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Laurent Abitbol : 2026 sera "moins bonne, je freine" les investissements

Au congrès Selectour, le voyage d'affaires plonge dans la crise


Le secteur du tourisme va réaliser une année 2025 placée sous le signe de l'attentisme, mais qui devrait être dans les proportions du précédent exercice. Par contre, il est un pan de l'industrie en grande souffrance. Depuis la rentrée automnale, le voyage d'affaires est en difficulté, l'activité chute de 7 à 10%. Les entreprises gèlent les déplacements et modifient drastiquement leurs politiques voyages, mais pourquoi cette chute soudaine ? Et que réserve 2026, dans le secteur du loisir ?


Rédigé par le Lundi 1 Décembre 2025

"Pour la première fois, je pense que les patrons vont se rebiffer" a expliqué Laurent Abitbol - DR
"Pour la première fois, je pense que les patrons vont se rebiffer" a expliqué Laurent Abitbol - DR
Depuis le début de l’année, les discours sont plus mesurés, les joies moins extravagantes.

L’euphorie de 2024 semble s’être éloignée de l’industrie, pour laisser place à une activité atone.

Si Selectour affiche un petit 2% de croissance pour son exercice 2025, rares sont les acteurs à connaître une vitalité supérieure. Les Français ont resserré les cordons de la bourse, les chèques en blanc pour partir en vacances se sont taris.

Il n’est pas question pour autant de s’inquiéter, du moins pour l’instant, puisque la distribution connaîtra un exercice dans les plus hauts standards de son histoire, même si l’année 2026 pourrait annoncer un changement dans la dynamique des courbes.

Il est un pan de l’industrie qui n’est plus seulement dans l’incertitude, mais qui plonge dans la crise.

"Depuis octobre, et cela se poursuit en novembre, le business travel baisse de 7 à 8%. Les entreprises voyagent moins.

L’inquiétude n’est pas sur le tourisme, les carnets de commandes sont bons pour 2026, c’est un peu en hausse, mais elle plane plutôt sur le business travel,"
a expliqué sur scène, lors du 50e congrès Selectour, Laurent Abitbol.

Et cette mauvaise dynamique se retrouve chez d'autres acteurs du secteur.

Voyages d’affaires : "Les réservations se sont écroulées et novembre suit la tendance"

Maxime Pialat (Supertripper), Alain Hebras (Wagram Voyages), Solenn Le Brazidec (Plus Voyages) - Photo CE
Maxime Pialat (Supertripper), Alain Hebras (Wagram Voyages), Solenn Le Brazidec (Plus Voyages) - Photo CE
Un dirigeant d’un grand groupe, croisé lors du congrès en Afrique du Sud, s’interrogeait lui aussi sur les difficultés rencontrées par son plateau affaires depuis quelques semaines, alors même que l’activité loisir se maintient dans de bons volumes.

Le son de cloche est similaire pour Solenn Le Brazidec.

"Le début de l’année 2025 a été plutôt bon, puis cela est devenu plus compliqué. Nous sommes sur une baisse de 10% depuis octobre, alors même que c’est un mois important en termes de commandes.

Les réservations se sont écroulées
et novembre suit la tendance,
" déplore la directrice générale de Plus Voyages.

Ce ressenti d’un tassement de l’activité se propage chez ses concurrents, puisque Wagram Voyages connaît lui aussi ce ralentissement.

A lire : Pilotage des ventes Selectour : "nous allons mettre en place une tolérance zéro"

L’agence, qui réalise 45 millions d’euros de volume d’affaires pour 65 collaborateurs, s’inquiète également des difficultés qui pointent chez les ONG, l’une des particularités de son activité.

"Nous connaissons cet essoufflement, ce travel freeze.

Dans le même temps, les marchés publics n’ont pas forcément leur budget, donc c’est compliqué.


Du côté des ONG, les effectifs sont supprimés, les budgets baissent et pourtant le malheur dans le monde ne faiblit pas,
" déplore Alain Hebras, qui a rejoint l’équipe en juillet dernier.

La situation ne serait guère meilleure pour les PME, même si cela dépend beaucoup des secteurs d’activité.

"Je pense que 2026 va être moins bonne, je freine"

Le nouveau venu dans le groupe Marietton dépeint un panorama plus nuancé et moins anxiogène.

"On est dans un marché qui est vraiment très hétéroclite, après nous constatons que les PME industrielles sont en difficultés ou du moins elles serrent la vis.

Ça se traduit notamment au niveau des politiques de voyage, de la baisse des déplacements.

Toute une partie du marché se porte très bien, notamment poussée par les nouvelles technologies, par l'IA, l'armement également et tous les secteurs connexes.

Le dernier Global Travel Report rapportait que le tourisme allait croitre plus vite que l'économie mondiale sur les 10 prochaines années,
" tente de remettre un peu de positif, Maxime Pialat le PDG de Supertripper.

D'après le dernier rapport du World Travel Market, le taux de croissance de l'industrie devrait être de 3,5% par an, contre 2,5% pour l'économie mondiale.

D’ici 2035, le secteur du voyage devrait générer plus de 16 000 milliards de dollars de revenus, soit près de 12 % du PIB planétaire.

