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Tour du monde des réceptifs : le coronavirus a mis "un bras dans le tordeur" du tourisme à Montréal

Interview de Régis Mikelbrencis, le DG de Toundra Voyages


Face à une situation de confinement (presque) généralisée au niveau mondial, la rédaction de TourMaG.com s'adapte. Tandis que les tour-opérateurs et les agences de voyages tentent de convaincre leurs clients de reporter les séjours, les réceptifs se démènent pour leur survie, loin des aides de l'Etat Français. Nous avons décidé de prendre de leurs nouvelles. Aujourd'hui, direction Montréal et le Canada francophone avec Régis Mikelbrencis, le directeur général de Toundra Voyages.


Rédigé par le Lundi 20 Avril 2020

A Montreal l'optimisme est de mise, les cas sont nombreux, mais personne ne doute que la ville sortir vainqueur de cette crise sanitaire - Crédit photo : compte Facebook Visitez Montréal
A Montreal l'optimisme est de mise, les cas sont nombreux, mais personne ne doute que la ville sortir vainqueur de cette crise sanitaire - Crédit photo : compte Facebook Visitez Montréal
TourMaG.com - Vous êtes Français et basé à Montréal, avez-vous des nouvelles de la France et en prenez-vous ?

Régis Mikelbrencis :
Le Québec est historiquement plus tourné vers la France, alors que le Canada regarde le voisin américain ou l'Asie.

Quand la France est abordée dans les journaux, c'est plus pour expliquer les manquements, comme les masques, le non-respect du confinement, les nouvelles règles prises, etc.

Les Québécois comprennent assez mal pourquoi les Français ne suivent pas les directives du gouvernement.

Au Canada ou au Québec, quand on nous demande de ne pas sortir, nous ne sortons pas.

TourMaG.com - Vous en êtes où au niveau de l'épidémie ?

Régis Mikelbrencis :
Nous ne sommes pas au même stade que vous, même si nous avons pris les mesures au même moment que la France, avec 25 cas déclarés.

Pour la première fois, nous avons eu des prévisions sur l'ampleur de la crise, leur scénario est bien pire que la réalité. Le pire des scenarii qui pourrait arriver serait de 8 000 morts, et le moins mauvais de 1 200 morts.

Nous avons un taux d'hospitalisation de 6% et encore un très grand nombre de lits en réanimation.

A la mi-mars, le confinement n'a pas été rendu obligatoire, mais recommandé. Nous pouvons sortir, nous promener, tant que nous respectons la distanciation sociale.

Après nous ne sommes pas à une contradiction près. Nous pouvons voir des amis, mais nous devons nous tenir à 2m d'eux, tout comme il nous ait possible de sortir, mais seulement pour les besoins essentiels.

Encore une fois, nous n'avons aucune interdiction, car les règles sont respectées.

Confinement : "si quelqu'un ne les (règles) respecte pas, nous n'hésitons pas à lui dire"

TourMaG.com - Ayant un confinement plus laxiste et au bon vouloir, les commerces sont-ils ouverts ?

Régis Mikelbrencis :
Tous les commerces sont fermés, dans un pays tourné vers la consommation, comme aux USA.

Cette fermeture généralisée limite donc beaucoup les mouvements. Puis nous sommes dans une ville avec énormément d'espace, les logements sont grands, donc cela rend le confinement moins pesant.

En plus, le printemps commence à pointer le bout de son nez, après un hiver plutôt intense, espérons qu'il tarde encore un peu, car le printemps est une saison très animée, la population sort énormément.

TourMaG.com - Comme aux USA les règles sont respectées par la population ?

Régis Mikelbrencis :
Oui c'est culturel, puis si quelqu'un ne les respecte pas, nous n'hésitons pas à lui dire, cela crée une dynamique.

Il y a une motivation collective de toujours aller de l'avant. Les médias n'insistent pas sur un non-respect, il n'y a aucunement besoin.

Cela explique aussi sans doute que la propagation du virus est nettement moins importante. Il faut aussi ajouter les distances très importantes entre les villes.

Le pays fonctionne comme aux USA avec un Etat fédéral, par exemple le Québec a pris des mesures très rapidement, bien avant le reste du pays.

"Nous avons mis la compagnie en mode survie...via une suspension temporaire des contrats"

TourMaG.com - A quoi ressemble la vie de tous les jours ?

Régis Mikelbrencis :
Pour re-contextualiser, la première quinzaine de mars, l'économie était très dynamique.

A Toundra, nous avions même des difficultés à recruter avec des projets à l'arrêt faute de personnel. Puis à la mi-mars, les frontières ont été fermées aux USA, le Canada a suivi.

Si au début du mois, nous avions encore des ventes sur le marché français du jour au lendemain, nous sommes passés d'une stratégie pour développer le business à une situation de crise, sans aucune rentrée d'argent.

Nous avons mis la compagnie en mode survie, en imposant le chômage pour 80% de notre équipe, via une suspension temporaire des contrats.

Ici, une personne au chômage touche 55% de son salaire. Ce sont des conditions peu confortables, mais nous n'avions pas le choix, avec 129 personnes sous contrat.

Nous réintégrerons au fur et à mesure notre personnel en fonction des ventes.

TourMaG.com - Avec l'à-valoir, vous devez procéder à de nombreux reports ?

Régis Mikelbrencis :
Pas spécialement, n'ayant pas encaissé d'acomptes des clients, à-valoir ou report, nous procédons à des annulations.

L'argent étant dans les caisses des agences de voyages, nous n'avons pas la garantie que le client repartira au Canada.

Après la situation est paradoxale car 90% des réservations de l'été 2020 n'ont pas bougé, les voyageurs n'ont ni annulé, ni remboursé.

