
Indemnités : "No show fees" et arrhes, quels bons réflexes à avoir en matière de TVA ? - Depositphotos.com Auteur Diloka107
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Le terme « no-show fees » désigne le prix conservé par le prestataire de services lorsque le client ayant payé le prix de la prestation ne s’y présente pas (de son fait ou non) et ne se fait pas rembourser ce prix.
En pratique, ces sommes peuvent être constituées d’arrhes ou de toutes autres sommes conservées par l’opérateur.
Dans un tel cas, les opérateurs ont tendance à considérer que le prix qu’ils conservent constitue une indemnité liée à la non-présentation du client et l’impossibilité de proposer la prestation à un autre client.
Ces opérateurs viennent modifier le montant de TVA initialement collecté lors de l’encaissement du prix.
Lire aussi : TVA sur la marge des agences de voyages : comment éviter les erreurs ?
Or, le traitement TVA n’est pas unifié et dépend essentiellement de la nature des sommes conservées par le prestataire. En outre, l’administration fiscale n’est pas liée par la qualification juridique des sommes retenues par les opérateurs.
Leur caractère taxable ou non doit ainsi faire l’objet d’une appréciation au cas par cas, en fonction des conditions de leurs versements.
Les sommes sont-elles qualifiées d’arrhes ?

Il est essentiel de ne pas confondre les « no-show fees » avec les arrhes qui sont des indemnités constitutives de véritables dommages et intérêts venant sanctionner l’inexécution d’une obligation ou la lésion d’un intérêt quelconque.
Conformément à la doctrine administrative qui se réfère à l’article 1590 du Code civil, ces sommes servent à inciter les parties à exécuter ledit contrat. En principe, la somme est imputée sur le prix de la prestation lorsque la partie les ayant versées se présente. En l’absence de présentation, le client est susceptible de perdre la somme correspondante. Le prestataire ayant conservé les sommes devant, le cas échéant, restituer cette somme au double si l’inexécution vient de son fait.
Ces sommes peuvent notamment être facturées aux clients par un opérateur agissant dans le cadre de son activité de « tour-opérateur » (i.e., commercialisation d’un voyage comportant l’hébergement et/ou le transport) au sens du régime particulier de TVA sur marge.
Des indemnités exclues du champ de la TVA
Dans l’affaire Sté Thermale d’Eugénie-les-bains (Aff. C-277/05,18 juillet 2007), la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a donné sa position concernant ces sommes.
Elle a ainsi considéré que les sommes conservées par un hôtelier devaient être regardées comme des indemnités forfaitaires de résiliation versées en réparation du préjudice subi à la suite de la défaillance du client, sans lien direct avec un quelconque service rendu à titre onéreux et, en tant que telles, non soumises à cette taxe. Ces sommes constituaient uniquement la faculté de dédit ouverte au client.
En pratique, il convient de regarder s’il existe un lien direct entre le versement des arrhes par le client et une quelconque prestation de services rendue par l’hôtelier.
La CJUE arrive à la conclusion que les arrhes reçues et conservées par un hôtelier correspondent à une indemnisation forfaitaire du préjudice subi par l’hôtelier en raison du désistement de ce client et ne sont donc pas, en tant que telles, soumises à la TVA. Se fondant sur cette position, l’administration fiscale a considéré dans une décision de rescrit que « les sommes conservées par les tour-opérateurs en cas d’annulation, par le client, du voyage commandé, qui ne peuvent être considérées comme la contrepartie d’un service fourni ne sont donc pas soumises à la TVA ».
Les derniers commentaires de l’administration fiscale concernant les indemnités confirment que les arrhes ne constituent pas la contrepartie d’une opération taxable, et reprennent la décision de la CJUE susmentionnée (BOI-TVA-BASE-10-10-50, §310).
Le traitement TVA applicable aux arrhes semble donc pleinement établi et confirmé.
Quid des indemnités taxables (no-show fees) ne pouvant pas être qualifiées d’arrhes ?
La distinction entre « no-show fees » et arrhes a été développée par la jurisprudence de la CJUE dans plusieurs affaires (notamment Stés Air France KLM et Brit Air, Aff. C-250/14 ; C-289/14, 23 décembre 2015; MEO, Aff. C-295/17, 22 novembre 2018; Vodafone, Aff. C-43/19, 11 juin 2020) et confirmées par le Conseil d’Etat (CE Sté Air France KLM, n°365172, 13 avril 2016; Sté Brit Air, n°365173, 13 avril 2016; MK2 Vision, n°373591, 15 avril 2016).
Ces arrêts ont établi que des frais d’annulation, peuvent être soumis à la TVA dès lors qu’ils constituent la rémunération d’un droit d’accès à une prestation de service – à savoir, la faculté offerte par le prestataire au client de bénéficier de l’exécution de sa prestation (i.e. accès à une chambre d’hôtel) – indépendamment de l’utilisation effective de ce droit.