Alors ces chiffres ne concernent pas que le business travel, mais démontrent que la sinistrose ne doit pas prendre le pas, sur la réalité d'une industrie en pleine croissance dans les 4 coins de la planète, au détriment, il est vrai de la durabilité de celle-ci.

Toutefois, la tendance dans le business serait plutôt globalement à une baisse des dépenses généralisées et la raison n'est pas à chercher bien loin. Si depuis octobre, les entreprises freinent, ce serait tout simplement dû à l'incertitude politique qui sévit en France.

"Ce n'est pas que nous avons moins de clients, c'est que les gens consomment moins.

Les politiques de déplacement des entreprises changent, les budgets pour les hôtels baissent, ils nous disent que c'est pour un temps limité, mais nous savons très bien que quand c'est limité, cela devient permanent.

En temps de crise, les Français épargnent, tout est lié à l'incertitude politique du pays. Je freine ma politique de développement. Je finalise des acquisitions, dont les discussions étaient bien engagées, après pour le plus gros rachat, je temporise.

Je n'ai pas peur pour 2026, mais je pense que ça va être moins bon,
" se désespère Laurent Abitbol.

"Le climat général, je le qualifierais d'optimisme prudent"

Valérie Boned (EDV), Mumtaz Teker (APST) et Patrice Caradec (SETO) - Photo CE
Valérie Boned (EDV), Mumtaz Teker (APST) et Patrice Caradec (SETO) - Photo CE
Pour Valérie Boned, qui sort d’un tunnel de plusieurs semaines enchaînant les différents évènements du secteur, de Manor à Selectour…

"J'ai rencontré 500 entreprises du secteur en deux mois.

Et le climat, je le qualifierais d'optimisme prudent. Je n'entends personne me dire que la situation est catastrophique, en revanche, en comparant à 2023 ou 2024, des années excellentes, ils ne sont pas défaitistes.

Globalement, les clients sont attentistes,
" nous a confié la présidente des Entreprises du Voyage.

Une analyse qui rejoint aussi celle du SETO.

A lire : Selectour veut faire "partie du GIE mondial" piloté par Certares !

Le patron du syndicat, Patrice Caradec dit être agréablement surpris en regardant les réservations en stock chez ses adhérents pour l'hiver qui arrive. D’ores et déjà, les acteurs ont engrangé, fin octobre, 60 % du volume espéré pour la prochaine saison.

La progression serait de 7 % sur le nombre de passagers et de 9 % sur le volume d’affaires, par rapport à 2024.

Une vision empreinte d’optimisme… qui pourrait malgré tout évoluer en fonction de l’avenir que réservent les parlementaires et le gouvernement au Projet de Loi de Finances 2026.

Lors du congrès, Gabriel Attal a pris la parole pour rappeler les différentes options disponibles afin de permettre à Sébastien Lecornu de faire passer un budget avant Noël, et donc limiter la casse.

"Pour la première fois, je pense que les patrons vont se rebiffer"

Gabriel Attal : "J'ai du mal à voir comment, en l’état, un budget peut être voté" - Photo CE
Gabriel Attal : "J'ai du mal à voir comment, en l’état, un budget peut être voté" - Photo CE
"On ne va pas sortir de la crise en rajoutant de la crise.

La première des priorités est l’adoption d’un budget avant la fin de l’année, et le moins mauvais. Si ce n’est pas le cas, alors une loi spéciale budgétaire passera et maintiendra le même niveau de fiscalité.

Les Espagnols connaissent ça depuis deux ans, car le Premier ministre n’a pas de majorité au parlement.

J'ai du mal à voir comment, en l’état, un budget peut être voté. Il y a l’option du 49.3, mais le Premier ministre s’est engagé à ne pas y recourir. Il reste alors la loi spéciale, ce serait moins dramatique que de ne pas avoir de budget,
" a détaillé l’ancien premier ministre lors du 50e congrès Selectour.

Cette dernière option reste celle qui lui paraît la plus probable, même si elle ne résoudra pas vraiment les problèmes du pays… et encore moins l’angoisse des chefs d’entreprise.

La réalisation la moins pire, mais loin de rassurer Valérie Boned quant à l'avenir du climat des affaires.

Un budget par défaut qui ferait les affaires de tous, des élus politiques aux dirigeants de l’industrie, à court terme, mais qui laisse songeur Laurent Abitbol, lassé par des politiques incapables de prendre leurs responsabilités.

"Ils se battent tous pour leurs places, c’est mauvais pour nous.

Ils doivent comprendre que nous ne sommes pas dans un jeu, nous bossons. Il est tellement possible de faire bien… peut-être qu’un jour je serai ministre de l’Économie. Qui sait...

Pour la première fois, je pense que les patrons vont se rebiffer, nous ne pouvons pas rester comme cela. Les gens aisés quittent la France, ils sont démotivés,
" conclut un président du directoire de Selectour qui affiche de plus en plus ses velléités politiques.

Après le "en même temps", ni de gauche ni de droite d’Emmanuel Macron, est-ce que la France se prépare à vivre son moment "Elon Musk", un entrepreneur à succès qui rêvait de tronçonner l’administration ?

L’avenir nous le dira. Il reste encore un an et demi avant le 1er tour de la présidentielle.


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