Reporter sans frais est une bonne chose pour les professionnels français, sauf que nous traitons avec 2 500 fournisseurs qui ont tous des conditions d'annulations différentes.

La difficulté étant que nous prépayons des fournisseurs qui font parfois des reports, sauf que nous n'avons pas l'argent des clients. En tant qu'intermédiaire nous avons un rôle financier pour ménager toute la chaîne de l'industrie.

Avec cette crise, la nature de notre travail à changer, nous essayons de ménager tout le monde, pour récupérer une partie de l'argent sans fragiliser notre fournisseur.

Après le Covid : "je me pose la question du remboursement de cet endettement exceptionnel"

TourMaG.com - Le gouvernement est-il venu aider les entreprises ?

Régis Mikelbrencis :
En fait, nous avons pris la décision de suspendre les contrats de nos salariés, avant l'intervention du gouvernement.

Depuis des aides ont été débloquées avec des subventions pour couvrir les salaires à hauteur de 75%, sur quatre mois.

Après pour les salariés suspendus ou au chômage, un plan d'urgence a été mis en place avec une prime de 2 000 dollars nets à toutes les personnes en plus des allocations chômage.

Le Québec a pris ses propres mesures, même si les décisions économiques sont arrivées très tardivement.

TourMaG.com - Le Canada est un pays libéral, cette transformation de l'Etat en Etat providence, est-elle bien perçue ?

Régis Mikelbrencis :
C'est plutôt bien perçu, le Canada en soi est plutôt protecteur, avec un bon système de santé.

Tout le monde attend l'action du gouvernement, même si du point de vue québécois, nous n'aimons jamais ce que fait le Canada, mais en général, il y a une unanimité.

Après, je me pose la question du remboursement de cet endettement exceptionnel. Allons-nous connaître une envolée des taxes ?

Nous allons bien devoir rembourser ces sommes.

TourMaG.com - Comment anticipez-vous les prochains mois ?

Régis Mikelbrencis :
Nous venons de rentrer dans une autre dimension.

Nous avons eu toujours des stratégies à moyen ou long terme, sauf que maintenant, nous venons de passer à une vision à court-terme.

C'est évident que nous prévoyons une grosse chute du chiffre d'affaires, en partant du principe qu'il peut ne pas y avoir d'été 2020.

Nos efforts vont sans doute se concentrer sur l'hiver et la saison 2021. Par chance notre saison s'étale dans le temps, avec l'été indien, donc nous espérons sauver la fin de la saison.

Nous ne sommes pas trop pessimistes, car nous pensons que certains choisiront de partir même en 2020, si les conditions sanitaires le permettent.

TourMaG.com - Si je comprends bien vous vous projetez déjà sur l'année 2021 ?

Régis Mikelbrencis :
La production de notre hiver 2020-2021 est déjà bouclée, nous retardons la diffusion de nos produits auprès des agences, car ils s'occupaient des rapatriements.

Il faut savoir que les ventes de l'été ne se sont pas arrêtées avec des confirmations de dossiers pour les mois d'août, septembre et même fin-juillet.

Après nous allons préparer l'année 2021 un peu plus rapidement, pour le moment nous n'avons aucune modification de tarifs, la grille reste la même.

Nous avons connu une inflation folle des prix dans le tourisme depuis quelques années, puisque la destination séduit beaucoup, alors peut-être que la crise du coronavirus va calmer cette frénésie haussière.

Nous bénéficions d'une image très bonne à travers le monde, car nous ne sommes pas un pays belliqueux, nous n'avons pas de catastrophes naturelles, nous sommes politiquement stables.

Notre principal frein étant le coût relativement élevé des séjours.

TourMaG.com - Etes-vous inquiets de la gestion du coronavirus par les USA ? En France, nous sommes plutôt inquiets.

Régis Mikelbrencis :
Le pays est fondé sur le principe de la liberté, chaque Etat gère à sa manière la crise et le fédéral le fait aussi de son côté.

Cela peut paraître chaotique, même au niveau de l'industrie touristique, il a fallu attendre de nombreuses années pour que Brand USA se forme et crée un office de tourisme officiel.

Les Etats-Unis sont aussi victimes de leur succès, car les yeux sont toujours tournés chez eux, pour savoir comment ils gèrent.

Les Français veulent trop analyser les choses. Les USA vont gérer la crise, sans doute avec une mortalité importante, mais ils vont s'en sortir.

TourMaG.com - Si vous aviez un quartier à faire découvrir aux agences de voyages en France, quel serait-il ?

Régis Mikelbrencis :
Ce serait celui de Giffintown, sur le bord du canal Lachine, assez éloigné de la culture européenne et plus proche de celle anglo-saxonne.

Il a longtemps été en construction, dorénavant il devient un véritable quartier montréalais branché, avec beaucoup de restaurants et de bars, avec très peu de touristes.

C'était une zone industrielle abandonnée qui a été réhabilitée, avec une certaine âme.

Au niveau du pays, je conseillerais de découvrir Sandbanks, des dunes de sable fin au bord du lac Ontario.

Le paysage est assez impressionnant et atypique, tout comme au Yukon avec ses espaces gigantesques et sa nature sauvage.

Signification de "mettre un bras dans le tordeur" :

Selon le site je-parle-québecois, elle signifie : être embarqué dans une situation que l'on ne maîtrise pas et dont on ne peut plus sortir.

C'est l'équivalent d'une autre expression : mettre le doigt dans l'engrenage.

On peut se demander en premier lieu ce que signifie le mot tordeur. Au Québec, un tordeur est une machine ou un outil permettant d'essorer le linge. On comprend alors mieux le sens figurée de l'expression.

Retrouvez le "Tour du monde des réceptifs" sur la carte interactive :


Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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