Les plages de Tunisie sont marquées par un tourisme essentiellement de masse - Photo CreativeCommons-Marc Ryckaert_Hammamet-Sud
En France et un peu partout en Europe, la Tunisie est l’un des marqueurs numéro 1 du secteur du tourisme.
Et pour cause, depuis maintenant une quarantaine d’années, le tourisme fait vivre environ 15% de la population soit un demi-million de personnes.
A Djerba, l’été, la population double. Pour 2019, les autorités attendent 9 millions de visiteurs environ, dont 1 million de Français : si les Algériens ou les Russes sont désormais bien présents sur la destination, le premier marché reste la France, qui envoie des touristes en masse chaque année.
Et pour cause, depuis maintenant une quarantaine d’années, le tourisme fait vivre environ 15% de la population soit un demi-million de personnes.
A Djerba, l’été, la population double. Pour 2019, les autorités attendent 9 millions de visiteurs environ, dont 1 million de Français : si les Algériens ou les Russes sont désormais bien présents sur la destination, le premier marché reste la France, qui envoie des touristes en masse chaque année.
Un modèle touristique dépassé
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Une manne pour l’économie locale ? Oui… Et non. Car le tourisme pratiqué en Tunisie est un tourisme de masse, et que ce modèle économique est désormais dépassé.
Bien qu’il fasse vivre une part considérable de la population, le tourisme en Tunisie est basé sur des vacances à bas prix et all inclusive, et profite peu aux populations locales. Ainsi, l’Institut National de Statistique tunisien note qu’un touriste en Tunisie dépense moins de 200€ lors de son voyage en Tunisie. Trois fois moins que la moyenne mondiale.
Outre l’aspect social, le tourisme tel qu’il est pratiqué en Tunisie incite à une consommation « jetable » et low-cost tant côté voyageur que voyagiste : difficile de faire dans le bio ou le local lorsqu’on a une masse de personnes à nourrir, venues de cultures différentes et s’attendant à une gastronomie normée.
L’impact des touristes sur la vie quotidienne des habitants n’est pas sans créer des frictions. En 2014, la population Djerbienne proteste contre les décharges sauvages générées par le nombre de touristes présents sur l’île l’été. Les complexes hôteliers ont au début essayé de mettre en place des solutions, mais rapidement le soufflé est retombé et sans suivi local, les acteurs du tourisme sont passés à autre chose.
Jusqu’à quand la Tunisie et les professionnels français installés sur le territoire pourront-ils continuer sur cette voie ?
Bien qu’il fasse vivre une part considérable de la population, le tourisme en Tunisie est basé sur des vacances à bas prix et all inclusive, et profite peu aux populations locales. Ainsi, l’Institut National de Statistique tunisien note qu’un touriste en Tunisie dépense moins de 200€ lors de son voyage en Tunisie. Trois fois moins que la moyenne mondiale.
Outre l’aspect social, le tourisme tel qu’il est pratiqué en Tunisie incite à une consommation « jetable » et low-cost tant côté voyageur que voyagiste : difficile de faire dans le bio ou le local lorsqu’on a une masse de personnes à nourrir, venues de cultures différentes et s’attendant à une gastronomie normée.
L’impact des touristes sur la vie quotidienne des habitants n’est pas sans créer des frictions. En 2014, la population Djerbienne proteste contre les décharges sauvages générées par le nombre de touristes présents sur l’île l’été. Les complexes hôteliers ont au début essayé de mettre en place des solutions, mais rapidement le soufflé est retombé et sans suivi local, les acteurs du tourisme sont passés à autre chose.
Jusqu’à quand la Tunisie et les professionnels français installés sur le territoire pourront-ils continuer sur cette voie ?
Un pays durement impacté par la sécheresse
D’autant que si le tourisme de masse a un impact non négligeable, il ne fait que renforcer un état des lieux environnemental déjà bien inquiétant pour la Tunisie.
Début décembre, les journalistes Franck Ballanger et Christian Chesnot se penchait sur la question, en interviewant pour France Inter Samia Mouheli, enseignante à l’Institut supérieur des sciences biologiques appliquées de Tunis (ISSBAT), et son constat est accablant.
Début décembre, les journalistes Franck Ballanger et Christian Chesnot se penchait sur la question, en interviewant pour France Inter Samia Mouheli, enseignante à l’Institut supérieur des sciences biologiques appliquées de Tunis (ISSBAT), et son constat est accablant.
Selon l’ONU, indique-t-elle, le pays serait entré dans une zone de « stress hydrique », que l’organisation internationale définit comme « une situation dans laquelle la demande en eau dépasse les ressources disponibles », avec moins de 400m3 d’eau par an et par habitant.
En cause, la crise climatique, qui provoque l’avancée du désert, l’agriculture intensive qui appauvrit les sols, l’industrie textile, fortement présente en Tunisie et qui a besoin de larges ressources en eau… Mais aussi la contamination des sols et des réserves naturelles via la pollution agricole, minière (avec la production de phosphate) et industrielle. Et les stations d’épuration fonctionnant mal ou pas, les eaux usées sont déversées en milieu naturel.
