"Ce système de la Zone euro ne peut pas perdurer. Nous devons la repenser, en créant deux périmètres distincts" selon Marc Touati - Crédit photo : Depositphotos @rfphoto
TourMaG - Après "Reset, quel nouveau monde pour demain ?" vous sortez le 1er septembre 2022 la suite de ce livre. Quel est le synopsis de votre nouvel ouvrage "Reset II, bienvenue dans le monde d'après" ?
Marc Touati : Nous aurions pu escompter après le coronavirus, repartir sur de nouvelles bases, plus saines, d'où le titre "reset".
Avec la pandémie nous avons bien appuyé sur ce fameux bouton reset, sauf que la situation économique est pire qu'avant. La dette publique a flambé.
Il faut remonter au début des années 80 pour trouver une inflation aussi élevée, et nous n'avons plus de marge de manœuvre pour relancer la machine.
Le constat est plutôt sombre, malgré tout dans le livre, je propose une fin alternative.
Nous avons le choix du courage politique pour sortir par le haut de cette crise, mais aussi de continuer la fuite en avant. Pour le moment, nous restons bloqués sur ce 2e scénario.
Si nous ne bifurquons pas, nous pouvons aller jusqu'à la fin de la zone euro et connaître des évolutions extrêmement dangereuses.
Marc Touati : Nous aurions pu escompter après le coronavirus, repartir sur de nouvelles bases, plus saines, d'où le titre "reset".
Avec la pandémie nous avons bien appuyé sur ce fameux bouton reset, sauf que la situation économique est pire qu'avant. La dette publique a flambé.
Il faut remonter au début des années 80 pour trouver une inflation aussi élevée, et nous n'avons plus de marge de manœuvre pour relancer la machine.
Le constat est plutôt sombre, malgré tout dans le livre, je propose une fin alternative.
Nous avons le choix du courage politique pour sortir par le haut de cette crise, mais aussi de continuer la fuite en avant. Pour le moment, nous restons bloqués sur ce 2e scénario.
Si nous ne bifurquons pas, nous pouvons aller jusqu'à la fin de la zone euro et connaître des évolutions extrêmement dangereuses.
Vers la fin de la zone euro ? "C'est le vrai danger"
TourMaG - En effet, le tableau est noir. Pourquoi selon vous, en sommes-nous arrivés là ?
Marc Touati : La pandémie a été économiquement très mal gérée.
Autant en mars 2020, au début de la crise sanitaire, l'Etat n'avait pas vraiment le choix que d'aider les entreprises et les Français, autant en 2021 le gouvernement aurait pu arrêter cela.
Nous avons habitué l'économie et la société à vivre des aides. Les perfusions ont augmenté la dette publique de façon démesurée, c'est ce qui a entraîné l'inflation que nous connaissons.
La hausse des prix n'est pas une résultante de la guerre en Ukraine. Elle provient des erreurs des politiques économiques et monétaires, en maintenant la planche à billets.
Encore aujourd'hui, la BCE n'arrive plus Ă stopper la baisse de l'Euro. Une situation qui aggrave l'inflation et la situation Ă©conomique de la zone euro.
TourMaG - Sans reprise de contrĂ´le de la monnaie et de la dette publique... pourrions-nous voir la fin de la zone euro ?
Marc Touati : C'est le vrai danger, Ă l'heure actuelle.
Faisons un rapide état des lieux : la Chine a ralenti, mais ne s'en sort pas si mal en battant même des records d'excédents commerciaux. Or, nous n'avons rien compris, puisque ous achetons encore davantage à la Chine que par le passé.
L'économie américaine reste hors d'eau grâce au dollar, une monnaie forte. Même la Russie donnée comme morte, en raison des sanctions occidentales, réalise des excédents commerciaux monstres, car la hausse généralisée des cours des matières premières soutient l'économie russe.
"La zone euro et la BCE ont un problème de crédibilité"
TourMaG - En effet, chaque pays a son propre ministère de l'Economie et sa vision personnelle du problème. Aurions-nous dû aller plus loin ?
