Treize ans aprÚs la tragédie du vol Air France reliant Rio de Janeiro à Paris CDG, et aprÚs un premier non-lieu en 2019 cassé en appel, Air France et Airbus se retrouvent ces jours-ci devant le tribunal correctionnel de Paris pour une éniÚme confrontation avec la justice qui devrait durer trois mois.
Bref rappel des faits. Le 1er juin 2009, le vol Air France 447 décolle de Rio de Janeiro. Le vol est assuré par un Airbus A330.
A 02h10 du matin, lâavion en vol de croisiĂšre a entamĂ© la traversĂ©e de lâAtlantique. Il fait nuit noire et la proximitĂ© du front inter tropical provoque des turbulences.
Un des pilotes prĂ©vient les personnels de cabine : « dans deux minutes lĂ , on devrait attaquer une zone oĂč ça devrait bouger un peu plus que maintenant, il faudrait vous mĂ©fier là », et il ajoute quâil les « rappelle dĂšs quâon est sorti de là ».
A cet instant les indicateurs de vitesse de lâavion, les sondes « Pitot », vont givrer et cesser de fonctionner pendant quelques instants ayant pour effet de dĂ©sengager le pilote automatique et de priver lâĂ©quipage des indications de vitesse.
Celui-ci ne comprend pas tout de suite ce quâil se passe et cabre lâavion. Dans cette position, lâavion perd sa portance. Il dĂ©croche. Sâensuit une folle descente vers lâocĂ©an avec cette terrible derniĂšre phrase de lâĂ©quipage quelques secondes avant lâimpact : "On va taper".
Au centre de contrĂŽle des opĂ©rations aĂ©riennes dâAir France, un service qui fonctionne H24 et qui suit tous les avions de la compagnie, les messages adressĂ©s automatiquement depuis lâavion par le systĂšme ACARS (Aircraft Communication Addressing and Reporting System) ne laissent pas vraiment de doute au fur et Ă mesure quâils arrivent.
ProblÚme sur les commandes de vol, perte centrale à inertie, panne des calculateurs, chute de 14 000 pieds minute⊠La sidération envahit chacun.
Le jour se lÚve, un jour tragique pour les familles des victimes et Air France, qui va devoir annoncer la plus grave catastrophe aérienne de toute son histoire.
Bref rappel des faits. Le 1er juin 2009, le vol Air France 447 décolle de Rio de Janeiro. Le vol est assuré par un Airbus A330.
A 02h10 du matin, lâavion en vol de croisiĂšre a entamĂ© la traversĂ©e de lâAtlantique. Il fait nuit noire et la proximitĂ© du front inter tropical provoque des turbulences.
Un des pilotes prĂ©vient les personnels de cabine : « dans deux minutes lĂ , on devrait attaquer une zone oĂč ça devrait bouger un peu plus que maintenant, il faudrait vous mĂ©fier là », et il ajoute quâil les « rappelle dĂšs quâon est sorti de là ».
A cet instant les indicateurs de vitesse de lâavion, les sondes « Pitot », vont givrer et cesser de fonctionner pendant quelques instants ayant pour effet de dĂ©sengager le pilote automatique et de priver lâĂ©quipage des indications de vitesse.
Celui-ci ne comprend pas tout de suite ce quâil se passe et cabre lâavion. Dans cette position, lâavion perd sa portance. Il dĂ©croche. Sâensuit une folle descente vers lâocĂ©an avec cette terrible derniĂšre phrase de lâĂ©quipage quelques secondes avant lâimpact : "On va taper".
Au centre de contrĂŽle des opĂ©rations aĂ©riennes dâAir France, un service qui fonctionne H24 et qui suit tous les avions de la compagnie, les messages adressĂ©s automatiquement depuis lâavion par le systĂšme ACARS (Aircraft Communication Addressing and Reporting System) ne laissent pas vraiment de doute au fur et Ă mesure quâils arrivent.
ProblÚme sur les commandes de vol, perte centrale à inertie, panne des calculateurs, chute de 14 000 pieds minute⊠La sidération envahit chacun.
Le jour se lÚve, un jour tragique pour les familles des victimes et Air France, qui va devoir annoncer la plus grave catastrophe aérienne de toute son histoire.
La théorie des plaques de Reason

A la justice de le dire mais ce qui est sĂ»r et comme souvent dans ce genre dâaccident, le drame est consĂ©cutif Ă une sĂ©rie de failles, de disfonctionnements ou dâinsuffisances dans la chaine de sĂ©curitĂ© censĂ©e « protĂ©ger » le vol.
Prises individuellement, elles ne conduisent pas à la catastrophe. Conjuguées ensemble elle le peuvent.
