TourMaG.com, le média spécialiste du tourisme francophone

logo Futuroscopie  




FUTUROSCOPIE - Les musiques qui font danser les touristes : tango et samba 🔑

Série Tourisme et musique : le décryptage de Josette Sicsic (Futuroscopie)


Le tourisme tire aussi sa notoriĂ©tĂ© des musiques qui font danser. Ainsi, en va-t-il de l’Argentine avec le tango et, du BrĂ©sil avec la samba, de Cuba et de sa salsa, de la JamaĂŻque et du reggae. Tandis qu’en Europe, c’est probablement le flamenco originaire d’Andalousie qui, aujourd’hui, fait danser le plus les touristes
 Tour d’horizon.


Rédigé par le Mardi 9 Août 2022

Danse de tango argentine passionnée à la Plaza Dorrego Square dans le quartier de San Telmo, l'une des principales attractions touristiques de Buenos Aires, Argentine - Depositphotos.com Auteur shinylion
Danse de tango argentine passionnée à la Plaza Dorrego Square dans le quartier de San Telmo, l'une des principales attractions touristiques de Buenos Aires, Argentine - Depositphotos.com Auteur shinylion
Le grand écrivain Jorge Borgés était formel : « le tango est le produit argentin le mieux exporté sur la surface de la terre ! ». On ne pouvait pas si bien dire !

Plus de soixante-dix ans aprĂšs cette dĂ©claration, le tango est classĂ© par l’UNESCO au patrimoine mondial de l’humanitĂ©. Une consĂ©cration d’autant plus remarquable que ce genre musical appartient Ă  la catĂ©gorie des musiques populaires, de celles qui naissent du gĂ©nie des gens ordinaires.

Musique Ă©grenĂ©e par un drĂŽle de petit instrument probablement issu du plus profond de l’Allemagne : le bandonĂ©on, le tango a surtout l’idĂ©e gĂ©niale de se doter de voix chaudes et mĂ©lodieuses qui en feront la renommĂ©e et, d’une gestuelle qui l’érige au rang de danse de salon et en assure rapidement le succĂšs.


En 1913, Ă  Paris, selon la revue La Renaissance, « les deux endroits oĂč le tango se manifeste de la façon la plus grandiose sont Luna-Park et Magic-City ».

SituĂ©s dans les beaux quartiers de la capitale, ces deux Ă©tablissements oĂč se cĂŽtoient une double clientĂšle d’Argentins et de Parisiens, sont probablement Ă  l’origine du dĂ©ferlement inouĂŻ auquel Paris assiste dans ses bals, ses fĂȘtes privĂ©es et autres cafĂ©s-concerts


Les professeurs de tango aussi font fortune, les chausseurs et les couturiers Ă©galement, tandis que les danseuses et les danseurs serrent les dents courant d’un « ApĂ©ro tango » Ă  un « ThĂ© tango » ou un « Souper tango » 

Il faut dire que la capitale française bĂ©nĂ©ficie alors en partie de la notoriĂ©tĂ© de ce Français nĂ© Ă  Toulouse et dĂ©barquĂ© Ă  Buenos Aires en 1892 : l’immense Carlos Gardel dont la mort prĂ©maturĂ©e en 1935 laissera Ă©plorĂ©e la moitiĂ© de la planĂšte.

En ces annĂ©es folles, Paris n’est pourtant pas le seul haut lieu du tango. En Espagne, Ă  Madrid et Ă  Barcelone, se confirme le triomphe du bandonĂ©on, en Italie et dans toute l’AmĂ©rique latine aussi, alors que Buenos Aires, en pleine ascension Ă©conomique n’en finit pas de peaufiner les accents de ses mĂ©lodies et les nouvelles acrobaties de ses danseurs.

Mieux ! Dans les annĂ©es qui suivront la guerre, la vogue du tango ne se calme pas. Puis, bien qu’éclipsĂ©e pendant quelques annĂ©es par le rock et le yĂ©yĂ©, la musique du Rio de la Plata ne tarde pas Ă  revenir inonder les penas et les salons de la capitale française. D’autant que, chassĂ©s par les dictatures militaires, les artistes argentins y sont particuliĂšrement bien reçus.

