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Tourisme durable : faut-il des quotas pour préserver les sites touristiques ?

Enquête publiée dans le magazine de TourMaG.com pour l'IFTM 2017


Protéger à la fois le patrimoine, la libre circulation des touristes et les droits des populations, tel est le défi que notre siècle doit relever. De nouveaux axes pour le tourisme d’aujourd’hui et de demain se profilent à l’horizon.


Rédigé par Aurélie RESCH le Dimanche 8 Octobre 2017

La détérioration de monuments est effectivement due à plusieurs facteurs et pour freiner une érosion tant des sites que des cultures, des mesures draconiennes sont prises vis-à-vis des touristes - DR
La détérioration de monuments est effectivement due à plusieurs facteurs et pour freiner une érosion tant des sites que des cultures, des mesures draconiennes sont prises vis-à-vis des touristes - DR
Des centres-villes saturés, des échafaudages rongeant les flancs de sites touristiques majeurs - comme les pyramides -, des îles paradisiaques fermées au tourisme… Ces images effraient, et les mesures toujours plus nombreuses pour préserver le patrimoine mondial font craindre une mutation profonde dans le tourisme de masse.

Nos semblables voyagent de plus en plus, et partent de plus en plus nombreux. Cela a forcément un impact sur l’environnement en général et la préservation des sites visités, en particulier.

Le bénéfice tiré de l’économie touristique incite gouvernements, organismes et professionnels du voyage à attirer une clientèle toujours plus large sur les destinations qu’ils promeuvent, au détriment des conditions de vie des populations locales et cela à long terme.

Christian Orofino, co-président de l’Observatoire géopolitique écotouristique (Obget), se désole, par exemple, de voir l’Unesco labelliser des sites sans avoir pensé au préalable, en concertation avec les autorités locales, à une stratégie d’accueil.

« Des sites se dégradent avec l’arrivée en masse de touristes, surtout s’ils ne se sont pas préparés à ce soudain bouleversement. Prenez le temple d’Angkor au Cambodge : il n’était absolument pas visité jusque dans les années 80, absolument pas visité.

Après son classement au patrimoine mondial de l’Unesco en 1992, il a attiré 60 000 visiteurs en 1999, 250 000 en 2001 et 3 millions de visiteurs en 2011.

Cela a eu un grave retentissement sur le monument, la pollution avec les nouveaux axes de circulation construits à la va-vite et la corruption dans la population.

On observe le même triste phénomène à Yuanyang (en Chine) avec les rizières en terrasse et dans de très nombreux autres sites. On pourrait mieux protéger ces lieux, en anticipant.
»

Quotas et fermetures temporaires de certains sites

La détérioration de monuments est effectivement due à plusieurs facteurs et pour freiner une érosion tant des sites que des cultures, des mesures draconiennes sont prises vis-à-vis des touristes.

Une partie du site de Pompéi est fermé au public ; les îles Similan en Thaïlande sont temporairement interdites au tourisme ; les sites archéologiques mayas ne peuvent plus se gravir à même la pierre, mais sont accessibles via des échafaudages ; un quota de visiteurs est imposé en Antarctique et aux Galapagos ; le centre-ville de Barcelone est fermé aux groupes de plus de 50 personnes…

Autant de barrières qu’on aurait pu éviter en préparant l’accès aux touristes ? « Il y a des choses qui se prévoient, qui se mettent en place et qui permettent de protéger des lieux, des cultures ou tout du moins de freiner leur altération. Il faut aussi éduquer les gens. Les touristes ne sont pas chez eux ailleurs. Il faut qu’ils respectent les lieux visités, les coutumes et les cultures », ajoute Christian Orofino.

Pour sensibiliser les foules, certains tour-opérateurs et croisiéristes (Salaün Holidays, CroisiEurope) organisent pour leurs clients lors de leur séjour, des visites d’écoles, d’orphelinats, d’ateliers de rénovation de céramiques dans les communautés visitées.

D’autres (Village Monde, Vision du monde) proposent aux voyageurs de prendre part à une activité communautaire, écologique ou encore de vivre chez l’habitant afin qu’ils se sentent impliqués dans leur action à l’étranger lorsqu’ils voyagent.

Changer les mentalités des grands opérateurs

Christian Orofino, co-président de l’Observatoire géopolitique écotouristique (Obget) - DR
Christian Orofino, co-président de l’Observatoire géopolitique écotouristique (Obget) - DR
Guillaume Cromer, directeur gérant d’ID-Tourism et consultant sur des actions en faveur d’un tourisme durable est catégorique : « il faut absolument responsabiliser les professionnels du voyage comme TUI, Club Med ou Transat pour travailler à changer les mentalités en faveur d’un tourisme durable, ce qui peut s’avérer compliqué étant donné que l’économie prime toujours. »

Afin de changer les mœurs et de faire évoluer le tourisme vers une conscience collective de notre environnement, des mesures incitatives sont instaurées, comme les « Palmes du tourisme durable », dont la 1ère édition récompense les professionnels du voyage ayant récemment mis en place des actions concrètes pour préserver l’environnement et favoriser le contact avec les populations locales.

« En fait, seuls les voyageurs, comme les routards, qui sont dans la spontanéité ou les touristes ayant un agenda serré les empêchant d’anticiper ou d’aborder une certaine souplesse peuvent se sentir frustrés.

On observe à l’inverse une compréhension et un renforcement d’intérêt pour le reste des voyageurs vers ces destinations
», assure Guillaume Cromer.

« Les gens préfèrent visiter un site qui n’est pas massivement envahi par le tourisme ou retourner sur un lieu dont le patrimoine a su être préservé, quand ils ne font pas de lieux protégés leur must do dans une vie ».

Les mesures protectionnistes, une solution ?

« Nombre de ces restrictions protectionnistes impactent davantage la population locale. Il est impératif que les prochaines actions de protection du patrimoine soient menées en concertation avec les locaux », remarque Julien Buot, directeur de l’association Agir pour un Tourisme Responsable.

Il pense notamment aux Maasaï qui ont dû être repoussés plus loin sur leurs terres parce qu’ils interféraient avec la faune que venaient observer les visiteurs, ou aux pêcheurs tanzaniens interdits un certain temps de cette activité pour préserver la faune d’un parc national marin protégé.

Alors quid des solutions pour éviter les frustrations de part et d’autre et pour participer à la préservation de sites ? Plusieurs pistes sont à explorer pourvu que l’on accepte de changer les choses.

Julien Buot pense à des modes de voyages alternatifs qui désaisonnalisent le tourisme, qui répartissent les voyageurs sur un lieu sur toute une journée ou sur l’année.

« Il faut pour cela repenser l’offre et présenter aux touristes les avantages de visiter un site au lever ou au coucher du soleil plutôt que durant la journée. Parler des manifestations qui se tiennent dans certaines villes durant l’automne et l’hiver, mettre en avant l’attractivité de l’arrière-pays versus le littoral ou encore déconcentrer l’espace en présentant en alternative d’autres sites archéologiques voisins d’intérêt, ouvrir de nouvelles destinations… »

Ce décloisonnement permettrait de désaturer les régions et sites aujourd’hui engorgés et en danger et de répartir l’intérêt touristique sur l’ensemble des destinations et sur les différentes périodes de l’année, œuvrant ainsi à toujours nourrir la curiosité du voyageur tout en préservant l’authenticité d’un lieu, d’une culture et d’un savoir-faire.

Retrouvez cet article et l'ensemble de notre magazine 2017, intitulé "Nouvelles frontières, nouveaux défis", en ligne en cliquant sur ce lien.

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