"C’est roc ! … c’est un pic ! … c’est un cap !"
Nous ne parlons pas là du nez de Jean-Pierre Mas, mais de la figure qu'il incarne pour une partie de l'industrie touristique. Pendant quatre décennies, il a été de toutes les révolutions technologiques, des combats et des sauvetages.
Imaginez un peu que dans le moteur de recherche de TourMaG.com, son nom est associé à 1 279 articles, dont le premier remonte à 2003 ! Une année où même pas un tiers des Français bénéficiaient d'une connexion internet… alors que dire du nombre de sites en ligne des acteurs du tourisme.
Et si certains connaissent sa passion pour l’Île Maurice, une destination qui a accueilli son dernier congrès en tant que président, ils sont peu à connaître son histoire intime avec le voyage.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le fils et petit-fils de cheminot n'a pas sillonné la France tous les étés de sa jeunesse, loin de là. Il s'est même adonné au dépaysement estival tardivement, une fois la majorité atteinte.
Nous vous proposons de plonger dans les souvenirs, plus ou moins lointains, de Jean-Pierre Mas, la boussole parfois imprudente du secteur.
Nous ne parlons pas là du nez de Jean-Pierre Mas, mais de la figure qu'il incarne pour une partie de l'industrie touristique. Pendant quatre décennies, il a été de toutes les révolutions technologiques, des combats et des sauvetages.
Imaginez un peu que dans le moteur de recherche de TourMaG.com, son nom est associé à 1 279 articles, dont le premier remonte à 2003 ! Une année où même pas un tiers des Français bénéficiaient d'une connexion internet… alors que dire du nombre de sites en ligne des acteurs du tourisme.
Et si certains connaissent sa passion pour l’Île Maurice, une destination qui a accueilli son dernier congrès en tant que président, ils sont peu à connaître son histoire intime avec le voyage.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le fils et petit-fils de cheminot n'a pas sillonné la France tous les étés de sa jeunesse, loin de là. Il s'est même adonné au dépaysement estival tardivement, une fois la majorité atteinte.
Nous vous proposons de plonger dans les souvenirs, plus ou moins lointains, de Jean-Pierre Mas, la boussole parfois imprudente du secteur.
"J’ai pris conscience que la lenteur était une alliée indispensable"
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Pour le Toulousain, comme bien d'autres de ses congénères du Sud-Ouest, les premiers souvenirs de dépaysement sont en lien avec... l'Espagne.
"Gamin, mon premier voyage familial m’a fait côtoyer la misère, celle des enfants en haillons, sur les plateaux de Castille, quémandant des bonbons ou, inaccessible luxe, un chewing-gum.
Quelques années plus tard, alors que je devenais un jeune adulte, celui initiatique fut... Rome. Mes parents, tellement surpris de ma réussite au bac, m’avaient laissé le choix entre un scooter et un voyage à Rome.
Je suis allé à Rome… où j’ai loué un scooter," se souvient avec le sourire celui qui est aujourd’hui Médiateur du Tourisme et du Voyage.
Un choix audacieux pour un jeune homme qui vivait au pied des Pyrénées, dans un secteur où un deux-roues aurait pu lui permettre de s'émanciper. Il préféra donc s'évader pour grandir.
S’ensuivirent, après l'obtention du précieux diplôme, cinq années d'études de l'autre côté de la Méditerranée.
Il prit le bateau direction l'Algérie, où il mena à bien des études de droit pour devenir juriste. Il démarra sa carrière professionnelle, loin du voyage, en tant qu'enseignant universitaire à Oran.
"L’université algérienne ne m’ayant pas imposé un rythme soutenu de transmission des connaissances, j’ai mis à profit le temps libéré pour découvrir et apprécier la diversité de cet immense pays, et m’échapper de temps en temps au Maroc voisin.
J’ai pris conscience que la lenteur était une alliée indispensable et que le voyage éveillait simultanément les cinq sens : les senteurs des épices et du jasmin, le rouge des dunes du Tadrart, les premiers bruits de la vie montant au petit matin de la médina de Fès vers la terrasse des Mérinides, la complexité des saveurs d’une harira, le toucher du cuivre juste martelé chez le dinandier," poursuit l'ancien président des Entreprises du Voyage.
"Gamin, mon premier voyage familial m’a fait côtoyer la misère, celle des enfants en haillons, sur les plateaux de Castille, quémandant des bonbons ou, inaccessible luxe, un chewing-gum.
Quelques années plus tard, alors que je devenais un jeune adulte, celui initiatique fut... Rome. Mes parents, tellement surpris de ma réussite au bac, m’avaient laissé le choix entre un scooter et un voyage à Rome.
Je suis allé à Rome… où j’ai loué un scooter," se souvient avec le sourire celui qui est aujourd’hui Médiateur du Tourisme et du Voyage.
Un choix audacieux pour un jeune homme qui vivait au pied des Pyrénées, dans un secteur où un deux-roues aurait pu lui permettre de s'émanciper. Il préféra donc s'évader pour grandir.
S’ensuivirent, après l'obtention du précieux diplôme, cinq années d'études de l'autre côté de la Méditerranée.
