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Ryanair bénéficie "d'une complaisance de l'Etat" sur le non-respect des lois

Interview de Stéphane Salmon du SNPNC-FO en charge de Ryanair


Pour une fois, la direction de Ryanair et le syndicat SNPNC-FO étaient d'accord pour saluer le nouvel accord obtenu, ce jeudi 13 octobre 2022. Si la première glorifie les avancées, le 2e restait plus plus mesuré car la compagnie ne fera juste que respecter la loi française (sic). Entre les heures supplémentaires, le respect du bon paiement des congés payés et le calcul exact du SMIC, les salariés vont enfin constater une hausse en bas de leur fiche de paie. Pour Stéphane Salmon, secrétaire général adjoint du SNPNC en charge de Ryanair, c'est une victoire à minima contre un système d'Etat.


Rédigé par le Vendredi 14 Octobre 2022

"Des rendez-vous au ministère des Transports, avec la DGAC également, quand nous contactons les inspections du travail, aussi bien à Marseille, Beauvais ou Toulouse, elles ne viennent pas faire de contrôle chez Ryanair" selon Stéphane Salmon du SNPNC-FO en charge de Ryanair - Depositphotos @pio3
"Des rendez-vous au ministère des Transports, avec la DGAC également, quand nous contactons les inspections du travail, aussi bien à Marseille, Beauvais ou Toulouse, elles ne viennent pas faire de contrôle chez Ryanair" selon Stéphane Salmon du SNPNC-FO en charge de Ryanair - Depositphotos @pio3
TourMaG.com - Le SNPNC-FO annonce avoir remporté une bataille majeure contre la direction de Ryanair. Quelle était-elle ?

Stéphane Salmon :
Les grèves ont beaucoup impacté la compagnie cet été.

Suite à tout cela, nous avons insisté pour que la Direction ouvre des négociations. Elle ne voulait revenir sur rien du tout et nous n'avions aucune avancée.

Nous avons dû batailler point par point pour obtenir des augmentations salariales, peu importantes, mais surtout nous avons obtenu l'application de la loi.

Ryanair va devoir respecter le paiement des heures supplémentaires et des congés payés. Si la Direction applique bien ce qui a été négocié, alors l'augmentation salariale obtenue sera juste légale.

En résumé, les salariés gagneront mieux leur vie, juste parce que la compagnie appliquera la loi française, rien de plus. Elle ne fait aucun effort supplémentaire en dehors de celui d'être dans les clous.

"Les services de l'Etat font respecter le cadre légal partout, sauf chez Ryanair"

TourMaG.com - Quels étaient les points concernant le non-respect de la loi par Ryanair ?

Stéphane Salmon :
La compagnie payait les congés n'importe comment.

Il était écrit sur le contrat de travail des salariés que toutes les heures supplémentaires effectuées ne seraient pas payées.

TourMaG.com - C'est donc une victoire a minima...

Stéphane Salmon :
Bien sûr, ce n'est pas la panacée.

Nous avons encore beaucoup de combats à mener dans cette Compagnie, sur tout ce qui concerne les délais de prévenance. La loi explique qu'il faut un délai raisonnable, d'au moins 48 heures, pour prévenir les personnes d'un changement de planning, or Ryanair ne l'applique pas du tout.

Une hôtesse ou un steward ne peuvent organiser leur vie privée, en raison des changements incessants de planning, au cours même de la journée de travail.

TourMaG.com - Dans votre communiqué, vous expliquez que l’ensemble des salariés des compagnies aériennes ayant un contrat de travail de droit français est protégé par les autorités, il n’en est rien chez Ryanair. Pourquoi ?

Stéphane Salmon :
Chaque salarié de Ryanair a bien des contrats de droit français, mais à la différence des autres compagnies basées en France, que ce soit le ministère des Transports, l'inspection du travail ou la DGAC, personne ne fait respecter la loi.

En quelque sorte, ces gendarmes de la loi font respecter le cadre légal partout, sauf chez Ryanair. Nous sommes un peu aidés par l'inspection du travail de Bordeaux, sinon ailleurs ce n'est pas du tout le cas.

Imaginez un peu la situation ubuesque dans laquelle nous nous trouvons : nous avons été obligés de trouver un accord, entre les syndicats et la direction, pour que la Compagnie applique la loi.

Ryanair : "L'application de la loi devrait faire augmenter les salaires de 200 à 300 euros"

TourMaG.com - La direction de la low cost, vient de publier un communiqué de presse, dans lequel elle dit se féliciter des résultats du vote sur les salaires et les nouvelles conditions de travail. De plus, il est écrit que Ryanair donne la priorité aux améliorations salariales post-covid. Que vous inspirent ces lignes ?

Stéphane Salmon :
Tout d'abord, la direction se targue des résultats d'un vote du personnel de cabine, mais c'est un sondage interne que nous avons organisé au sein du SNPNC-FO.

Ce sont juste nos adhérents qui ont voté et non l'ensemble des PNC. D'autre part, nous n'avons jamais communiqué ce chiffre (75% en faveur de l'accord trouvé entre le syndicat et les responsables de la compagnie, ndlr) à la direction de Ryanair.

C'est vraiment étrange, je me demande comment ils ont obtenu ces chiffres.

