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FUTUROSCOPIE - La mer, un territoire et un imaginaire en pĂ©ril 🔑

DĂ©cryptage de Josette Sicsic, Futuroscopie


« Homme libre, toujours tu chĂ©riras la mer ». La citation est universelle. AdulĂ©e par les Ă©crivains, les cinĂ©astes, les grands aventuriers et les vacanciers, la mer incarne malheureusement aujourd’hui l’un des patrimoines touristiques les plus en pĂ©ril. Mer (mĂšre) nourriciĂšre et source de richesses, elle est aussi en passe de devenir ce cimetiĂšre humain oĂč sombrent les damnĂ©s de la terre. Plus que d’autres encore, l’imaginaire liĂ© Ă  la mer est donc en pleine transformation et reconstruction.


Rédigé par le Jeudi 22 Décembre 2022

L’imagerie liĂ©e Ă  l’histoire de la mer : entre aventure, vacances et pollution

Formant un duo de choc avec le soleil, son principal allié, la mer est peu à peu devenue le « best of » des hits parades touristiques et de l’iconographie du tourisme de masse ou de luxe -Depositphotos.com  Auteur abwind
Formant un duo de choc avec le soleil, son principal allié, la mer est peu à peu devenue le « best of » des hits parades touristiques et de l’iconographie du tourisme de masse ou de luxe -Depositphotos.com Auteur abwind
Avant d’ĂȘtre adulĂ©e par les vacanciers, la mer a Ă©tĂ©Ì la scĂšne où se dĂ©plaçaient les navigateurs en quĂȘte d’un ailleurs souvent inconnu que l’on tentait d’explorer afin d’y dĂ©couvrir de nouvelles richesses.

Parmi les plus connues des Occidentaux et des Africains, la mer MĂ©diterranĂ©e est devenue le bassin des civilisations les plus illustres de l’humanitĂ©Ì. SillonnĂ©e par les PhĂ©niciens, les Grecs, les Romains, les Arabes puis les EuropĂ©ens, elle constituait une voie de circulation longtemps hantĂ©e par les divinitĂ©s du monde antique, par des drames, des naufrages, des catastrophes et les fantĂŽmes de citĂ©s englouties.

Encore plus rebelles, les mers du nord jouaient un rĂŽle comparable jusquâ€™Ă Ì€ ce que l’ocĂ©an longtemps inexplorĂ©Ì entraĂźne vers un nouveau monde les grands navigateurs et leur soif de conquĂȘte.

ApprivoisĂ©e à des fins utiles, y compris par les pĂȘcheurs, la mer a tardé à devenir un territoire bienveillant. Elle ne le deviendra qu’au dix-neuviĂšme siĂšcle grĂące à ses eaux froides, celles des mers du nord dont les vertus curatives Ă©taient recommandĂ©es par les mĂ©decins de l’époque.

Les premiÚres stations balnéaires naissent. Elles se nomment Brighton ou Dieppe. Puis, il faudra attendre la fin du dix-neuviÚme siÚcle et surtout le vingtiÚme-siÚcle pour que la mer et ses rivages ensoleillés deviennent le terrain de jeu favori des touristes.

Alors que la lĂ©gende raconte que l’impĂ©ratrice EugĂ©nie vint, parmi les premiĂšres, prendre un bain dans les eaux de Biarritz... ce sont les littĂ©rateurs de la « lots generation », de Scott Fitzgerald et E. Hemingway et les peintres de la mĂȘme Ă©poque qui en dĂ©couvrent les talents esthĂ©tiques, ludiques et en partie curatifs.

À la mer, se substituent alors des Ă©tendues complĂ©mentaires : le littoral et surtout la plage, donc la « côte ». Destinations à part entiĂšre, certaines cĂŽtes deviennent peu à peu de plus en plus populaires et emblĂ©matiques des transformations d’une Ă©poque en quĂȘte de libertĂ©Ì et sensualitĂ©Ì. La CĂŽte d’Azur, la CĂŽte amalfitaine puis la Costa Brava et la Costa del sol... deviennent des destinations vedettes qui se hĂ©rissent rapidement de constructions de bĂ©ton censĂ©es abriter la conception « moderne » du bonheur.

L’aprĂšs-guerre enfin, verra bel et bien se dĂ©velopper les images de paradis domestiques, propres Ă Ì€ la dĂ©tente, aux loisirs, au farniente, entiĂšrement ouverts à l’accueil de corps dĂ©nudĂ©s incitant aux plaisirs charnels et aux plaisirs sportifs. Les pratiques aristocratiques de la voile et du ski nautique se dĂ©mocratisent. Le Beach volley cĂŽtoie les clubs Mickey !

Formant un duo de choc avec le soleil, son principal allié, la mer est peu à peu devenue le « best of » des hits parades touristiques et de l’iconographie du tourisme de masse ou de luxe. Jusqu’à ces derniĂšres annĂ©es oĂč, frappĂ©es de plein fouet par les rĂ©vĂ©lations des scientifiques sur la pollution endĂ©mique qui l’accable, elle offre un flot de reprĂ©sentations nĂ©gatives, parfois dissuasives.


