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I. - Relation producteur- distributeur : l'angoisse de la grosse commission...

La chronique de François WEIL


Voici que pour la énième fois depuis plus de quarante ans, la guerre des commissions entre distributeurs et tour opérateurs est repartie. Et cette fois avec une âpreté et une mauvaise foi, de part et d'autre, encore accrues par l'angoisse d'une situation économique de plus en plus dégradée. François Weil fait le tour de la question en deux volets : le premier analyse les relations et les enjeux entre les deux parties et le second, diffusé ce vendredi, celles spécifiques des croisiéristes.


Rédigé par François Weill le Mardi 11 Décembre 2012

Relations TO-agence : bien des déclarations ne laissent guère augurer d'un climat propice à la négociation rationnelle... -DR JdL
Relations TO-agence : bien des déclarations ne laissent guère augurer d'un climat propice à la négociation rationnelle... -DR JdL
"Tout est bon lorsqu'il est excessif", assurait le Marquis de Sade : bof… à lire les déclarations enflammées de certains acteurs, et non des moindres, de la profession, on a le droit d'en douter.

Certains en remettent une couche dans la mauvaise foi, d'autres prétendent parler au nom de l'avenir de la profession tout en ne défendant que son intérêt exclusif, ou ce qu'ils croient l'être.

Il y a quarante ans, la France n'était qu'un tout petit marché : les plus gros TO étaient minuscules par rapport aux géants d'Europe du Nord.

En revanche, les agences de voyages (on ne disait pas encore "la distribution") étaient déjà beaucoup plus organisées : de gros réseaux, Havas et Wagons-Lits, commençaient déjà à pouvoir dicter leurs conditions aux TO les plus importants.

Sélectour, naissant, commençait à fédérer quelques dizaines d'agences indépendantes mais n'allait pas tarder à devenir un vrai réseau au même titre que les groupes intégrés.

Les TO, dispersés et pour la plupart artisanaux, n'étaient guère en mesure de résister aux diktats des réseaux et groupements d'agences.

Ainsi s'est développée une situation qui dure encore aujourd'hui : c'est sur ce rapport de forces brutal, sur ce terreau malsain que se joue un conflit désormais explosif.

Quand Léa écrit que "…par définition, le tour-operator est grand et l'agence de voyages est petite", c'est qu'elle met la lorgnette à l'envers : pourtant elle exprime là ce que pensent beaucoup d'agences souvent sincèrement, mais parfois entraînées par les propos démagogiques de certains de leurs dirigeants.

Une attitude paradoxale des TO

Toujours est-il que bien des déclarations ne laissent guère augurer d'un climat propice à la négociation rationnelle.

Passons sur le fait qu'il suffise qu'un TO donne son point de vue pour que la présidente du CEDIV parle aussitôt de "déclaration insupportable", c'est sans doute la loi du genre dans les moments qui précèdent la guerre, on s'invective, on s'indigne, on montre ses biceps voire plus.

Mais il faut parfois savoir mieux écouter l'autre : lorsque Richard Vainopoulos déclare faire économiser 20% aux TO (selon notre confrère L'Echo Touristique), on peut douter qu'il croie réellement à cette affirmation plus polémique qu'économique.

Mais lorsqu'il ajoute, toujours selon L'Echo Touristique : "Quand j'en vire un, il essaie de rentrer par tous les moyens", il touche là un phénomène bien réel.

Parce que tout de même, certains producteurs devraient s'interroger sur la manière dont ils mettent en pratique leurs déclarations : clamer haut et fort que les TO ont le dos au mur et qu'ils ne pourront plus continuer à payer de telles commissions... et se battre parallèlement pour avoir le droit et/ou l'honneur d'être référencé par tel ou tel réseau et de passer sous leurs fourches caudines en matière de rémunération.

C'est un paradoxe un peu ridicule.

Les TO se battent pour faire partie de l'"élite", du monde des "référencés"

Car si depuis des dizaines d'années les TO se plaignent de taux effectivement exorbitants par rapport au reste de l'Europe et du monde, depuis des dizaines d'années également ils se battent pour faire partie de l' "élite", du monde des "référencés".

Les efforts déployés dans ce sens sont très importants, et parfois vont jusqu'au grotesque.

Je me souviens de l'ancien président d'un ancien grand réseau, il y a déjà bien longtemps, dont la suffisance, la prétention et la surestime de lui-même s'ajoutaient à un côté précieux, gominé et chattemite qui auraient du rendre cette fausse star infréquentable auprès de qui que ce soit de sensé.