TourMaG.com - Le management se glorifie de résultats, alors même que le sondage n'est pas de son initiative ?

Stéphane Salmon :
La Direction n'est pas censée être au courant de ces chiffres.

Pour nous la signature d'un accord se fait entre la direction et le délégué syndical, pour le valider. Dans nos statuts il est écrit que nous demandons l'avis à nos adhérents. Nous l'avons fait, d'où cette statistique, mais jamais nous informons les responsables sur un quelconque résultat.

C'est tout simplement un effet d'annonce, une bonne communication, pour montrer que Ryanair est vertueuse. De plus, ils pourront utiliser cela pour communiquer avec d'autres bases à l'étranger.

Ce sera un outil marketing.

TourMaG.com - Arrivez-vous à jauger la hausse des salaires ?

Stéphane Salmon :
Elle est minime.

Après si la low cost applique le juste paiement des heures supplémentaires et des congés payés, alors l'augmentation de salaire sera de 200 à 300 euros. Nous parlons là, je le répète, de la juste application de la loi.

"Les conditions de travail ne peuvent pas être plus dures qu'actuellement"

TourMaG.com - Le calcul du SMIC a aussi évolué. Quels sont les changements ?

Stéphane Salmon :
Avant l'accord, quand les PNC devaient passer des visites médicales pour conserver leur licence de vol, ça passait dans le calcul du SMIC.

Ils faisaient rentrer le prix de l'uniforme et plein de choses qui normalement ne rentrent pas dans les éléments servant à établir le montant du SMIC au sein d'une entreprise.

Les remboursements de frais professionnels ne doivent pas être comptabilisés, or jusqu'ici c'était le cas. Ainsi, les salariés sont payés en dessous du SMIC.

TourMaG.com - Avec cet accord, craignez-vous des contreparties ? Que la direction durcisse les conditions de travail, par exemple.

Stéphane Salmon :
Les conditions ne peuvent pas être plus dures que ce qu'elles sont actuellement.

Je ne pense que la Direction ira plus loin, puisque nous n'avons rien demandé d'autre que la stricte application de la loi. Après ce qu'il risque de se passer, c'est que Ryanair n'appliquera pas l'accord.

La Direction dit qu'elle a déjà signé des accords avec les pilotes, mais le paiement des heures supplémentaires a continué à être mal fait, bien après la signature. Nous serons vigilants sur la bonne application des accords.

TourMaG.com - La situation sociale est un peu plus apaisée ?

Stéphane Salmon :
Cet accord résout une partie des problèmes au sein de la compagnie, mais pas tout...

Après, il y a toujours une pression de l'encadrement du management sur les PNC. Les hôtesses et les stewards malades reçoivent des messages les accusant de désorganiser la compagnie, de pénaliser les équipages et les passagers.

Il n'y a aussi aucun secret médical, entre l'employeur et le salarié, c'est écrit aussi dans le contrat de travail

Le management est très rude, c'est le système Ryanair.

Ryanair : "il y a une complaisance de l'Etat"

TourMaG.com - Comment expliquez-vous cette absence de contrôle des autorités sur les pratiques illégales de Ryanair ? Vous pensez que comme Uber, le gouvernement en profite pour assouplir les acquis sociaux dans l'aérien.

Stéphane Salmon :
C'est exactement comme Uber, l'Etat laisse agir Ryanair en toute impunité.

C'est une Compagnie permettant à des personnes ne gagnant pas beaucoup d'argent de partir en vacances, à des aéroports de province d'assurer une activité.

Malgré des rendez-vous au ministère des Transports, avec la DGAC également, quand nous contactons les inspections du travail, aussi bien à Marseille, Beauvais ou Toulouse, elles ne viennent pas faire de contrôle chez Ryanair.

Nous parlons d'une des plus grosses compagnies du monde. Tout le monde est au courant des conditions sociales dans cette entreprise mais les inspecteurs du travail, quand ils sont en charge de Ryanair, ne font jamais aucun contrôle, si ce n'est ceux de Bordeaux.

Nous les relançons régulièrement, partout où il y a des bases de Ryanair, mais rien ne bouge.

C'est hallucinant, il y a une complaisance de l'Etat. Nous observons aussi la même chose pour Volotea, avec une application très compliquée du droit du travail.

TourMaG.com - Est-ce la fin de la lutte pour votre syndicat ?

Stéphane Salmon :
Non, bien évidemment, nous avons encore des dossiers aux Prud'hommes.

Quand Rayanir est arrivée, les salariés étaient payés à un salaire très inférieur par rapport au SMIC, entre 600 et 800 euros par mois. Puis nous avons des dossiers pour les congés payés non versés, les heures supplémentaires ou encore les heures de délégations non payées.

De plus, la loi fixe un pourcentage sur le chiffre d'affaires, en fonction de la taille de l'entreprise pour le budget de fonctionnement du CSE. Or, la direction souhaite le négocier, donc Ryanair n'a toujours pas de budget de fonctionnement du CSE.

Voici toutes nos procédures judiciaires. C'est un combat permanent, chaque jour il se passe quelque chose...


Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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Commentaires

1.Posté par SERGE13 le 14/10/2022 04:27 | Alerter
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ce n'est pas à l'Etat d'agir. Si le personnel ne saisit pas la justice, rien ne se passera. Ces syndicalistes valent de l'or

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