Ces dispositifs de sĂ©curitĂ©, James Reason, un professeur de psychologie anglais qui a enseignĂ© Ă lâuniversitĂ© de Manchester de 1977 Ă 2001 en a fait un modĂšle que tout spĂ©cialiste de la sĂ©curitĂ© aĂ©rienne connait aujourdâhui : le modĂšle des plaques de Reason. Un chapitre incontournable au programme de formation des personnels navigants.
Pour faire simple et comme le montre le dessin ci-dessus, chaque maillon de la chaine de sĂ©curitĂ© dâun vol est symbolisĂ© par une plaque. Un bouclier chargĂ© de parer Ă un dysfonctionnement.
Si aucun de ces boucliers nâest intĂšgre, si sur chacun existe des faiblesses permettant au risque de « passer », la situation est accidentogĂšne.
Formation et informations aux équipages A330
Quelles sont, dans le cadre de lâaccident du vol AF 447, les plaques dont la chambre de lâinstruction de la Cour dâappel estime quâil y a eu des faiblesses ?
Pour Air France, la formation des équipages de la compagnie est jugée comme pas suffisamment « adaptée face à des indications de vitesse erronées suite au givrage des sondes Pitot ».
Pour Airbus, il y a eu une sous-estimation de la « gravitĂ© des dĂ©faillances des sondes anĂ©momĂ©triques Ă©quipant lâaĂ©ronef A330 en ne prenant pas toutes les dispositions nĂ©cessaires pour informer dâurgence les Ă©quipages des sociĂ©tĂ©s exploitantes et contribuer Ă les former efficacement. »
Les « plaques » donc de la formation et de lâinformation, pointĂ©es par le tribunal et concernant les deux seuls prĂ©venus retenus par la justice : Air France et Airbus.
Pour Air France, la formation des équipages de la compagnie est jugée comme pas suffisamment « adaptée face à des indications de vitesse erronées suite au givrage des sondes Pitot ».
Pour Airbus, il y a eu une sous-estimation de la « gravitĂ© des dĂ©faillances des sondes anĂ©momĂ©triques Ă©quipant lâaĂ©ronef A330 en ne prenant pas toutes les dispositions nĂ©cessaires pour informer dâurgence les Ă©quipages des sociĂ©tĂ©s exploitantes et contribuer Ă les former efficacement. »
Les « plaques » donc de la formation et de lâinformation, pointĂ©es par le tribunal et concernant les deux seuls prĂ©venus retenus par la justice : Air France et Airbus.
Air France et Airbus : les deux seuls prévenus
Ces deux grands acteurs de lâaĂ©ronautique se dĂ©fendront bien sĂ»r lors du procĂšs.
Air France avait bien Ă©videmment, dans ses procĂ©dures, une formation IAS douteuse (IAS pour Indicated Air Speed) des Ă©quipages, agréée par les autoritĂ©s de tutelle, et sâemploiera Ă dĂ©montrer son sĂ©rieux en la matiĂšre.
Le programme de la formation 2008/2009 de la compagnie introduit « un briefing sur les anomalies dâindications de vitesse pour toutes les phases de vol, accompagnĂ© dâune mise en pratique en simulateur en montĂ©e peu aprĂšs le dĂ©collage ».
Une formation au simulateur effectuĂ©e par lâĂ©quipage du vol AF 447 mais, câest vrai, durant une phase de montĂ©e et non en configuration « vol de croisiĂšre haute altitude ». Air France avait privilĂ©giĂ© cette phase de vol, « en montĂ©e » oĂč lâavion Ă©volue encore prĂšs du sol et oĂč il faut donc rapidement rĂ©agir.
Quand Ă Airbus, le constructeur, il peut justifier de la publication rĂ©guliĂšre depuis 2007 de ce quâon appelle un BS (bulletin de service) rĂ©guliĂšrement rĂ©visĂ© et proposant de commencer Ă remplacer les sondes par un modĂšle plus efficace.
Lourdeur des procĂ©dures ? Inertie au sein de ces trĂšs grandes entreprises ? Air France a rĂ©agi aux propositions de modifications des sondes en lançant une modification de toutes les sondes sur lâensemble de sa flotte A330/A340.
La note technique date du 27 avril 2009, un mois pratiquement avant la catastrophe. LâA330 F-GZCP impliquĂ© nâavait pas encore bĂ©nĂ©ficiĂ© de la modificationâŠ
Air France avait bien Ă©videmment, dans ses procĂ©dures, une formation IAS douteuse (IAS pour Indicated Air Speed) des Ă©quipages, agréée par les autoritĂ©s de tutelle, et sâemploiera Ă dĂ©montrer son sĂ©rieux en la matiĂšre.
Le programme de la formation 2008/2009 de la compagnie introduit « un briefing sur les anomalies dâindications de vitesse pour toutes les phases de vol, accompagnĂ© dâune mise en pratique en simulateur en montĂ©e peu aprĂšs le dĂ©collage ».
