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Départ de René-Marc Chikli : "je n'ai pas vu le temps passer" [ABO]

Retour sur le parcours de René-Marc Chikli au sein du SETO


René-Marc Chikli quitte la présidence du SETO après 30 ans d'engagement. Celui qui a pris les commandes du Syndicat des Entreprises du Tour Operating en 1996 passe le relais à Patrice Caradec. Retour sur un parcours marqué par les grandes crises du secteur, ses mutations et une transmission mûrement préparée.


Rédigé par le Vendredi 20 Juin 2025

Départ de René-Marc Chikli : "je n'ai pas vu le temps passer" - Photo T. Beaurepère
Départ de René-Marc Chikli : "je n'ai pas vu le temps passer" - Photo T. Beaurepère
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René-Marc Chikli tire sa révérence.

Après 30 ans à la Présidence du SETO (Syndicat des Entreprises du Tour Operating), René-Marc Chikli quitte ses fonctions à l'occasion de l'Assemblée générale du syndicat qui se tient dans le cadre du Forum annuel ce 19 juin 2025 à Deauville. Patrice Caradec va lui succéder à ce poste.

Une transition réfléchie et anticipée : "La première réussite, c’est clairement le positionnement d’Hervé Tilmont en tant que directeur général il y a deux ans. C’est un élément clé, car il est en contact direct avec l’ensemble des adhérents et bénéficie d’une reconnaissance unanime. Et puis cela fait aussi deux ans que nous évoquons cette évolution avec Patrice Caradec.

A lire aussi : SETO : Patrice Caradec succède à René-Marc Chikli

Aujourd’hui, il a terminé sa mission chez Alpitour, il est disponible, et il réunit toutes les qualités pour prendre la présidence du SETO. Il sait communiquer, il a une maîtrise des chiffres, et il possède un vrai sens des relations humaines. A priori, tout est réuni pour que cela se passe bien
" détaille René-Marc Chikli.


Président mais pas candidat !

Pour le Président sortant, l'aventure au SETO débute voici 30 ans, en 1996... alors même qu'il n'est pas candidat !

A l'époque, René-Marc Chikli, après avoir occupé le poste de directeur général en charge des finances du groupe Méridien, prend la direction générale de Jet Tours.

Très vite, en 1995, César Balderacchi, ancien Président du SNAV (aujourd'hui Les Entreprises du Voyage ndlr) lui propose de devenir vice-président du syndicat patronal des agences de voyages. "Très honnêtement, je ne savais pas trop ce que c'était" se remémore-t-il. C'est ainsi qu'il met un premier pied dans les instances représentatives de la profession.

A la même période, le SETO qui s'appelait le CETO - pour Cercle d'études des tour-opérateurs - était dirigé par Antoine Cachin alors en poste au Club Med. C'est lors d'une réunion organisée dans les locaux de la marque au Trident, à laquelle il assiste simplement en tant qu’adhérent, qu'il est désigné, à la surprise générale... président du CETO.

Le plan était simple nous résume René-Marc Chikli en souriant : "Il n’est pas candidat, mais il va être président".

René-Marc Chikli structure l'organisation

Le costume enfilé, René-Marc Chikli le portera jusqu'à maintenant, tout en faisant évoluer la structure.

Au départ, ce club de tour-opérateurs - uniquement des grands opérateurs - avait été créé en 1973 pour échanger de l'information, généralement liée aux systèmes informatiques, et au GDS. C'était aussi le lieu où on partageait ses données sur l'activité...

"Sur les chiffres partagés entre les différents membres, on assistait plutôt à une sorte de "poker menteur", c'est-à-dire que si l'on additionnait les chiffres fournis par tous les tour-opérateurs, on obtenait 2 à 3 fois plus que les chiffres du marché réel..." se rappelle René-Marc Chikli amusé.

Les voyagistes commençaient aussi à s'inquiéter des positions de Bruxelles. Pour mieux se structurer, le Président regarde alors ce qui se passe chez ses voisins belges : "En 1996, quand je suis arrivé à la présidence, nous avons regardé le fonctionnement de l'APTO (Association of Belgian Travel Organisers, ndlr), et nous avons trouvé que leur modèle associatif leur permettait d'aller plus en avant dans la communication et de se fédérer un peu mieux".

Cette première étape, réalisée avec l'aide d'Antonio D'apote PDG de Donatello, et Jean-Paul Chantraine, PDG d'ASIA, permet de donner un cadre beaucoup plus institutionnel.

