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La Rochelle : "Faire venir un petit peu moins de monde en haute saison..."

l'interview de Nicolas Martin, le Directeur Général La Rochelle Tourisme et Événements


Arrivé à la Rochelle en fin d'année dernière, après avoir quitté une autre terre du tourisme, le Pays basque, Nicolas Martin a pris ses marques au sein des équipes de l'office du tourisme local. Pour ce fin connaisseur de l'industrie touristique, le secteur ne pourra pas faire les frais d'un débat national sur sa stratégie de développement, après les événements climatiques des derniers mois. Nous revenons avec lui sur les débats d'actualité aussi bien à la Rochelle qu'au niveau national.


Rédigé par le Dimanche 24 Juillet 2022

"La temporalité de l'urgence n'est pas celle de la réglementation française" selon Nicolas Martin de l'OT de la Rochelle
"La temporalité de l'urgence n'est pas celle de la réglementation française" selon Nicolas Martin de l'OT de la Rochelle
TourMaG.com - Vous êtes devenu récemment directeur général de la Rochelle Tourisme et Evénements. Quels sont vos sujets ?

Nicolas Martin :
Nous travaillons à faire évoluer le modèle touristique.

Je n'ai pas d'objectif quantitatif, il ne m'est pas demandé de faire venir plus de monde à La Rochelle, ce n'est pas le sujet. Par contre, notre problématique est de les faire venir différemment, et même de faire venir un petit peu moins en haute saison et davantage en hiver.

Surtout, nous aimerions faire évoluer le comportement des visiteurs, soit en faire venir d'autres qui sont dans une logique de mobilités douces.

Nous travaillons pour que les vélos, les autocars, les bateaux remplacent les avions.

Nous ne voulons pas être incantatoires, ni donneurs de leçons, mais l'objectif est de modifier doucement les comportements des visiteurs sur le territoire par rapport à la ressource en eau, la production de déchets, etc.

L'enjeu est de faire en sorte que l'empreinte des touristes et des territoires soit la plus discrète possible, en limitant les impacts négatifs et optimiser les impacts positifs.

Objectif : "faire bénéficier du tourisme les villes autour de la Rochelle"

TourMaG.com - Comment arriver à faire pivoter le tourisme de cette manière ?

Nicolas Martin :
Cela passe par la rencontre avec les habitants, l'économie. La Rochelle n'est pas une station balnéaire, mais une ville au bord de la mer.

Nous sommes à la croisée de plusieurs formes de tourisme : balnéaire, affaires et urbain.

Cette offre est une richesse, tout en ayant une importante zone de chalandise. Réduire l'empreinte carbone passera par les modes de transports à destination, mais aussi par un allongement des séjours.

Nous avons beaucoup d'excursionnistes à la journée, qui viennent en voiture. Nous aimerions qu'ils restent plus longtemps, pour découvrir la ville et son environnement.

Cette volonté doit permettre de diluer les flux et en faire bénéficier les villes autour de la Rochelle. C'est peu le cas aujourd'hui.

TourMaG.com - Comment est-il possible d'influer sur la mobilité des voyageurs ? Alors que dans le même temps Ryanair a ouvert, il y a peu une ligne La Rochelle-Marseille, et qu'il est très difficile d'aller de l'est à l'ouest en train.

Nicolas Martin :
La priorité pour décarboner, c'est de cibler les clientèles de proximité.

Celles-ci ne viennent pas en avion. Puis de cibler les potentiels touristes qui peuvent venir en train, comme Paris, Bordeaux ou Nantes et, pour finir, de privilégier les séjours longs.

Les touristes qui viennent en avion ne doivent pas venir seulement pour un week-end. D'une manière générale, nous ne communiquons pas sur ce genre d'ouverture de lignes.

Elles existent, mais nous ne sommes pas dans une logique d'inciter au développement du trafic aérien, sauf cas exceptionnel. A la Rochelle, nous sommes dans une logique de replacer la ville dans un environnement élargi, dans un rayon de 1h30, avec le Marais poitevin.

La décarbonation passe par le transport, nous travaillons dessus, avec pour objectif de proposer des excursions en bus électrique, autour de la ville.

"Le sujet n'est pas d'arrêter l'aérien, mais de trouver des lignes annuelles"

TourMaG.com - Vous n'avez aucun pouvoir sur les transports ?

Nicolas Martin :
Nous touchons aux limites de l'exercice consistant à inciter les visiteurs à venir en train, et de tout faire à pied.

