Pénurie de personnel : et si vous recrutiez un senior ? 🔑

C’est une ritournelle… A chaque réforme des retraites, l’emploi des seniors refait surface.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : avec un taux d’emploi des 55-64 ans de 55,9%, la France se situe en-dessous de la moyenne européenne (60,5%).

Dans son projet de réforme, le Gouvernement entend porter l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans à partir de 2030, contre 62 ans actuellement.

Ainsi, à compter du 1er septembre 2023, l'âge légal va être relevé d'un trimestre chaque année pour atteindre 64 ans en 2030.

Quel impact cette réforme aura-t-elle sur l’emploi des seniors ? Pour le gouvernement, reculer l'âge légal de départ à la retraite est l'un des leviers « les plus efficaces » pour améliorer le maintien en emploi des seniors.

D’autant que « le nombre de personnes actives âgées de 55 à 64 ans augmenterait de plus de 100 000 en 2025 et atteindrait 300 000 en 2030 sous l’effet de la réforme », appuie le gouvernement.

Le projet de loi prévoit par ailleurs l’obligation pour toutes les entreprises de plus de 300 salariés, d’ici à juillet 2024, de publier des indicateurs relatifs à leur taux d’emploi de salariés de plus de 55 ans. Cette obligation s’appliquera aux entreprises de plus de 1 000 salariés dès 2023.

L’absence de publication des indicateurs entraînera une sanction.

Le gouvernement pense élargir à terme cette contrainte aux entreprises de plus de 50 ou 60 salariés, a confirmé samedi 4 février 2023 le ministre du Travail, Olivier Dussopt.

Mais comment les recruteurs du tourisme perçoivent-ils ce potentiel de candidats ?

« Il y a dix ans, à travers mon cabinet, une entreprise n’aurait pas embauché quelqu’un de plus de 50 ans. Aujourd’hui, face à la pénurie, les entreprises sont obligées de s’écarter des profils types, de regarder les CV de juniors ou de seniors. Et puis, le senior d’aujourd’hui n’est pas le même que celui- d’il y a dix ans », affirme Frédérik Cousin, à la tête du cabinet de conseils et recrutements Réféa.

Qu’en pensent les professionnels du tourisme ? « Nous recherchons des personnes qui ont envie, au-delà des compétences. Embaucher des personnes de 55 ans est un investissement envisageable », affirme Guy Zekri, directeur général du tour-opérateur Beachcomber Tours.

« Quand je recrute, je me projette sur 3 à 4 ans, alors pourquoi pas embaucher un senior de 60 ans ? », avance Patrice Caradec, patron du TO Alpitour France. « On recherche une personne au SAV, quelqu’un qui sait rédiger, j’ai le sentiment que les seniors ont beaucoup plus de compétences dans ce domaine que les juniors. »

Si l’image du senior a évolué ces dernières années, les préjugés restent tenaces.

« Un profil de plus de 60 ans sera source d’inquiétude pour un recruteur. Il va s’interroger sur sa capacité à s’adapter aux outils digitaux et à s’intégrer dans une équipe plus jeune.

La frontière se situe aujourd’hui à 55 ans », affirme Frédérik Cousin.

Pourtant, les seniors ont de nombreuses qualités et compétences à mettre en avant.

« Leur expérience, exemplarité, capacité à prendre du recul peuvent être bénéfiques. A l’inverse les points de vigilance seront portés sur l’envie et la capacité à suivre le rythme », liste l’expert en recrutement. Et d’ajouter : « Des plus de 55 ans sont plus actifs que certains jeunes ! »

Autre anicroche : bien souvent il est reproché aux seniors leurs prétentions salariales.

« Le problème sera celui du salaire, selon Guy Zekri, de Beachcomber Tours. Vendre des voyages par téléphone sans expérience… On ne peut pas aller au-delà d’un certain salaire. Avec de l’expérience, un agent de réservation est rémunéré 2 500€ bruts. »

Un avis partagé par Frédérik Couisn de Réféa : « En devenant moins gourmands sur la rémunération ou les responsabilités, les seniors pourront plus facilement réintégrer le marché de l’emploi. »

Entre un secteur réputé pour sa faible rémunération et des seniors qui veulent faire valoir leur expérience, il y a encore du pain sur la planche pour pallier aux difficultés de recrutement dans le tourisme.