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Tourisme : mondialisation, banalisation, standardisation…

une industrie dont les décideurs ne sont plus de chez nous


L’Europe, c’est un peu comme la langue d’Esope : la meilleure des choses, pour la paix et l'économie et la pire pour l’identité des Européens. Plus que n’importe quel secteur, le tourisme reflète ce dualisme. Michel Ghesquière évoque le cas de la Belgique mais aussi celui de la France où, mondialisation aidant, les centres de décision des grands groupes se sont, eux aussi, "délocalisés"...


Rédigé par Michel Ghesquière à Bruxelles - michel.ghesquiere@skynet.be le Jeudi 30 Novembre 2006

Le tourisme organisé, dans ce pays, est sans aucun doute celui qui détient la plus grande part de marché puisque sur +/- 8 millions de voyages effectués par an à l’étranger, près de 3,5 millions sont des forfaits. Et ce chiffre ne tient pas compte des transports secs (avions, ferries et autocars) et des réservations hôtelières achetées auprès des AGV.

Et si l'on analyse les acteurs du marché, il faut bien constater que la part de marché des voyagistes vraiment belges est plus que restreinte. Si on prend les opérateurs importants dans le royaume, ils appartiennent quasi tous à de groupes dont les capitaux ne sont pas belges ou dont les centres de décisions stratégiques ne sont pas situés dans ce pays.

On retrouve ainsi Jetair-VTB-Sunjets-VIP Selection-Seagull (TUI) et Thomas Cook-Pegase-Neckermann (Thomas Cook) qui détiennent, ensemble, près de 85 % du marché des forfaits sont allemands, le troisième, Club Med est français.

Puis dans le désordre et de manière non exhaustive : Marmara (First Choice – anglais), Christophair (Grec), BT Tours (Salaun Holidays – France), Corendon - Indigo (Pays-Bas), Donatello (France), Interhome (Suisse), Luxair (Luxembourg), RCI Benelux (USA), Lagrange (Suisse), Kuoni (Suisse), …

Un management venu d’ailleurs...


Et du côté de la distribution, cela ne vaut pas mieux puisque les grands réseaux captifs font tous parties de groupes non Belges : JetairCenter (allemand), Thomas Cook Trave Shop (allemand), Neckermann (allemand), Carlson Wagonlit et Navigant (USA), BCD (ex TQ3, Wordtravel) (Pays-Bas), American Express (USA)…

Faut-il évoquer les assureurs et compagnies d’assistance ? L’Européenne et Elvia sont suisses et Europ Assistance italienne puisque appartenant au groupe d’assurances Generali… Quant aux Amadeus, Worldspan, Galileo et Sabre, ils sont tous US…

Et ne parlons pas des groupes hôteliers, des compagnies de croisières, compagnies aériennes, etc... En conclusion, la quasi-totalité du secteur du tourisme professionnel belge est dépendant de groupes dont les sièges sociaux ou les capitaux sont situés à l’étranger.

Ce qui fait que certaines décisions qui engagent directement l’existence même des sociétés est décidée à l’étranger par des personnes qui n’ont, la plupart du temps, qu’une vue très théorique du marché local.

Il serait erroné de croire que ce phénomène ne touche que la Belgique. La France, elle aussi est concernée par la perte des encrages décisionnels de plusieurs de ses grands groupes.

Deux exemples parmi d’autres : TUI et Marmara. Chez TUI le nouveau patron pour l’Europe de l’Ouest (France, Belgique, Pays-Bas et Luxembourg) est le Belge Bart Brackx, La direction même du TO Nouvelle Frontière a été confiée à un autre Belge, Marc Vandewal.

Et ce n’est pas fini puisque Luc Coussement, également belge a hérité du poste de « New media Director » pour l’Europe de l’Ouest. Toutes ces nominations à des fonctions qui concernent particulièrement l’avenir des entreprises du groupe en France, ont toutes été prises non pas à Paris, mais à Hanovre ou à Londres.