Une formation au simulateur effectuĂ©e par lâĂ©quipage du vol AF 447 mais, câest vrai, durant une phase de montĂ©e et non en configuration « vol de croisiĂšre haute altitude ». Air France avait privilĂ©giĂ© cette phase de vol, « en montĂ©e » oĂč lâavion Ă©volue encore prĂšs du sol et oĂč il faut donc rapidement rĂ©agir.
Quand Ă Airbus, le constructeur, il peut justifier de la publication rĂ©guliĂšre depuis 2007 de ce quâon appelle un BS (bulletin de service) rĂ©guliĂšrement rĂ©visĂ© et proposant de commencer Ă remplacer les sondes par un modĂšle plus efficace.
Lourdeur des procĂ©dures ? Inertie au sein de ces trĂšs grandes entreprises ? Air France a rĂ©agi aux propositions de modifications des sondes en lançant une modification de toutes les sondes sur lâensemble de sa flotte A330/A340.
La note technique date du 27 avril 2009, un mois pratiquement avant la catastrophe. LâA330 F-GZCP impliquĂ© nâavait pas encore bĂ©nĂ©ficiĂ© de la modificationâŠ
Les sondes Pitot
Autre plaque avec un trou, les sondes Pitot fournies par Thales.
DĂ©faillantes pendant quelques instants suite Ă un givrage les indications erronĂ©es quâelles ont fournies ont dĂ©sorientĂ© lâĂ©quipage.
Agréées, elles avaient cependant la particularitĂ© de pouvoir, dans des circonstances trĂšs particuliĂšres de givrage, connaitre « une dĂ©gradation rĂ©versible et temporaire, autour dâune Ă deux minutes mais gĂ©nĂ©rant des indications de vitesse douteuse ou erronĂ©e ».
Une petite faille donc qui, comme le dĂ©montre Reason, vient prendre sa place dans lâenchainement catastrophique.
Conformes aux normes et Ă la rĂšglementation de lâĂ©poque, lâentreprise ThalĂšs nâest pas mise en cause. « Nous ne sommes pas appelĂ©s en responsabilitĂ© dans ce procĂšs » nous a confirmĂ© Patrick Caine, PDG de ThalĂšs, lors dâun entretien avec TourMaG.
DĂ©faillantes pendant quelques instants suite Ă un givrage les indications erronĂ©es quâelles ont fournies ont dĂ©sorientĂ© lâĂ©quipage.
Agréées, elles avaient cependant la particularitĂ© de pouvoir, dans des circonstances trĂšs particuliĂšres de givrage, connaitre « une dĂ©gradation rĂ©versible et temporaire, autour dâune Ă deux minutes mais gĂ©nĂ©rant des indications de vitesse douteuse ou erronĂ©e ».
Une petite faille donc qui, comme le dĂ©montre Reason, vient prendre sa place dans lâenchainement catastrophique.
Conformes aux normes et Ă la rĂšglementation de lâĂ©poque, lâentreprise ThalĂšs nâest pas mise en cause. « Nous ne sommes pas appelĂ©s en responsabilitĂ© dans ce procĂšs » nous a confirmĂ© Patrick Caine, PDG de ThalĂšs, lors dâun entretien avec TourMaG.
Responsable ou coupable ?
La Direction GĂ©nĂ©rale de lâAviation Civile Française (DGAC) ainsi que lâAgence de l'Union europĂ©enne pour la sĂ©curitĂ© aĂ©rienne (AESA) Ă©taient Ă©galement au courant des problĂšmes de givrage des sondes et dâindications de vitesses erronĂ©es rapportĂ©es par bon nombre dâĂ©quipages bien avant la catastrophe du Rio-Paris.
LĂ aussi les experts pointent un manque dâaction pour mieux informer lâensemble des opĂ©rateurs sur ces sujets.
Enfin, la plaque « conscience de la situation par lâĂ©quipage » dĂ©jĂ fragilisĂ©e par les indications de vitesse erronĂ©es sâest rĂ©vĂ©lĂ©e encore plus vulnĂ©rable ce soir-lĂ , dans une nuit noire et avec une visibilitĂ© nulle.
Bien difficile dans tous ces enchainements de déterminer qui va basculer de la responsabilité à la culpabilité.
LĂ aussi les experts pointent un manque dâaction pour mieux informer lâensemble des opĂ©rateurs sur ces sujets.
Enfin, la plaque « conscience de la situation par lâĂ©quipage » dĂ©jĂ fragilisĂ©e par les indications de vitesse erronĂ©es sâest rĂ©vĂ©lĂ©e encore plus vulnĂ©rable ce soir-lĂ , dans une nuit noire et avec une visibilitĂ© nulle.
Bien difficile dans tous ces enchainements de déterminer qui va basculer de la responsabilité à la culpabilité.