Plus récemment, la distinction entre indemnité réparatrice et contrepartie d’un droit d’accès a été clarifiée par le Conseil d’État dans deux décisions du 9 octobre 2024 (CE, Société Hôtellerie Paris Eiffel Suffren, n° 472257 ; CE, Accorinvest, n° 489947).
Dans ces décisions récentes rendues en décembre 2024, le Conseil d’Etat a jugé que les sommes prélevées sur le compte bancaire des clients ne se présentant pas à la date convenue de leur réservation d’hôtel, sans avoir annulé dans les délais leur réservation, sont soumises à TVA. Le fait que le montant conservé corresponde au prix d’une seule nuitée ou au prix total de la réservation est sans incidence sur la taxation.
En effet, ces sommes constituent la contrepartie d’une prestation de services individualisable dont a bénéficié le client qui est le droit d’accéder au service. Il s'était engagé à régler ces montants de manière ferme lors de la signature du contrat, indépendamment du fait qu’il ait fait usage de ce droit d’accès.
Une décision récente de la CJUE adopte une approche similaire, concernant des sommes versées à un prestataire ayant commencé l’exécution de travaux en vertu d’un contrat auquel le bénéficiaire a mis fin unilatéralement. La Cour a estimé que le service était individualisable et que les sommes perçues ne constituent pas des arrhes réparatrices d’un préjudice mais le prix d’une prestation partiellement exécutée (CJUE, 28 novembre 2024, aff. C-622/23, Rhtb).
Ces solutions sont confirmées par la doctrine administrative (BOI-TVA-BASE-10-10-50, 11 décembre 2024) qui précise que le fait que le client ne supporte qu’une fraction du prix, que les sommes soient acquittées à l’avance ou prélevées à postériori et la renonciation formelle avant la date de la réservation sont des circonstances qui n’ont pas d’incidence sur la taxation.
Au cas particulier de l’activité de tour-opérateur, la doctrine administrative (BOI-TVA-SECT-60, §230) considère que les frais d'annulation retenus par une agence de voyages sont inclus dans le calcul de la marge si ces frais s'analysent comme la contrepartie d'un droit conféré au client d'exercer ou non son droit au voyage. Si le client ne met pas en œuvre ce droit après avoir versé l’intégralité du prix, le montant conservé est soumis à la TVA si le contrat exclut tout remboursement.
La doctrine administrative (BOI-TVA-BASE-10-10-50, §260) précise que la TVA est susceptible de s’appliquer dans les situations suivantes, pour les capacités non utilisées et non remboursables :
- Réservations de chambres d'hôtel
- Réservations de voyages organisés
- Réservations d’activités ou de visites
- Réservations de billets de transports
- Réservations de tickets et cartes de cinéma à entrées multiples non utilisés dans les délais prévus.
Ces arrêts ont établi que des frais d’annulation, peuvent être soumis à la TVA dès lors qu’ils constituent la rémunération d’un droit d’accès à une prestation de service – à savoir, la faculté offerte par le prestataire au client de bénéficier de l’exécution de sa prestation (i.e. accès à une chambre d’hôtel) – indépendamment de l’utilisation effective de ce droit.
Plus récemment, la distinction entre indemnité réparatrice et contrepartie d’un droit d’accès a été clarifiée par le Conseil d’État dans deux décisions du 9 octobre 2024 (CE, Société Hôtellerie Paris Eiffel Suffren, n° 472257 ; CE, Accorinvest, n° 489947).
Dans ces décisions récentes rendues en décembre 2024, le Conseil d’Etat a jugé que les sommes prélevées sur le compte bancaire des clients ne se présentant pas à la date convenue de leur réservation d’hôtel, sans avoir annulé dans les délais leur réservation, sont soumises à TVA. Le fait que le montant conservé corresponde au prix d’une seule nuitée ou au prix total de la réservation est sans incidence sur la taxation.
En effet, ces sommes constituent la contrepartie d’une prestation de services individualisable dont a bénéficié le client qui est le droit d’accéder au service. Il s'était engagé à régler ces montants de manière ferme lors de la signature du contrat, indépendamment du fait qu’il ait fait usage de ce droit d’accès.
Une décision récente de la CJUE adopte une approche similaire, concernant des sommes versées à un prestataire ayant commencé l’exécution de travaux en vertu d’un contrat auquel le bénéficiaire a mis fin unilatéralement. La Cour a estimé que le service était individualisable et que les sommes perçues ne constituent pas des arrhes réparatrices d’un préjudice mais le prix d’une prestation partiellement exécutée (CJUE, 28 novembre 2024, aff. C-622/23, Rhtb).
Ces solutions sont confirmées par la doctrine administrative (BOI-TVA-BASE-10-10-50, 11 décembre 2024) qui précise que le fait que le client ne supporte qu’une fraction du prix, que les sommes soient acquittées à l’avance ou prélevées à postériori et la renonciation formelle avant la date de la réservation sont des circonstances qui n’ont pas d’incidence sur la taxation.
