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Greenwashing : l’aérien se paie la SNCF et gagne ! Oui mais...

La SNCF épinglée par le Jury de Déontologie Publicitaire


Le Jury de Déontologie Publicitaire a rendu un avis dénonçant un affichage de la SNCF, suite à une plainte de la Fédération Nationale de l'Aviation et de ses Métiers (FNAM) pour publicité. En y regardant d’un peu plus près, pas sûre que les choses soient aussi limpides.


Rédigé par le Mercredi 14 Décembre 2022

Est-ce que voyager en TGV permet oui ou  non de dépenser 50 fois omins de CO2 qu'en voiture et 80 fois moins qu'en avion ? - photo : Jury de Déontologie Publicitaire - ARPP
Est-ce que voyager en TGV permet oui ou non de dépenser 50 fois omins de CO2 qu'en voiture et 80 fois moins qu'en avion ? - photo : Jury de Déontologie Publicitaire - ARPP
Greenwashing or not greenwashing ? Telle est la question. Le 28 septembre 2022, la Fédération Nationale de l'Aviation et de ses Métiers (FNAM), qui représente plus de 95 % de l’aérien français, portait plainte auprès du Jury de Déontologie Publicitaire (JDP) contre la SNCF.

Les avis du JDP n’ont pas un pouvoir contraignant ni une légitimité légale, mais le dépôt de plainte devant lui est de plus en plus utilisé.

Une information incongrue, qui était passée hors de nos radars, mais qui revient aujourd’hui, avec un jugement rendu en novembre et publié le 5 décembre 2022 : le jury « est d’avis que les deux publicités (incriminées, ndlr) méconnaissent les points 2 et 4 de la Recommandation Développement durable de l’ARPP (Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité) », à savoir : la véracité des actions et la clarté des messages.

Sauf que… De la même manière qu’on peut interpréter un chiffre, on peut aussi faire parler un jugement. Car c’est une victoire pour la FNAM certes, mais une victoire toute relative.

On a passé au radar la décision du Jury, et on vous explique.


La SNCF accusée de gonfler ses chiffres

Ce sont des chiffres qui n’ont pas plu à la FNAM et que la SNCF a publié d’abord dans un dossier de presse pour ensuite l’ajouter sur ses trains : « Voyager en Train à Grande Vitesse c’est 50 fois moins de CO2 émis que pour un voyage en voiture et 80 fois moins qu’en avion ».

Selon la fédération, ces chiffres ne reflèteraient pas la réalité - et ne seraient pas corroborés par le calculateur de la SNCF elle-même.

La FNAM pointe une évolution de la méthodologie de l’ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) dans ses calculs que n’aurait pas pris en compte la SNCF, qui aurait réduit le différentiel de 80 à 50.

Mais elle ne s’arrête pas là. S’appuyant sur une étude publiée pour le ministère des Transports en 2018, la fédération indique qu’en intégrant les données liées au mix énergétique français ou européen et en ajoutant le coût carbone lié à la construction des infrastructures, les chiffres passeraient de 80 à... 7 ou 8 fois plus en France - 3 avec le mix européen.

Cela reste plus, bien sûr, ce que ne conteste pas la FNAM. Mais on est très loin des 80.

Une «vérité mathématique» pour la SNCF

Un mode de calcul infondé, rétorque la SNCF, puisque « l’article D. 1431-4 du code des transports prévoit que pour le calcul des GES des prestations de transport, ne sont pas prises en compte les émissions liées à la construction et à l’entretien des moyens de transport, ni à ceux des infrastructures ». Il était donc légitime de ne pas en tenir compte.

Elle indique qu’il s’agit d’une « Comparaison des émissions de gaz à effet de serre (GES) exprimées en CO2 équivalent (CO2e) rapportées au voyageur/km pour le train TGV (consommation d’énergie de traction), avion court courrier et valeur moyenne voiture longue distance.»

Des valeurs issues de la Base Carbone Ademe, ajoute l’entreprise.

Pour la SNCF, c'est donc une « vérité mathématique », résultat d’un calcul effectué à partir des chiffres publiés par l’ADEME et inchangés à ce jour. Ces chiffres, ajoute-t-elle, ont été minorés puisqu’ils indiquent que le TGV émet 81.5 fois moins que l’avion.

Enfin, la SNCF pointe qu’elle a demandé et obtenu une validation de l’ARPP avant de lancer sa campagne.

Des chiffres exactes, mais une information partielle

Pour le JDP, la comparaison mathématique est en effet tenable, puisque basé sur des méthodologies et des calculs officiels :

« le Jury estime qu’il ne lui appartient pas de remettre en cause la pertinence du choix ainsi fait par les pouvoirs publics et qu’un annonceur peut donc s’y référer sans méconnaître les règles déontologiques ».

Pourtant, si la décision ne remet pas en cause les chiffres, elle estime que la manière de les présenter est trompeuse.

Il s’agit en réalité d’une moyenne portant sur la globalité des trajets en France (pour un trajet Toulouse - Paris, le ratio sera bien moindre, pour d’autres, il sera bien plus haut).

Cette omission pourrait porter le voyageur à croire que c’est lui qui dépense 80 fois moins en préférant le train à l’avion.

Le jury ajoute enfin que la source et la méthodologie de calcul sont indiquées en minuscule (on vous invite à essayer de lire, nous, nous n'y sommes pas arrivés) rendant l’information illisible.

C’est donc un manque de transparence sur la véracité des actions et la clarté du message : les points 2 et 4 des Recommandations de l’ARPP.

L’aérien s’offre un coup de pub

Résumons : l’avis indique que la publicité manque de clarté, mais ne conteste pas les chiffres avancés par la SNCF.

Pourtant, l’aérien s’offre un bon coup de pub avec cette décision, qui, si nous n’y prennons pas garde, pourrait nous faire croire que la SNCF a effectivement trompé le public et gonflé ses chiffres.

Dans son argumentaire, la FNAM explique qu’elle ne souhaite pas opposer les différents moyens de transport, et qu’elle ne conteste pas le fait de consommer bien plus que le rail. « Néanmoins, le consommateur devrait être informé de manière objective et précise » ajoute-t-elle.

Là-dessus, nous ne saurions être plus d’accord. Et l’inviter à condamner plus fortement les élans de greenwashing dans son propre secteur.

Pointer du doigt le manque de transparence et la maladresse du message de la SNCF est de bonne guerre ; peut-être faut-il maintenant nettoyer devant sa porte ?
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