Il prit le bateau direction l'Algérie, où il mena à bien des études de droit pour devenir juriste. Il démarra sa carrière professionnelle, loin du voyage, en tant qu'enseignant universitaire à Oran.
"L’université algérienne ne m’ayant pas imposé un rythme soutenu de transmission des connaissances, j’ai mis à profit le temps libéré pour découvrir et apprécier la diversité de cet immense pays, et m’échapper de temps en temps au Maroc voisin.
J’ai pris conscience que la lenteur était une alliée indispensable et que le voyage éveillait simultanément les cinq sens : les senteurs des épices et du jasmin, le rouge des dunes du Tadrart, les premiers bruits de la vie montant au petit matin de la médina de Fès vers la terrasse des Mérinides, la complexité des saveurs d’une harira, le toucher du cuivre juste martelé chez le dinandier," poursuit l'ancien président des Entreprises du Voyage.
Jean-Pierre Mas adepte du pas de côté... parfois très risqué !
La vie (professionnelle) de Jean-Pierre Mas prend un tournant en 1981, quand il rachète l'agence toulousaine Voyages d'Oc.
Après quelques années en tant que professeur de droit, le jeune homme sent que sa carrière doit évoluer : il a besoin de plus d’imprévus et d'une relation plus étroite entre travail et réussite.
Et s'il a appris que ralentir permettait d'aller plus loin, il a décidé d'intégrer cette philosophie dans les voyages qu'il proposait à ses clients.
"Mon activité de créateur de voyages a été imprégnée de ce choix : prendre le temps, mieux voir plutôt que prétendre tout vouloir voir.
La lenteur a pour corollaire la pratique du pas de côté, qui m’a valu quelques aventures dans les années 1980 et 1990.
À Phnom Penh, alors que j’essayais de réserver des billets de train pour Sihanoukville : « Nous ne réservons pas la première voiture. Si la voie est minée, c’est elle qui saute ».
À bicyclette sur le site d’Angkor, les injonctions du guide : « Attention aux mines ! ».
En mer de Chine, le racket virulent – mitraillette appuyée sur le ventre – de gendarmes qui n’avaient pas reçu leur solde.
Au Mexique, la conduite plus qu’improbable sur des routes recouvertes de cendres du Popocatépetl en éruption.
En Chine, dans le comté de Sanjiang, la route emportée par les inondations juste après notre passage… et reconstruite trois jours plus tard," nous raconte-t-il.
Jean-Pierre Mas aurait pun inspirer, la nouvelle ou le film de Ben Stiller, La Vie rêvée de Walter Mitty.
Après quelques années en tant que professeur de droit, le jeune homme sent que sa carrière doit évoluer : il a besoin de plus d’imprévus et d'une relation plus étroite entre travail et réussite.
Et s'il a appris que ralentir permettait d'aller plus loin, il a décidé d'intégrer cette philosophie dans les voyages qu'il proposait à ses clients.
"Mon activité de créateur de voyages a été imprégnée de ce choix : prendre le temps, mieux voir plutôt que prétendre tout vouloir voir.
La lenteur a pour corollaire la pratique du pas de côté, qui m’a valu quelques aventures dans les années 1980 et 1990.
À Phnom Penh, alors que j’essayais de réserver des billets de train pour Sihanoukville : « Nous ne réservons pas la première voiture. Si la voie est minée, c’est elle qui saute ».
À bicyclette sur le site d’Angkor, les injonctions du guide : « Attention aux mines ! ».
En mer de Chine, le racket virulent – mitraillette appuyée sur le ventre – de gendarmes qui n’avaient pas reçu leur solde.
Au Mexique, la conduite plus qu’improbable sur des routes recouvertes de cendres du Popocatépetl en éruption.
En Chine, dans le comté de Sanjiang, la route emportée par les inondations juste après notre passage… et reconstruite trois jours plus tard," nous raconte-t-il.
Jean-Pierre Mas aurait pun inspirer, la nouvelle ou le film de Ben Stiller, La Vie rêvée de Walter Mitty.
"On m’a appris à ne pas voler une photo, mais aussi à la rendre"
Jean-Pierre Mas est à la fois imprudent, chanceux et hypersensible.
S'il est un homme de droit et de lettres, il rêvait plus jeune de devenir journaliste.
C’est aussi une forte tête, un homme de conviction. La personne qui a profondément influencé sa façon de voyager est issue de son entourage proche, mais il aura fallu batailler pour le convaincre de porter un autre regard sur le voyage.
Bien qu'intrépide et grand voyageur, Jean-Pierre Mas s’était fixé quelques principes.
A lire : Histoire des EDV : Jean-Pierre Mas, l'homme qui modernise le syndicat
"Je ne suis pas allé en Afrique du Sud au temps de l’apartheid, je me suis privé de découvrir la Birmanie en raison de la dictature militaire… alors que, n’ayant peur d’aucune contradiction, je voyageais en Chine, en URSS, en Iran et à Cuba sans le moindre état d’âme.
Puis un de mes amis photographe, Raymond Fau, m’a convaincu de l’accompagner à Mandalay.
