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Régime de TVA des locations de yachts : coup d’arrêt à la réfaction de 50% des loyers

La chronique de Nathalie Habibou, avocat spécialisé en TVA et taxes indirectes


Le traitement TVA des navires de plaisance (yachts) est un sujet très controversé en France. Sous l’impulsion du droit de l’Union Européenne (UE), ce régime a connu une évolution marquée ces dernières années. Un nouveau tournant vient d’être franchi en 2020, à la suite de la publication par l’administration fiscale d’une nouvelle doctrine, le 29 janvier 2020, mettant fin à la règle de réfaction de 50% des loyers en matière de location de navires à des fins d’agrément (BOI-TVA-CHAMP-20-50-30 n°40).


Rédigé par Nathalie Habibou le Dimanche 9 Février 2020

Le traitement TVA des navires de plaisance a évolué ces dernières années en France - Depositphotos.com 	DanieleGay
Le traitement TVA des navires de plaisance a évolué ces dernières années en France - Depositphotos.com DanieleGay
Pour rappel, les locations de navires à des fins d’agrément ont bénéficié par le passé d’un traitement favorable en termes de TVA.

Après avoir longtemps été soumises à l’exonération de TVA applicable aux navires de commerce maritime, prévue à l’article 262-II, 2°du code général des impôts (CGI), ces locations ont finalement été assujetties à la TVA, à la suite de la condamnation de la France par la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE).

En effet, la CJUE avait condamné l’interprétation française du régime d’exonération de TVA des navires de commerce maritime, considérant que les critères d’exonération retenus par la France conduisaient à exonérer certains navires, y compris les yachts qui, in fine ne naviguent pas en dehors des eaux territoriales communautaires (CJUE, 21 mars 2013, aff.C-197/12, Commission c/ France).

A. Rappel de la position initiale de l’administration fiscale française

A la suite de cette condamnation au niveau européen, l’administration fiscale française a modifié sa doctrine (BOI-TVA-CHAMP-20-50-30 n°40). L’administration fiscale a précisé que les locations de bateaux de plaisance à une personne assujettie (B2B) ou non assujettie (B2C) sont soumises à la TVA en France, dès lors que le navire a été effectivement mis à la disposition du preneur en France.

Les loyers sont imposables en France en fonction de l’utilisation ou de l’exploitation effective du navire dans les eaux territoriales communautaires.
Dans ces conditions, l’évaluation de la durée d’utilisation du navire dans les eaux communautaires est faite par l’opérateur, sous sa propre responsabilité, et peut être justifiée par tous moyens de preuve (notamment le contrat de location).

Par tolérance, et sans que cela ne résulte d’une transposition de la Directive TVA, cette doctrine précise que les loueurs qui éprouvent des difficultés à effectuer cette évaluation, ont la possibilité de déterminer forfaitairement le temps passé en dehors des eaux territoriales communautaires par l'application d'une réfaction de 50 % sur le montant total des loyers, quelle que soit la catégorie de navire de plaisance concerné.

Cette doctrine administrative continuera de s’appliquer aux contrats de location et d'affrètement de navires conclus jusqu’au 29 mars 2020.

B. Nouvelle position de l’administration fiscale applicable pour les contrats conclus à compter du 30 mars 2020

Dans le cadre de la modification de sa doctrine, l’administration fiscale a supprimé la référence aux « locations de bateaux de plaisance » afin d’y introduire la notion de « locations de navires à des fins d’agrément ».

La règle de territorialité demeure inchangée et les locations de navires à des fins d’agrément demeurent soumises à la TVA française dès lors que le navire a effectivement été mis à disposition du client en France, quelle que soit la durée du contrat.

Toutefois, par dérogation, et afin d'éviter tout risque de double imposition ou de distorsion de concurrence, conformément aux dispositions prévues à l’article 59 bis-a de la Directive TVA, seule la part des loyers correspondant à la proportion de la durée d'utilisation ou d'exploitation effective du navire en dehors des eaux territoriales communautaires, évaluée par le redevable sous sa responsabilité et sous réserve du droit de contrôle du service, est exonérée de TVA. Cette évaluation doit être corroborée par tous moyens de preuve.

Par conséquent, il est mis fin à la règle de réfaction de 50%. Désormais, l’évaluation se fera au temps réel passé en dehors des eaux communautaires, sur la base d’une présomption, en faveur des opérateurs.

Dorénavant les règles d’évaluation varient selon que le navire est doté ou non d’un système d’identification automatique.

o S'agissant des navires dotés « d'un système d'identification automatique conforme aux normes techniques et de performance fixée au chapitre V de la convention internationale de 1974 pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS) », l’évaluation s’effectue à partir des données enregistrées par ce système d’identification automatique. En effet, « les données enregistrées par ce système sont présumées probantes et ne peuvent être remises en cause par l'administration qu'en cas de fraude portant sur ce système » (BOI-TVA-CHAMP-20-50-30 n°40).

o S’agissant des navires qui ne sont pas dotés d’un tel système d’identification, la nouvelle doctrine administrative distingue le traitement applicable selon que la longueur hors-tout du navire est inférieure ou supérieure à 15 mètres.
– Pour les navires d’une longueur hors-tout inférieure à 15 mètres, l'évaluation peut résulter :
• Des termes du contrat de location ou
• Des données consignées dans le journal de bord en apportant la preuve de la sortie du navire des eaux territoriales communautaires.
– Pour les navires dont la longueur hors-tout est égale ou supérieure à 15 mètres, l'évaluation est effectuée à partir de toute donnée technique permettant d'établir la durée réelle passée en dehors des eaux territoriales communautaires.

Pour l’application de ces dispositions, les opérateurs ayant des navires dotés d’un système d’identification sont invités à vérifier que les données de géolocalisation enregistrées par ce système correspondent bien à la réalité de la navigation.

Pour les autres opérateurs dont les navires ne sont pas dotés de ce système, une attention particulière devra être portée non seulement sur la rédaction des contrats de location mais aussi sur toutes les données techniques du navire permettant de prouver le temps effectivement passé en dehors des eaux communautaires.

Également, il convient de mettre à jour les process internes afin de s’assurer du bon traitement TVA qui sera applicable aux contrats conclus à compter du 30 mars 2020.

L’administration fiscale a ouvert une consultation publique sur ces nouveaux commentaires. Celle-ci est ouverte jusqu’au 1er mars 2020. Il est souhaitable pour les opérateurs, de profiter de cette consultation pour anticiper les éventuelles difficultés liées à la mise en œuvre de ces nouvelles règles.

Nathalie HABIBOU

Avocat au Barreau de Paris, est associée du cabinet Arsene où elle a la responsabilité des activités centrées sur la TVA. Depuis 12 ans, elle accompagne au quotidien les entreprises et groupes, français et internationaux, en matière de TVA & taxes indirectes (en conseil comme en contentieux). Elle est également membre de l’Association des Praticiens de la TVA Européenne (APTE), et de l’Institut des Avocats Conseils Fiscaux (IACF).

www.arsene-taxand.com

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Tags : habibou, tva, yachts
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Commentaires

1.Posté par navetier le 27/05/2020 11:43 | Alerter
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Bonjour
avec la crise sanitaire il n'est plus possible de sortir les navires de plaisance des eau térritoriales européennes. Un concessionnaire m'a parlé d'une procédure de "désarment" permettant de stocker au sec, en France, un navire de plaisance tout en bénéficiant de loyer avec TVA 0 . En avez vous connaissance comment faire pour en bénéficier

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