Retrouvez le dossier sur les Imaginaires touristiques

Symbolisme de la mer : de l’élĂ©ment premier au cimetiĂšre de la bio diversitĂ©

Sur le plan symbolique, il y beaucoup Ă  dire. La mer, associée à l’élément « eau », fait partie des grands symboles de l’humanité. C’est un symbole ambivalent, à la fois porteur de vie et de destruction. Elle reprĂ©sente à la fois la dynamique de la vie : tout sort de la mer et tout y retourne.

Elle est le lieu des naissances et des transformations. C’est un Ă©lĂ©ment Yin par excellence, rattaché à tous les mystĂšres fĂ©minins et à la maternitĂ©Ì. Les Grecs et les Romains offraient en sacrifice à la mer des chevaux et des taureaux (deux animaux symbolisant la fĂ©conditĂ©Ì).

Mais la mer est Ă©galement un Ă©lĂ©ment menaçant. C’est une eau toujours en mouvement, soumise à diffĂ©rents courants. Pour cette raison, elle symbolise l’inconscient humain et tout ce qui est enfoui dans les mĂ©andres de notre psychĂ©. Des profondeurs sous-marines peuvent surgir des monstres, des typhons et/ou des trĂ©sors ! Pour les anciens, monstres marins et tempĂȘtes n’étaient pas des mĂ©taphores mais bien de vĂ©ritables sources d’angoisse.

Les mythes autour du dĂ©luge sont lĂ©gions dans toutes les civilisations (ex. : la GenĂšse et l’épisode de l’Arche de NoĂ©Ì). D’une façon imagĂ©e, le rĂ©cit du dĂ©luge raconte comment le mal est noyĂ©Ì sous les eaux pour que l’humanitĂ©Ì puisse revivre (à mettre en relation avec l’eau baptismale). Et cette survie de l’humanitĂ©Ì passe toujours par une Arche, un bateau, qui devient alors le symbole de la demeure protĂ©gĂ©e par Dieu. Sans bateau, l’Homme ne peut pas affronter l’élĂ©ment marin.

Les nouveaux imaginaires de la mer : un territoire en péril

Bien qu’au cƓur des tropismes vacanciers, la mer demain court plusieurs risques qui portent atteinte à son image. Le premier, d’ordre Ă©cologique, d’ores et dĂ©jĂ Ì€ avĂšré, concerne la pollution que l’ùre industrielle y dĂ©verse, notamment le plastique, par le truchement des usines, bateaux, pĂȘcheurs intensifs qui, non seulement en pillent les richesses mais tuent peu à peu ses espĂšces animales et vĂ©gĂ©tales sans ĂȘtre capables de les remplacer et en font un cimetiĂšre de la biodiversitĂ©.

La mer, hĂ©las, surtout la MĂ©diterranĂ©e, risque bien aussi de devenir un repoussoir, pire, une poubelle. Envahie par des millions de touristes peu scrupuleux, baigneurs ou plaisanciers, sillonnĂ©e par des paquebots de croisiĂšres dĂ©mesures, elle est la premiĂšre grande victime d’un tourisme de masse dont les images ont été suffisamment diffusées pour ne pas être ignorées. En première ligne, l’Espagne et ses cotes, en deuxiĂšme : la France où mĂȘme les plages Atlantique commencent à suffoquer sous les flots des estivants.

De plus, comme nul ne l’ignore, son niveau monte de maniĂšre dramatique, est a dĂ©jĂ  submergĂ© quelques cĂŽtes, notamment dans les territoires insulaires condamnant Ă  moyen terme l’existence de certains Ă©tats comme les Maldives et l’avenir touristique de la CĂŽte Aquitaine.

Enfin, cimetiĂšre de malheureux « migrants » en route vers un monde meilleur, livrĂ©s aux exactions de ces nouveaux pirates que sont les « passeurs », ne risque-telle pas de perdre son statut de territoire de libertĂ©Ì ?

Quant à ses paysages, livrĂ©s aux promoteurs et aux bĂ©tonneurs qui, malgrĂ©Ì les alertes, continuent de dĂ©verser des lĂ©gions de constructions peu harmonieuses, ne sont-ils pas Ă©galement en train de ruiner le plus bel endroit de la terre ?

Sans compter une probable montĂ©e des eaux dans certaines rĂ©gions qui se dĂ©verseront sur les cĂŽtes et signeront l’arrĂȘt de mort d’un territoire idyllique et de l’une des icĂŽnes touristiques les plus porteuses des derniĂšres dĂ©cennies !

Josette Sicsic
Josette Sicsic
Journaliste, consultante, confĂ©renciĂšre, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les consĂ©quences sur le secteur du tourisme.

AprĂšs avoir dĂ©veloppĂ© pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualitĂ© oĂč elle dĂ©code le prĂ©sent pour prĂ©voir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.

Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com

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