J’ai compris que cette attitude consistant à refuser de visiter un pays parce qu’on est en désaccord avec sa politique, la situation des femmes ou des minorités, relevait d’un biais intellectuel essentiellement destiné à préserver sa bonne conscience.
En Birmanie, nous sommes allés dans des familles, y avons passé du temps, essayé d’apporter un peu de confort.
Raymond m’a appris à ne pas voler une photo, mais aussi à « rendre une photo ».
Nous n’étions pas encore à l’instantanéité du numérique : restituer une photographie prise l’année précédente donnait lieu à une véritable émotion. « Je t’ai emprunté une part de toi, de ta vie. Aujourd’hui, je te la rends »," confie celui qui est aujourd’hui administrateur de la station de Piau-Engaly.
S'il est un homme de droit et de lettres, il rêvait plus jeune de devenir journaliste.
C’est aussi une forte tête, un homme de conviction. La personne qui a profondément influencé sa façon de voyager est issue de son entourage proche, mais il aura fallu batailler pour le convaincre de porter un autre regard sur le voyage.
Bien qu'intrépide et grand voyageur, Jean-Pierre Mas s’était fixé quelques principes.
A lire : Histoire des EDV : Jean-Pierre Mas, l'homme qui modernise le syndicat
"Je ne suis pas allé en Afrique du Sud au temps de l’apartheid, je me suis privé de découvrir la Birmanie en raison de la dictature militaire… alors que, n’ayant peur d’aucune contradiction, je voyageais en Chine, en URSS, en Iran et à Cuba sans le moindre état d’âme.
Puis un de mes amis photographe, Raymond Fau, m’a convaincu de l’accompagner à Mandalay.
J’ai compris que cette attitude consistant à refuser de visiter un pays parce qu’on est en désaccord avec sa politique, la situation des femmes ou des minorités, relevait d’un biais intellectuel essentiellement destiné à préserver sa bonne conscience.
En Birmanie, nous sommes allés dans des familles, y avons passé du temps, essayé d’apporter un peu de confort.
Raymond m’a appris à ne pas voler une photo, mais aussi à « rendre une photo ».
Nous n’étions pas encore à l’instantanéité du numérique : restituer une photographie prise l’année précédente donnait lieu à une véritable émotion. « Je t’ai emprunté une part de toi, de ta vie. Aujourd’hui, je te la rends »," confie celui qui est aujourd’hui administrateur de la station de Piau-Engaly.
Dans les Cinque Terre "sans voiture, avec le temps pour allié"
Et ce voyageur qui a parcouru le monde n'est pas sans se poser de questions sur le monde actuel et celui qu'il laissera à ses enfants et petits-enfants.
S'il s'inquiète de la fracture sociale qui s'installe dans notre pays, avec de plus en plus de Français dans l'incapacité de s'offrir un moment d'évasion, le sexagénaire craint que l'avenir ne s’assombrisse.
Dans un monde qui se ferme, se complique, il croit aux vertus du voyage, de la rencontre et de la... lenteur.
""Mon dernier voyage, au printemps, s'est déroulé dans le cadre enchanteur des Cinque Terre, avec des amis. Nous avons vadrouillé à pied par les sentiers parfois abrupts, en train et en bateau… sans voiture, avec le temps pour allié.
Et puis, il y a les vacances que je n’assimile pas aux voyages. Je n’aime pas « vaquer », sauf chez moi, sur les hauteurs pyrénéennes ou, exceptionnellement, chez mes amis du Paradis ou de Lakaz Chamarel, à l’île Maurice.
À mes enfants et petits-enfants, j’aimerais inoculer le virus du voyage, de la curiosité et de la découverte des autres.
Pas le voyage Kleenex « j’ai fait Berlin », mais la saveur des itinéraires lents et réfléchis, certainement moins fréquents mais plus longs, dont le plaisir est exacerbé dès leur préparation," conclut-il.
S'il s'inquiète de la fracture sociale qui s'installe dans notre pays, avec de plus en plus de Français dans l'incapacité de s'offrir un moment d'évasion, le sexagénaire craint que l'avenir ne s’assombrisse.
Dans un monde qui se ferme, se complique, il croit aux vertus du voyage, de la rencontre et de la... lenteur.
""Mon dernier voyage, au printemps, s'est déroulé dans le cadre enchanteur des Cinque Terre, avec des amis. Nous avons vadrouillé à pied par les sentiers parfois abrupts, en train et en bateau… sans voiture, avec le temps pour allié.
Et puis, il y a les vacances que je n’assimile pas aux voyages. Je n’aime pas « vaquer », sauf chez moi, sur les hauteurs pyrénéennes ou, exceptionnellement, chez mes amis du Paradis ou de Lakaz Chamarel, à l’île Maurice.
À mes enfants et petits-enfants, j’aimerais inoculer le virus du voyage, de la curiosité et de la découverte des autres.
Pas le voyage Kleenex « j’ai fait Berlin », mais la saveur des itinéraires lents et réfléchis, certainement moins fréquents mais plus longs, dont le plaisir est exacerbé dès leur préparation," conclut-il.
Les autres épisodes de "Voyage et moi"
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