Ainsi, au dĂ©but des annĂ©es quatre vingt, des cabarets accueillent aussi bien les grandes voix du tango comme celles de Suzana Rinaldi que la gestuelle Ă©lĂ©gante des danseurs d’Alfredo Arias tandis que le Quartetto Cedron fait salle comble


Tout comme les concerts du grand orchestre de Mosalini
 Le groupe des Argentins de Paris, menĂ© par d’autres artistes comme Topor et surtout JĂ©rĂŽme Savary et son Grand Magic Circus, Ă©tait au fait de sa gloire !

« Un tango dans la pampa »

Ces raisons historiques suffisent-elles à expliquer l’engouement des Français pour cette musique ? En partie.

La qualitĂ© de la musique, ses capacitĂ©s de renouvellement, l’existence d’une nouvelle scĂšne capable d’intĂ©grer de nouveaux sons et instruments sont d’autres arguments en faveur du succĂšs de cette musique qui n’en reste pas moins emblĂ©matique de son pays d’origine et lui assure Ă  longueur d’annĂ©e une promotion rĂ©guliĂšre, avec des pics durant les nombreux festivals qui se dĂ©ploient Ă  travers le monde.

Bien que les voyages Ă  forfaits en Argentine restent le fait d’une minoritĂ© de touristes, ceux-ci sont largement programmĂ©s par les voyagistes.

En France, il n’est pas un tour opĂ©rateur qui n’inclut pas le mot tango dans le nom de l’un de ses circuits. « Un tango dans la pampa » compte d’ailleurs parmi les titres de circuits les plus utilisĂ©s.

Certes, la plupart de ces visites se limite à Buenos Aires et à une soirée dans une salle de La Boca ou du Barrio Norte durant laquelle on dßne et on danse au son des bandonéons.

Mais, quelques spécialistes conçoivent également des séjours sur mesure, nettement plus sophistiqués, entiÚrement consacrés à la découverte de la célÚbre danse.

Entre le cafĂ© Tortoni, le plus ancien de la capitale, et les « milongas » traditionnelles, les participants ont droit Ă  des cours d’initiation au tango, privatifs ou collectifs ainsi qu’à des spectacles inĂ©dits
.

PlutÎt coûteux, ces séjours haut de gamme ne conviennent cependant pas à toutes les bourses. Les amateurs font donc le plus souvent cavaliers seuls.

Une fois en Argentine, munis de quantitĂ© de « bonnes adresses », ils se dĂ©brouillent en fonction de leurs goĂ»ts, leurs aptitudes, leur budget, la durĂ©e de leur sĂ©jour. Car, il en est certains qui s’expatrient complĂštement durant plusieurs mois afin de perfectionner leur maĂźtrise de cette danse envoĂ»tante.

De Pékin à Tokyo : on danse aussi le tango

Alors que Paris vibre au rythme du tango depuis prĂ©s d’un siĂšcle et connaĂźt un formidable renouveau, notons que le tango compte un nombre impressionnant de radios, de revues et de sites internet, dans toutes les langues, fournissant pour la plupart une histoire de cette danse mythique, mais Ă©galement la liste des lieux oĂč l’on peut Ă©couter, danser, s’initier, se perfectionner au tango.

Au programme, non seulement la capitale argentine mais aussi une longue liste de villes du monde telles Paris, Madrid, Barcelone


Au programme encore : des classiques dont les tubes n’en finissent pas de s’écouler sur les ondes, mais Ă©galement la jeune scĂšne argentine en perpĂ©tuel mouvement qui s’exporte d’autant plus facilement que le public est au rendez-vous.

Signe de la passion que dĂ©chaĂźne cette musique, le Festival international de Tango qui se dĂ©roule Ă  Buenos Aires depuis 1999 durant l’étĂ© et totalise 500 000 participants, a accueilli 25% de visiteurs en plus, en 2013 dont 70 000 touristes.

Un exploit d’autant plus encourageant que les touristes en provenance d’Europe constituaient un tiers du public devant les AmĂ©ricains. Mieux, certains venaient de Chine oĂč depuis 2010, la premiĂšre « milonga » a ouvert Ă  PĂ©kin alors que Moscou comptait des dizaines de clubs de tango oĂč les Russes des classes moyennes et supĂ©rieures venaient dĂ©ployer leurs talents de danseurs !

