir exactement de combien les prix ont augmenté.
« La SNCF ne s’attendait pas à ce que les gens reviennent aussi vite dans les trains après le Covid »
, conclue Christian Broucaret.

Les acteurs de la région manifestent eux aussi leur mécontentement. Invité sur le plateau de France 3 Nouvelle-Aquitaine, dimanche 27 novembre, le président de la Région Alain Rousset a confirmé un bras de fer engagé avec la SNCF.

La Fnaut et le comité régional du tourisme adressaient d’ailleurs un courrier le 7 juillet au directeur général de la SNCF, la Région, la Métropole, la CCI Nouvelle-Aquitaine, dans lequel ils déploraient « une offre TGV qui n’a de cesse de réduire », des trains saturés dès le jeudi, et jusqu’au lundi, un choix d’horaires très contraint, et des prix ayant fortement augmenté, notamment les tarifs flexibles ».

C’est dans cet atmosphère que les voyageurs finissent par se tourner vers l’avion aussi souvent que possible.

L’avion : un choix équivalent voire moins coûteux que le train

L’enquête réalisée en 2021 par l'union des consommateurs UFC-Que Choisir a démontré qu’un vol de 2h30 coûte en moyenne 8 € de plus que le trajet équivalent en avion.

En effet, sur plusieurs destinations, et à horaires identiques, les lignes aériennes sont plus avantageuses que le mode ferroviaire. La différence affichée est parfois ahurissante.

Sur un Paris-Nice par exemple, un passager sans carte de réduction, âgé de plus de 26 ans qui aurait réservé trois semaines avant les vacances de Noël, Air France affiche un aller à 72 euros tandis que le billet de train, lui, coûte 115 euros. Pour le retour, le passager au départ de Nice paiera 103 euros avec la compagnie aérienne et 115 euros sur les rails.
Ainsi, en choisissant l’avion, économisera 55 euros !
À ceci s’ajoute le gain de temps, notamment sur un tel trajet (1h25 de vol contre un peu moins de 6 heures en train).
Un autre exemple, pour un week-end d’octobre, un aller-retour en TGV (hors OUIGO) coûtait 222 euros contre 106 euros pour un vol avec air France à des horaires comparables.

Pourquoi le consommateur choisirait-il de voyager plus cher pour une durée de de trajet plus longue qui plus est ?

Le reporter de RTL Arnaud Tousch a effectué une comparaison avec les prix des vols. « Si l'on prend l'exemple d'une famille avec les parents qui ont une carte avantage, dont le prix est de 49 euros par an avec la promesse de prix bloqués en seconde classe, le coût d'un Paris-Nice, départ le 23 décembre et retour une semaine après, pour quatre personnes avec deux adolescents de 12 et 13 ans revient à 548 euros avec carte et 860 euros sans carte. En avion, la facture est de 710 euros pour un Paris-Nice avec quatre bagages en soute sur Easyjet, soit 150 euros de moins par rapport au train sans carte de réduction. »

L’explication à ces différences spectaculaires ? Les compagnies aériennes ont beaucoup souffert de la pandémie, et ont donc lancé une campagne de petits prix pour relancer l'activité, à tel point que certains trajets intérieurs coûtent beaucoup moins chers que ceux proposés par la SNCF

Ainsi, dans la course effrénée aux bas prix entre l'avion et le train, le gagnant n'est pas forcément celui qu'on attend.
De nombreux trajets reviennent moins chers en avion qu'en train… La différence de prix en désespère plus d’un. La SNCF elle, continue de défendre ses prix :

"Ce n'est pas le train qui est trop cher, c'est l'avion qui ne l'est pas assez. Mettre des trains à 30 euros pour relier Paris à Toulouse, ce n'est pas possible pour nous", expliquait le président de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, le 1er décembre à l'Assemblée nationale.

Bien que cet argument soit défendable, l’intérêt du voyageur prédominera encore, a fortiori dans une période de Noël prise d’assaut par l’inflation.

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