Marc Touati : La zone euro aurait dû être une zone monétaire optimale, composée seulement de pays économiquement proches.
Avec cette crise les liens se sont distendus et les divergences accrues. Prenez tout simplement les 2 Ă©conomies de l'Europe. En France la dette publique est de 120% du PIB alors qu'en Allemagne elle se maintient Ă 70%.
Nous ne pouvons plus continuer à avancer avec des visions différentes. De plus, l'Italie s'installe dans la crise. Il existe un risque de voir, de l'autre côté des Alpes, surgir un gouvernement europhobe à la tête du pays.
Les dirigeants potentiels aimeraient supprimer une partie de la dette publique italienne, c'est extrêmement dangereux. Nous parlons là de la 3e économie de la zone euro. Ce cas ne sera pas gérable comme l'a été la crise grecque.
TourMaG - Aurions dû nous mettre tous ces pays sous la tutelle d'un unique ministère de l'Economie ?
Marc Touati : Nous devons faire un choix.
La zone euro n'a de sens que si elle est intégrée politiquement, économiquement et financièrement. Ce n'est pas le cas. Nous avons voulu faire une zone euro beaucoup trop large.
La Croatie va bientôt y entrer, mais est-ce que le pays peut supporter les règles de la politique monétaire de la zone euro ?
Dans mon livre j'émets l'idée que ce système ne peut perdurer. Nous devons la repenser, en créant deux périmètres distincts.
Tout en haut, nous pourrions trouver une zone euro, avec des règles qui seront respectées, un budget fédéral, une Europe politique. Puis à côté, il y aurait d'autres pays ne pouvant pas supporter ces règles, faute de moyens.
C'est l'erreur que fait la BCE aujourd'hui : les pays voyant leurs taux d'intérêt augmenter pour financer leurs dettes publiques, la Banque Centrale se dit prête à ressortir la planche à billets. Ce n'est plus possible : nous devons revenir à une certaine normalité.
La zone euro et la BCE ont un problème de crédibilité.
Marc Touati : La zone euro aurait dû être une zone monétaire optimale, composée seulement de pays économiquement proches.
Avec cette crise les liens se sont distendus et les divergences accrues. Prenez tout simplement les 2 Ă©conomies de l'Europe. En France la dette publique est de 120% du PIB alors qu'en Allemagne elle se maintient Ă 70%.
Nous ne pouvons plus continuer à avancer avec des visions différentes. De plus, l'Italie s'installe dans la crise. Il existe un risque de voir, de l'autre côté des Alpes, surgir un gouvernement europhobe à la tête du pays.
Les dirigeants potentiels aimeraient supprimer une partie de la dette publique italienne, c'est extrêmement dangereux. Nous parlons là de la 3e économie de la zone euro. Ce cas ne sera pas gérable comme l'a été la crise grecque.
TourMaG - Aurions dû nous mettre tous ces pays sous la tutelle d'un unique ministère de l'Economie ?
Marc Touati : Nous devons faire un choix.
La zone euro n'a de sens que si elle est intégrée politiquement, économiquement et financièrement. Ce n'est pas le cas. Nous avons voulu faire une zone euro beaucoup trop large.
La Croatie va bientôt y entrer, mais est-ce que le pays peut supporter les règles de la politique monétaire de la zone euro ?
Dans mon livre j'émets l'idée que ce système ne peut perdurer. Nous devons la repenser, en créant deux périmètres distincts.
Tout en haut, nous pourrions trouver une zone euro, avec des règles qui seront respectées, un budget fédéral, une Europe politique. Puis à côté, il y aurait d'autres pays ne pouvant pas supporter ces règles, faute de moyens.
C'est l'erreur que fait la BCE aujourd'hui : les pays voyant leurs taux d'intérêt augmenter pour financer leurs dettes publiques, la Banque Centrale se dit prête à ressortir la planche à billets. Ce n'est plus possible : nous devons revenir à une certaine normalité.
La zone euro et la BCE ont un problème de crédibilité.
Fin de l'abondance : "Le discours de Macron est dangereux"
TourMaG - Le retour à la normalité peut faire très mal...