Cette annĂ©e, l’édition 2022 pendant 13 jours, culminera avec le Mundial de Tango qui, depuis 2003, rĂ©unit 300 Ă  400 couples issus de 40 nationalitĂ©s et constitue le point d’orgue de cet Ă©vĂ©nement si cher au cƓur des habitants de Buenos Aires.

Brésil : Samba et carnaval

Voisin de l’Argentine, le BrĂ©sil est Ă©galement synonyme de rythmes, de sons et de voix qui n’en finissent pas de faire le tour du monde.

Preuve de la passion que cet immense pays porte Ă  sa musique, l’aĂ©roport international de Rio de Janeiro a d’ailleurs le nom de l’un de ses plus cĂ©lĂšbres musiciens : Antonio Carlos Jobim, l’incomparable co auteur avec Vinicius de Moraes, d’une chanson qui s’est exportĂ©e sur tous les continents et s’est vendue Ă  quelque 300 millions d’exemplaires : La fille d’Ipanema – alias la Garota d’Ipanema-.

Non contente d’ĂȘtre un succĂšs planĂ©taire depuis 1963, cette chanson a Ă©galement popularisĂ© une danse : la bossa nova dont la rĂ©putation a largement dĂ©passĂ© les frontiĂšres du BrĂ©sil et celles des night clubs internationaux.

ImmortalisĂ© par une statue de bronze le long de la plage d’Ipanema, le musicien vedette de la scĂšne brĂ©silienne mĂ©rite d’autant plus un hommage qu’il a Ă©tĂ© l’initiateur d’une gĂ©nĂ©ration de musiciens qui durant les annĂ©es euphoriques du gouvernement Kubitschek, alors qu’Oscar Niemeyer construisait Brasilia et envoyait au monde des signaux de modernitĂ©, ont contribuĂ© Ă  faire de la musique brĂ©silienne une composante maĂźtresse de l’identitĂ© du pays.

InspirĂ©es par les rythmes de leurs origines Ă  la fois africaines, amĂ©rindiennes et europĂ©ennes, les voix de Maria Betania, Caetano Veloso, Gilberto Gil promu symboliquement ministre de la culture dans le gouvernement de Lula
 façonnent un nouveau BrĂ©sil et en font la promotion Ă  travers une image qui ne le quittera plus jusqu’à aujourd’hui : celle d’un pays de rĂȘve totalement en phase avec les valeurs d’une Ă©poque en pleine quĂȘte de plaisir et d’émotion.

Celle d’une destination qui se hisse alors rapidement en tĂȘte de l’iconographie touristique. Dans les annĂ©es soixante-dix, le BrĂ©sil programmĂ© par les voyagistes haut de gamme, rĂ©servĂ© Ă  un petit groupe d’happy few capables de dĂ©bourser plusieurs dizaines de milliers de francs pour un sĂ©jour de deux semaines, compte parmi les voyages d’une vie.

Il est d’autant plus fantasmĂ© qu’il inclut l’un des Ă©vĂ©nements festifs les plus prestigieux de la planĂšte : le cĂ©lĂšbre carnaval de Rio ou de Salvador. Ou les deux Ă  la fois.

L’impact Ă©conomique et touristique du carnaval

Centre nĂ©vralgique du Carnaval de RIo : le Sambodrome qui accueille tous les ans quelque 90 000 spectateurs ayant dĂ©boursĂ© jusqu’ Ă  500 dollars - Depositphotos.com Auteur mmedp
Centre nĂ©vralgique du Carnaval de RIo : le Sambodrome qui accueille tous les ans quelque 90 000 spectateurs ayant dĂ©boursĂ© jusqu’ Ă  500 dollars - Depositphotos.com Auteur mmedp
Avec des images fascinantes, retransmises par toutes les télévisions du monde, le carnaval de Rio est de loin le carnaval le plus médiatisé de la planÚte.

Qui n’a jamais Ă©tĂ© confrontĂ© aux images d’une danseuse de samba au costume et au maquillage flamboyants se trĂ©moussant au rythme d’une samba inĂ©dite ?