"Le CETO percevait des cotisations plus importantes, calculées sur le chiffre d'affaires de ses membres. Des moyens qui nous permettaient de communiquer et de prendre position à la fois sur les destinations et sur les grands items de la profession : dollar, prix du carburant, etc. Nous en tenions compte pour le calcul des prix. Ceci dit, cela n'a pas duré longtemps : nous nous sommes fait épingler par la DGCCRF car nous n'avions pas le droit de nous entendre sur le dollar..."

Des évènements politiques, climatiques, naturels qui ont marqué l'organisation

Dès 1997, le CETO édite ses premières notes : les recommandations émises (report, annulation...) pour les membres dans le cadre d'un attentat, d'un évènement géopolitique, naturel ou climatique.

"Nous avons diffusé nos premières recommandations, suite à l'attentat de Louxor qui a fait près de 60 victimes en novembre 1997 dans le temple funéraire d'Hatchepsout, en Egypte. S'il nous est arrivé de stopper les départs, nous n'avons jamais procédé à des retours anticipés à part pour le tsunami en Thaïlande en 2004. Cet évènement a été très dur à gérer pour les voyagistes" se rappelle René-Marc Chikli.

Le CETO a d'ailleurs été en première ligne lors de la création du site des conseils aux voyageurs, du Ministère des Affaires Etrangères. "Nous avons toujours gardé un lien étroit avec le centre de crise du MEAE : ils ont intérêt à nous avoir à leurs côtés, et nous aussi. Cette coopération fait partie de notre ADN. Il y a pu y avoir quelques débats, mais nous avons toujours réussi à travailler ensemble. La preuve : ils sont présents aujourd'hui au forum."

Autres évènements marquants : les attentats du 11 septembre 2001 dont les conséquences se ressentent encore aujourd'hui, ou l'éruption du volcan islandais Eyjafjallajökul qui a paralysé une partie du trafic aérien en 2010.

Et puis bien sûr le Covid en 2020. Nous n'allons pas refaire l'histoire, tout le monde l'a connait mais le désormais ex-Président du SETO rappelle que c'est grâce à Patrice Caradec, qui était en contact avec les Italiens à l’origine de l’initiative des avoirs, que la France a pu s’en inspirer.

"Jean-François Rial (PDG de Voyageurs du Monde ndlr) s’est ensuite mobilisé sur le remboursement des frais fixes. Mais sur les avoirs, il faut rappeler que c’est quelque chose que nous n'avions jamais obtenu auparavant dans cette profession, malgré les précédentes crises comme le nuage volcanique, où nous n’avons jamais eu de compensations. À chaque fermeture de l’espace aérien, on encaisse les coups, sans soutien. Les avoirs ont été une belle réussite."

En 2013, le CETO devient un syndicat et se transforme en SETO

A l'époque de la pandémie, cela fait déjà 7 ans, que le CETO est devenu SETO ! En effet, entre ces crises, l'organisation a la volonté de devenir un syndicat. "Avant 2013, il y avait eu des négociations salariales sur lesquelles le métier de tour-opérateur n'avait pas été vraiment bien défendu. Elles ont été menées plutôt au profit de la distribution. Cela a fait sauter le bouchon comme on dit, et certains ont voulu créer un syndicat... "

Une intention qui n'a pas été bien perçue par le SNAV (Les Entreprises du Voyage aujourd'hui ndlr). "Ce n'était pas forcément mon idée, mais j'ai suivi et accompagné le projet. Le SNAV ne comprenait pas pourquoi certains de ses membres voulaient également se syndiquer au SETO. Nous avons dû clarifier cette situation." Depuis, l'eau a coulé sous les ponts et les deux syndicats sont représentés réciproquement au sein de leur conseil d'administration respectif.

Pour René-Marc Chikli, l'objectif est clair : "Il faut absolument continuer à défendre la profession et le métier". Une posture qui s'est renforcée avec l'ouverture du syndicat à tous les opérateurs qui font de la production.

"Au début, si l'entreprise ne faisait pas 8 millions d'euros de chiffre d'affaires, elle ne pouvait pas adhérer au CETO. Nous avons changé les statuts, nous avons élargi. Aujourd'hui, tous ceux qui veulent être au SETO peuvent y entrer. Il n'y a pas de refus. Aujourd'hui, le SETO c'est 80 marques."

"Avec Internet, on nous annonçait mort..."

En 30 ans, René-Marc Chikli s'est aussi mué en fin observateur des mutations du secteur. Il a vu arriver Internet, les réformes pilotées par Bruxelles, les changements de modèle économique induits notamment par les compagnies aériennes...

"La relation avec les compagnies aériennes ne s’est pas améliorée, mais ça ne s'est quand même pas arrangé. Ce qu’on a réussi à faire, c’est créer des chartes, comme celle avec Air France, qui ont permis de poser des bases solides.