En cause, la crise climatique, qui provoque l’avancée du désert, l’agriculture intensive qui appauvrit les sols, l’industrie textile, fortement présente en Tunisie et qui a besoin de larges ressources en eau… Mais aussi la contamination des sols et des réserves naturelles via la pollution agricole, minière (avec la production de phosphate) et industrielle. Et les stations d’épuration fonctionnant mal ou pas, les eaux usées sont déversées en milieu naturel.
Une situation dramatique qui engendre des déplacements de populations et crises politiques que le pays n’est pas le seul à vivre et que les professionnels du tourisme feraient bien de prendre en considération en étudiant la carte ci-dessous.
Quelles solutions pour le tourisme ?
L’équation est simple : s’il n’y a pas assez d’eau pour la population, il n’y en a pas assez pour les touristes.
À cela s’ajoute l’érosion des littoraux, où sont installés les grands complexes hôteliers. Le constat est sans appel et selon Samia Mouheli, ce sont 300 000 lits qui devraient disparaître d’ici 2030. Et 2030, c’est demain.
Alors que faire ? Développer les nuits chez l’habitant est complexe dans un pays où les problématiques quotidiennes auxquelles lesdits habitants ont à faire face sont si prégnantes.
Mais d’autres projets se développent, en descendant vers le sud cette fois. L’idée est simplement de déplacer le tourisme, pour désengorger les côtes et pour promouvoir un tourisme plus patrimonial et ancré localement. Bref : changer de paradigme et passer du sur-tourisme à un modèle plus « slow ».
À cela s’ajoute l’érosion des littoraux, où sont installés les grands complexes hôteliers. Le constat est sans appel et selon Samia Mouheli, ce sont 300 000 lits qui devraient disparaître d’ici 2030. Et 2030, c’est demain.
Alors que faire ? Développer les nuits chez l’habitant est complexe dans un pays où les problématiques quotidiennes auxquelles lesdits habitants ont à faire face sont si prégnantes.
Mais d’autres projets se développent, en descendant vers le sud cette fois. L’idée est simplement de déplacer le tourisme, pour désengorger les côtes et pour promouvoir un tourisme plus patrimonial et ancré localement. Bref : changer de paradigme et passer du sur-tourisme à un modèle plus « slow ».
L’an dernier, le ministère des Affaires locales et de l’environnement Tunisien a lancé un Projet de promotion du tourisme écologique et de la sauvegarde de la diversité biologique dans le Sahara, financé par un don du Fonds Mondial de l’Environnement et la Banque Mondiale.
Le but : faire en sorte que les populations locales se réapproprient leur territoire, créer les bonnes conditions pour améliorer leurs conditions de vies et amener les touristes à découvrir l’autre visage de la Tunisie en développant le tourisme durable dans ces zones.
Le développement économique plus responsable créé de fait un tourisme plus durable, qui profite plus aux populations locales et permet au visiteur de vivre une vraie expérience unique.
Autre initiative, plus près des côtes cette fois. Au large de Monastir, l’île de Kuriat voit débarquer chaque année un grand nombre de tortues, qui profitent de l’absence de pollution sonore et visuelle pour pondre sur les plages. Des œufs qui éclosent entre juillet et octobre. Pour préserver à la fois ce patrimoine environnemental et l’accueil des touristes, l’île a imaginé pour eux une expérience unique : des ateliers de formation avec des associations pour reconnaître les espèces locales et leur écosystème puis aider – sans les toucher – les bébés tortues à regagner la mer.
Comme quoi, il suffit de peu pour provoquer un triple effet kiss cool : environnement protégé, touristes comblés par un séjour original, professionnels du tourisme heureux. What else ?
Le but : faire en sorte que les populations locales se réapproprient leur territoire, créer les bonnes conditions pour améliorer leurs conditions de vies et amener les touristes à découvrir l’autre visage de la Tunisie en développant le tourisme durable dans ces zones.
Le développement économique plus responsable créé de fait un tourisme plus durable, qui profite plus aux populations locales et permet au visiteur de vivre une vraie expérience unique.
Autre initiative, plus près des côtes cette fois. Au large de Monastir, l’île de Kuriat voit débarquer chaque année un grand nombre de tortues, qui profitent de l’absence de pollution sonore et visuelle pour pondre sur les plages. Des œufs qui éclosent entre juillet et octobre. Pour préserver à la fois ce patrimoine environnemental et l’accueil des touristes, l’île a imaginé pour eux une expérience unique : des ateliers de formation avec des associations pour reconnaître les espèces locales et leur écosystème puis aider – sans les toucher – les bébés tortues à regagner la mer.
Comme quoi, il suffit de peu pour provoquer un triple effet kiss cool : environnement protégé, touristes comblés par un séjour original, professionnels du tourisme heureux. What else ?