Et qui n’a pas rĂȘvĂ© d’assister au moins une fois dans sa vie Ă  la féérie grandiose que les 12 Ă©coles de samba prĂ©parent minutieusement durant toute une annĂ©e, avant de la dĂ©verser entre les gradins du Sambodrome ?

Point nĂ©vralgique du carnaval, c’est en effet le Sambodrome qui accueille tous les ans quelque 90 000 spectateurs ayant dĂ©boursĂ© jusqu’ Ă  500 dollars pour les meilleures places. RecrutĂ©s parmi le million et demi de touristes mi Ă©trangers, mi nationaux, que Rio accueille Ă  l’occasion du Carnaval, ces spectateurs viennent de prĂ©s ou de plus loin, notamment des USA et d’Europe.

Avec une rĂ©putation internationale bien assise, cette manne touristique rĂ©currente fait de la deuxiĂšme capitale brĂ©silienne, l’une des villes les plus touristiques du monde. En temps normal s’entend. Ainsi, selon le ministĂšre du tourisme brĂ©silien, environ 1,2 milliard de reals sont dĂ©pensĂ©s par les touristes durant cette pĂ©riode.

Tandis que, le carnaval de Salvador avec prĂšs de 800 000 touristes injecte dans les caisses de la ville quelque 650 millions de reals et celui de San Paolo prĂ©s d’un milliard !

Au total, sur tout le pays, le ministÚre évalue à 6 milliards de reals, les dépenses des 7 millions de touristes qui se sont déplacés à travers le pays, durant les quelques jours du carnaval.

Une excellente opĂ©ration donc pour le pays qui ne rate jamais une occasion de relancer cette formidable machine publicitaire, y compris cette annĂ©e alors que le Covid Ă©tait loin d’avoir dit son dernier mot.

HĂ©las, si BrĂ©sil et samba riment dans les imaginaires d’une grande partie de l’humanitĂ©, la musique ne coule pas vraiment Ă  flots dans les rues des villes et plages brĂ©siliennes. Plus rĂ©servĂ©e qu’à Cuba ou en JamaĂŻque, la bonne musique dans le BrĂ©sil d’aujourd’hui est souvent discrĂšte, cachĂ©e dans des petits lieux connus de la population locale seule qui en fait certes une grande consommation, mais ne semble pas vouloir la partager.

La déception du touriste venu rencontrer la samba est donc parfois grande car les authentiques musiciens brésiliens, ceux qui inventent sans cesse une nouvelle scÚne, ne grattent pas leurs guitares le long des rivages de Copacabana ou Ipanema.

Restent quelques lieux trĂšs touristiques qui, comme ailleurs, jouent sur une lĂ©gende plus que sur une rĂ©alitĂ©. Un peu, comme les brochures des voyagistes et quelques guides touristiques soucieux de ne pas bousculer les rĂȘves de leur public.

Pour en lire davantage...

Vous pourrez en lire plus sur l’ouvrage "En avant la musique". Josette Sicsic. Editions L’Harmattan.

Et pour retrouver tous les articles de la Série Tourisme et Musique : cliquez ici !

Josette Sicsic - DR
Josette Sicsic - DR
Journaliste, consultante, confĂ©renciĂšre, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les consĂ©quences sur le secteur du tourisme.

AprĂšs avoir dĂ©veloppĂ© pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualitĂ© oĂč elle dĂ©code le prĂ©sent pour prĂ©voir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.

Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com


Lu 2954 fois

Notez

Nouveau commentaire :

Tous les commentaires discourtois, injurieux ou diffamatoires seront aussitÎt supprimés par le modérateur.
Signaler un abus

Dans la mĂȘme rubrique :
< >

Jeudi 24 Juillet 2025 - 07:42 Les vacances des Européens en danger ? [ABO]














































TourMaG.com
  • Instagram
  • Twitter
  • Facebook
  • YouTube
  • LinkedIn
  • GooglePlay
  • appstore
  • Google News
  • Bing Actus
  • Actus sur WhatsApp
 
Site certifié ACPM, le tiers de confiance - la valeur des médias