Mon message reste clair : "si vous choisissez des compagnies opportunistes comme Air Belgium pour un prix, il ne faut pas s’étonner des conséquences. Les partenariats durables, c’est ça qui crée la fidélité et la solidité, c'est ce qu’on aurait aussi aimé voir avec la distribution,"
faisant allusion aux reproches souvent évoqués de ventes directes sur Internet, ou dans les années 2000 à travers la grande distribution, ou encore via des partenariats tels que ceux noués avec la MACIF.

"Pendant qu'on s'occupe de ces sujets, il y a Air France Holidays et EasyJet Holidays qui débarquent"
lance-t-il. "Ce métier avec l'arrivée d'Internet, on nous l'annonçait mort... et aujourd'hui EasyJet sauve ses résultats en grande partie grâce au tour-opérating. C'est un métier en évolution permanente"

Des réformes et des Ministres

Les réformes réglementaires sont venues aussi régulièrement, occuper (voire préoccuper) les équipes du SETO. L'Europe notamment a posé sur la table de nombreux sujets, pour lesquels il a fallu "monter au créneau".

Mais pour René-Marc Chikli, ce n'est pas tant l'Europe le problème : "Ce qui fait le plus mal, c'est la transposition des directives au niveau national. Si aujourd'hui, nous n'avions que des lois européennes dans notre métier, nous ne serions pas responsables de plein droit !"

Et dans cette bataille, il faut bien sûr faire entendre sa voix auprès des pouvoirs publics. Les relations avec les différents ministres ou secrétaires d'État au tourisme ont, somme toute, été assez inégales.

"Jean-Baptiste Lemoyne en charge du tourisme pendant la crise covid a incontestablement compté. J’ai aussi gardé un très bon souvenir d’Hervé Novelli. Il travaillait vraiment bien, avec un excellent conseiller, Christophe des Roseaux (aujourd'hui Directeur de projets stratégiques Patrimoine et Tourisme à la Banque des Territoires ndlr).

Ensemble, nous avons pu avancer sur des dossiers importants, comme la médiation ou la réforme du code du tourisme. Et puis il y a eu Laurent Fabius, un moment fort : par son poids politique et sa stature, nous avons eu le sentiment que le tourisme devenait enfin une vraie industrie en France. Contrairement à l’Espagne ou l’Allemagne, notre pays a du mal à intégrer cette idée : ici, en France, le tourisme n’est pas considéré comme assez intellectuel."

"J’ai l’impression que ça fait trois ans, pas trente"

Aujourd'hui, le SETO mène parallèlement à tous ces sujets, un autre combat : celui du climat. Le syndicat a lancé le fonds de dotation SETOSPHERE.

"Au CETO, nous ne faisons pas de grandes théories, on agit. Avec SETOSPHERE, nous avons créé un outil concret pour permettre aux opérateurs de s'engager dans la décarbonation, dans un cadre structuré. Nous avons été fortement soutenus par Voyageurs du Monde. Notre principe, c’est d’aller chercher la compétence là où elle est. Sur ce sujet il y a ceux qui parlent beaucoup sans rien faire, alors que nous agissons", lance René-Marc Chikli.

S’il ne devait retenir qu’une seule raison à ces trente années passées au SETO, René-Marc Chikli évoquerait sans hésiter la qualité humaine de celles et ceux qui composent l’association. "Tous ont un seul objectif : faire avancer le métier", insiste-t-il. Loin des conflits, il dit avoir toujours cherché à s’entourer de personnes constructives, animées par la même volonté de défendre et faire progresser la profession.

Le temps, lui, semble avoir filé sans qu’il ne s’en aperçoive. "J’ai l’impression que ça fait trois ans, pas trente, confie-t-il, comme pour souligner l’intensité et la richesse des événements traversés. Il ne va pas complètement quitter la profession. Il va travailler aux côtés de Jean-Pierre Mas, Médiateur du tourisme, à la restructuration de la Médiation Tourisme et Voyage : "et ensuite je verrai".

S’il avoue avoir un pincement au cœur au moment de tourner la page, il n'en est pas moins serein : "J'ai 76 ans, même si je fais plus jeune que mon âge (rires) il faut que je me calme un peu."

Il part avec le sentiment d’avoir apporté sa pierre à l’édifice et d’avoir réussi une transmission, assuré que les liens tissés au fil des années resteront intacts. "Mes amis resteront mes amis !", lance-t-il avec émotion, comme une promesse fidèle à l’esprit qu'il a voulu forger au SETO.

Céline Eymery Publié par Céline Eymery Rédactrice en Chef - TourMaG.com
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Tags : seto
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