Ils ne peuvent pas ou difficilement explorer les alentours de la Rochelle et c'est valable dans de nombreuses villes. Je n'ai pas la prétention de vouloir faire émerger des lignes d'autocar régulières sur le territoire, ce sont les compétences de la région et de la SNCF sur les TER.

Nous allons expérimenter les solutions à notre échelle, avant de voir plus loin.

TourMaG.com - Vous échangez avec la direction de l'aéroport de la Rochelle ou la SNCF, sur le sujet du maillage du territoire ?

Nicolas Martin :
Oui, j'ai aussi des échanges réguliers avec le port, sur la problématique des croisières.

Evidemment nous avons des discussions avec l'aéroport.

Le sujet n'est pas d'arrêter l'aérien, c'est un levier de développement économique et de désenclavement. En revanche nous devons aider l'aéroport à trouver des lignes annuelles et non saisonnières.

Et des liaisons qui ont des potentiels aussi bien à l'import qu'à l'export, donc vers des bassins émetteurs et économiques. Concrètement, en ce qui me concerne, il est intéressant d'avoir des vols vers Genève, Londres et Bruxelles, plutôt que Djerba ou Porto.

Nous ne mobilisons pas pour ce genre de lignes, ni pour celles vers des villes anglaises qui existent 2 mois dans l'année.

Nous ne ciblons que quelques lignes, car nous n'avons pas de logique de développement à tout va. Ce n'est pas évident notamment avec les compagnies low cost qui ciblent l'été les destinations soleil et l'hiver celles montagne.

Nous devons mieux sensibiliser les professionnels sur les nouveaux enjeux"

TourMaG.com - Au sujet de la communication, vous avez des enjeux pour l'été ? A Marseille, le démarketing est devenu une réalité.

Nicolas Martin :
Le démarketing, nous n'en sommes pas là, mais nous y sommes attentifs.

Cela pourrait devenir un sujet dans les années à venir. Le sujet avant d'en arriver au démarketing, c'est de réduire l'empreinte du tourisme sur le territoire.

La particularité de l'Office de Tourisme de la Rochelle est qu'il gère les espaces de congrès, nous allons essayer de créer des évènements l'hiver pour dynamiser la fréquentation à cette période.

TourMaG.com - Sur la côte Atlantique, des villes connaissent des tensions entre les populations locales et les touristes. Connaissez-vous aussi ce phénomène à la Rochelle ?

Nicolas Martin :
Non, il n'y a pas de rejet massif, mais nous devons être extrêmement vigilants.

Nous connaissons des problèmes avec le prix de l'immobilier.

Le tourisme contribue à ce phénomène.
Avec le covid, de nombreuses personnes sont venues s'installer à la Rochelle. Comme à Biarritz, le tourisme contribue à ces tensions. La clé d'un développement touristique sain est l'acceptabilité par les habitants.

Ils doivent avoir le sentiment qu'ils ont plus à y gagner qu'à y perdre.

TourMaG.com - Ces derniers jours la Nouvelle Aquitaine connait des incendies monstres. Quels enseignements l'industrie touristique doit-elle tirer ?

Nicolas Martin :
Il y a un point sur la densité.

Plus nous concentrons les installations touristiques à un endroit, plus nous avons des réactions en cascades. Nous devons mieux répartir les flux.

Globalement, le covid a amplifié une tendance : l'espace. Les populations ont besoin d'une plus grande connexion avec la nature et de perspectives. Ces évènements vont renforcer cette attente, nous devons, nous professionnels du tourisme, proposer des produits différents.

En tant que président de la MONA, nous devons mieux sensibiliser les professionnels sur ces nouveaux enjeux. Ils ont la main, pas nous.

"La temporalité de l'urgence (climatique) n'est pas celle de la réglementation française"

TourMaG.com - Pour justement mieux répartir les flux, les installations touristiques, avoir une vision du tourisme allant au-delà des saisons estivales, ne faut-il pas un grand débat public sur la question de la stratégie touristique nationale ?

Nicolas Martin :
C'est un vrai sujet, une réflexion doit avoir lieu.

Elle a lieu au niveau local, avec notamment les plans locaux d'urbanisme. La complexité étant que dans les zones concernées le tourisme est un poumon économique, il n'est pas simple de dire : nous allons réduire la voilure.

Ce sont des sujets complexes qui touchent aux règles d'urbanisme, d'environnement, les ressources en eau, le transport, l'économie... Et comme il touche à beaucoup de secteurs, il y a beaucoup d'inertie.

Vous rajoutez que le processus de décision dans la sphère politique est très long. La temporalité de l'urgence n'est pas celle de la réglementation française.

Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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