Lorsqu’on y regarde bien, l'avenir de TUI France, de NF et de Corsair n’est plus du ressort des Français. Les vrais responsables hiérarchiques et décisionnels étant belges. Ceux-ci répondant au britannique Peter Rothwell qui est board member de TUI ag).

Ce qui fait que les décisions qui devront être prises au sujet de Corsair seront, en fait étudiées et mises en place, non pas à Paris, mais à Ostende, Londres et Hanovre…

Tourisme : mondialisation, banalisation, standardisation…
En qui concerne Marmara, le britannique My Travel a confirmé ce lundi 27 novembre vouloir racheter les voyages à forfaits de son concurrent First Choice. Ce qui pourrait concerner Marmara si ce dernier est catalogué par First Choice comme n’étant pas un spécialiste mais un généraliste.

Par contre, en ce qui concerne Marmara Portugal, les Britaniques ont décidé de procéder à une restructuration, euphémisme pour dire fermeture ou revente, assez rapide. Selon nos sources, il s’agirait plutôt d’un revente au fondateur de la société. Et pour Marmara Belgique, le groupe, étudie toujours ce qu’il va faire de ce centre de coûts.

Selon des informations non recoupées et donc sujettes à caution, First Choice serait tenté de refiler l’implantation belge à My Travel qui, naturellement, n’en voudrait pas. Décisions, qui comme on le voit, sont prises en dehors des gestionnaires locaux. Ceux-ci étant généralement les derniers avertis.

La banalisation est totale y compris pour les clients

Pour ce qui est du tourisme balnéaire, force est de constater, qu’ici également ce ne sont pas les pays récepteurs qui décident des produits qui seront proposés aux touristes. Les vrais ordonnateurs étant les grands groupes touristiques.

Ce qui fait qu’on assise à un nivellement basé sur le plus grand dénominateur commun. En toute objectivité qui peut dire ce qui différencie réellement un hôtel balnéaire situé à Djerba, Agadir, Crète ou au sud de la France ? Les équipements sont les mêmes : piscine, tennis, plage plus ou moins privative, …

Même les buffets ne sont en fait composés que de différents plats correspondants à ce que l’on dénomme pompeusement « cuisine internationale ». C'est-à-dire des plats pouvant être acceptés partout dans le monde par la majorité des clients, quels que soient leurs origines, et surtout sans la moindre originalité locale. Et si un client veut découvrir la cuisine turque, marocaine ou italienne, il n’aura qu’à aller dans le resto dédié (en payant un supplément, il va de soi).

Mieux encore, ce qui va marquer la seule différence ou le succès d’un hôtel ou d’un club de vacances auprès des clients d’un pays, ce sera si l’on y parle la langue du pays d’origine de ces clients !

Et si vous ne nous croyez pas, prenez une brochure d’un voyagiste généraliste et dites-nous, uniquement sur base des photos et des descriptifs des établissements ce qui permet de les situer dans un pays ou un autre.

Banalisation décidée non pas pour des raisons marketing mais uniquement financière. Investir dans un hôtel coûte de plus en plus cher et dès lors il faut le rentabiliser au plus vite. Ce qui fait que le marketing des établissements ne se fait plus en fonction de l’un ou l’autre marché mais pour tous les marchés simultanément.

Il en est d’ailleurs de même en ce qui concerne la politique générale des destinations. Exemple : si la Turquie a connu ses derniers temps une dégelée sur les marchés France et Belgique, par contre, elle a largement compensé cette désaffection en lançant une promotion forte vers la Russie.

Si on n’y prend pas garde, dans les années à venir les touristes en voyageant ne découvriront plus une destination originale mais un pays virtuel, avec quelques petites variantes : celui du commun dénominateur basé sur le plus grand nombre.

Quant aux employés des entreprises qui « proposent » les destinations, autant le dire de suite, ils seront de pus en plus dépendants de patrons vivant à l’étranger.

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