Eh bien pas du tout : tendant leurs fesses pour mieux se les faire botter, les producteurs n'avaient cesse de courtiser ce gandin prétentieux, pour faire partie enfin, tels des gens de cour, des heureux "référencés" et, surtout, pour le rester. Cela faisait pitié, mais c'était la règle du jeu…

Ailleurs, c'étaient les séances annuelles de "négos" devant de véritables tribunaux, dont les membres étaient à la fois procureurs et juges et où les TO convoqués n'avaient qu'à bien se tenir.

Et pourtant, tous y allaient, et bienheureux étaient ceux qui en ressortaient référencés, épongés mais agréés.

Le commerce est un rapport de force

En choisissant de maîtriser lui-même sa propre distribution, c'est à cette comédie ubuesque qu'a échappé Jean-François Rial et franchement, on comprend qu'il s'en félicite.

Tout cela est finalement de bonne guerre, le commerce est un rapport de forces, mais enfin c'est quand même la guerre, et il serait bien temps d'y mettre fin. Sinon, un élément extérieur, imprévu, finira bien par s'en charger.

En attendant, mieux vaudrait éviter certains arguments qui pourraient bien se retourner contre ceux qui les émettent : je ne sais plus qui a récemment accusé les TO d'être dépourvus de créativité et d'imagination : c'est vraiment l'hôpital qui se fout de la charité !

Bien sûr il y a quelques rares, très rares exceptions, toujours chez les indépendants, mais honnêtement, vous avez vu ce que sont les vitrines des agences de voyages ? Ca vous donnerait envie d'y entrer si vous n'étiez pas du métier ?

Pas une once d'invention, de charme, de rêve qui vous donnerait l'envie de voyager, pas un souffle de liberté, d'évasion, d'humour, pas une bribe de joie de vivre ou de gaité, même en cette période de fêtes de fin d'année : juste un alignement sinistre et consternant d'affichettes et de petits bouts de papier format A3 voire A4 voire parfois même A5 mentionnant un nom de pays pas toujours bien orthographié et un prix.

Tu parles d'une imagination et d'une créativité ! Les vitrines des agents immobiliers sont presque plus pimpantes, au moins il y a des petites photos.

Même les devantures des pompes funèbres et des marbriers qui jouxtent les cimetières sont plus gaies : au moins il y a des fleurs en plastique, ça fait de la couleur ! Et le voyage est garanti.

Le 2e volet à suivre demain : II - Vente directe vs distributeurs : les compagnies de croisières n'ont pas su choisir...

François Weill - DR
François Weill - DR
François Weill a effectué la plus grande partie de sa carrière dans le tour operating et la croisière. Une carrière qu'il a débutée, après des études de philosophie, en 1974 chez American Express puis aux Croisières Paquet, avant de faire de sa propre entreprise, Scanditours, le 1er voyagiste français spécialiste des destinations nordiques.

A la fin des années 90, il vend Scanditours à Kuoni et, après une parenthèse de quelques années comme consultant, journaliste, et enseignant à l'université de Marne-la-Vallée, il crée la filiale française de Hurtigruten dont il assure la présidence et la direction jusqu'en 2010 avec le succès que l'on sait.

En 2008, le Roi Harald V lui a décerné le titre d'Officier de l'Ordre Royal du Mérite de Norvège, pour les services rendus au développement de cette destination sur le marché français.

Président de l'AFCC durant plusieurs années, François Weill a repris ses activités de consultant.

Contact :
fw@francoisweill.fr

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Tags : weill
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Commentaires

1.Posté par Une Agent de voyages "perdue"dans un monde de brutes le 13/12/2012 07:59 | Alerter
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Vous avez raison Mr Weil sur les Vitrines des agences de Voyages elles sont pitoyables.Dans le réseau dans lequel je travaille aujourd'hui soit il n'y en a pas, soit ce sont -comme vous le dites justement-une sucesssion de format A4 insipides-bonjour le rêve.Et pour aller plus loin pas même un budget de"décoration" cela coute trop cher à leurs yeux.Et pourtant les initiales de mon réseau avaient tout pour faire rêver C.V, un indice nous sommes dans la Grande Distribution...
La seule chose qui les intéresse c'est d'être sûr que l'on respecte bien leur plan merchandising et t'as pas intérêt à oublier un format A4 ou autrement c'est la case "prison" hi hi hi!!!

2.Posté par JB le 13/12/2012 09:18 | Alerter
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Voici une analyse "centriste" qui me plait beaucoup.
Finalement qui détient la vérité ?
Peut-être que tout le monde en détient "un bout" et qu'en mettant tous ces "bouts" ensemble on arriverait à rester "debout".
Bon j'arrête avant de me faire dé"bouter"....

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