Au cas particulier de l’activité de tour-opérateur, la doctrine administrative (BOI-TVA-SECT-60, §230) considère que les frais d'annulation retenus par une agence de voyages sont inclus dans le calcul de la marge si ces frais s'analysent comme la contrepartie d'un droit conféré au client d'exercer ou non son droit au voyage. Si le client ne met pas en œuvre ce droit après avoir versé l’intégralité du prix, le montant conservé est soumis à la TVA si le contrat exclut tout remboursement.
La doctrine administrative (BOI-TVA-BASE-10-10-50, §260) précise que la TVA est susceptible de s’appliquer dans les situations suivantes, pour les capacités non utilisées et non remboursables :
- Réservations de chambres d'hôtel
- Réservations de voyages organisés
- Réservations d’activités ou de visites
- Réservations de billets de transports
- Réservations de tickets et cartes de cinéma à entrées multiples non utilisés dans les délais prévus.
Porter une attention particulière à la rédaction des contrats
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La CJUE a considéré que ces sommes rémunèrent en réalité une prestation de services consistant en un droit de bénéficier de la prestation, peu importe que ce droit soit finalement mis en œuvre ou non par le client.
Ces décisions sont transposables à toutes sommes non qualifiées d’arrhes et conservées par les opérateurs.
En pratique, ce n’est pas la réalisation de la prestation future qui entraîne le fait générateur de la TVA, mais la possibilité offerte par le prestataire de rendre la prestation de services.
Ces sommes ne sont pas des indemnités visant à réparer un préjudice subi par le prestataire et restent donc soumises à TVA.
La TVA devient et reste exigible (à collecter) au moment du paiement du prix par le client alors même que la prestation de services achetée n’a pas été effectivement rendue.
En conséquence, nous recommandons aux opérateurs de porter une attention particulière à la rédaction des contrats et à la qualification juridique des sommes conservées en cas de non-présentation du client (peu importe leur appellation) et de sécuriser les traitements TVA en conséquence :
- si ces sommes constituent des arrhes au sens du Code civil, il sera possible de considérer qu’elles constituent une pure indemnité non soumise à la TVA. Il sera alors possible de régulariser a posteriori la TVA initialement collectée lors de l’encaissement du prix.
- si ces sommes ne constituent pas des arrhes, elles devraient être considérées comme constituant la rémunération du droit accordé au client de bénéficier de la prestation (no-show fees). En pratique, il ne
sera pas possible pour les opérateurs de modifier la base d’imposition à la TVA, et de corriger la TVA initialement collectée.
Ces décisions sont transposables à toutes sommes non qualifiées d’arrhes et conservées par les opérateurs.
En pratique, ce n’est pas la réalisation de la prestation future qui entraîne le fait générateur de la TVA, mais la possibilité offerte par le prestataire de rendre la prestation de services.
Ces sommes ne sont pas des indemnités visant à réparer un préjudice subi par le prestataire et restent donc soumises à TVA.
La TVA devient et reste exigible (à collecter) au moment du paiement du prix par le client alors même que la prestation de services achetée n’a pas été effectivement rendue.
En conséquence, nous recommandons aux opérateurs de porter une attention particulière à la rédaction des contrats et à la qualification juridique des sommes conservées en cas de non-présentation du client (peu importe leur appellation) et de sécuriser les traitements TVA en conséquence :
- si ces sommes constituent des arrhes au sens du Code civil, il sera possible de considérer qu’elles constituent une pure indemnité non soumise à la TVA. Il sera alors possible de régulariser a posteriori la TVA initialement collectée lors de l’encaissement du prix.
- si ces sommes ne constituent pas des arrhes, elles devraient être considérées comme constituant la rémunération du droit accordé au client de bénéficier de la prestation (no-show fees). En pratique, il ne
sera pas possible pour les opérateurs de modifier la base d’imposition à la TVA, et de corriger la TVA initialement collectée.

Nathalie HABIBOU - DR
Nathalie HABIBOU
Avocat au Barreau de Paris, est associée du cabinet Arsene où elle a la responsabilité des activités centrées sur la TVA. Depuis plus de 13 ans, elle accompagne au quotidien les entreprises et groupes, français et internationaux, en matière de TVA & taxes indirectes (en conseil comme en contentieux). Elle est également membre de l’Association des Praticiens de la TVA Européenne (APTE), et de l’Institut des Avocats Conseils Fiscaux (IACF).
www.arsene-taxand.com
Avocat au Barreau de Paris, est associée du cabinet Arsene où elle a la responsabilité des activités centrées sur la TVA. Depuis plus de 13 ans, elle accompagne au quotidien les entreprises et groupes, français et internationaux, en matière de TVA & taxes indirectes (en conseil comme en contentieux). Elle est également membre de l’Association des Praticiens de la TVA Européenne (APTE), et de l’Institut des Avocats Conseils Fiscaux (IACF).
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