Marc Touati : Bien sûr, c'est tout le problème.
Nous sommes des toxicomanes habitués à des drogues dures. Pour nous sevrer, il faudra se faire mal. Le gouvernement doit dire la vérité aux Français. Aucun pays ne sort facilement d'une phase de forte inflation, comme nous connaissons aujourd'hui.
Le risque étant que nous entrions en récession. Si nous augmentons la dette et les salaires, nous allons alimenter la hausse des prix. C'est l'erreur de Mitterrand en 1981, en indexant les salaires sur les prix de la consommation.
Derrière, nous avions une inflation de 14,5% en France, notre pic historique. Pour inverser la spirale, nous sommes entrées dans une politique d'austérité.
TourMaG - En quoi la gestion de la crise n'a pas été bonne ?
Marc Touati : Nous n'avons pas su prendre le taureau par les cornes et regarder la réalité en face. Nous avons pratiqué une fuite en avant.
Nous sommes restés dans une posture facile, en laissant filer la dette publique. La Banque Centrale Européenne (BCE) devait financer ces errements, sauf que ce n'est plus possible. Du fait de ce financement de la dette publique, la BCE a alimenté l'inflation.
Nous avons donc créé une demande supérieure à l'offre et voilà , où nous en sommes, bien avant la guerre en Ukraine. Du fait de la hausse des prix, la BCE ne peut plus financer la dette publique, comme par le passé.
Les pays doivent maintenant trouver des moyens de la financer, donc avec des taux d'intérêt qui augmentent, ce qui casse l'activité économique.
Nous sommes dans un cercle pernicieux. Nous sommes de retour dans le vrai monde.
Marc Touati : Bien sûr, c'est tout le problème.
Nous sommes des toxicomanes habitués à des drogues dures. Pour nous sevrer, il faudra se faire mal. Le gouvernement doit dire la vérité aux Français. Aucun pays ne sort facilement d'une phase de forte inflation, comme nous connaissons aujourd'hui.
Le risque étant que nous entrions en récession. Si nous augmentons la dette et les salaires, nous allons alimenter la hausse des prix. C'est l'erreur de Mitterrand en 1981, en indexant les salaires sur les prix de la consommation.
Derrière, nous avions une inflation de 14,5% en France, notre pic historique. Pour inverser la spirale, nous sommes entrées dans une politique d'austérité.
TourMaG - En quoi la gestion de la crise n'a pas été bonne ?
Marc Touati : Nous n'avons pas su prendre le taureau par les cornes et regarder la réalité en face. Nous avons pratiqué une fuite en avant.
Nous sommes restés dans une posture facile, en laissant filer la dette publique. La Banque Centrale Européenne (BCE) devait financer ces errements, sauf que ce n'est plus possible. Du fait de ce financement de la dette publique, la BCE a alimenté l'inflation.
Nous avons donc créé une demande supérieure à l'offre et voilà , où nous en sommes, bien avant la guerre en Ukraine. Du fait de la hausse des prix, la BCE ne peut plus financer la dette publique, comme par le passé.
Les pays doivent maintenant trouver des moyens de la financer, donc avec des taux d'intérêt qui augmentent, ce qui casse l'activité économique.
Nous sommes dans un cercle pernicieux. Nous sommes de retour dans le vrai monde.
"La baisse de l'euro peut durer, surtout en cas de crise en Italie"
TourMaG - Dans le voyage, beaucoup de choses sont payées en dollars, notamment dans l'aérien et l'hébergement. Comment expliquez-vous cette baisse de l'euro vis-à -vis du billet vert, au-delà de la perte de confiance des marchés financiers ?
Marc Touati : Tout d'abord, il y a une différence de politique monétaire entre les Etats-Unis et la zone euro.
Les Américains ont remonté leurs taux d'intérêt monétaires, pour lutter contre l'inflation. Le coût de l'argent est à 2,5%, alors qu'il est de 0,5% en Europe. Cet écart de 2 points, sans risque, fait que de nombreux investisseurs s'engouffrent dans la brèche.
Ils s'endettent en euros, puis placent en dollars.
Le deuxième point : la récession dans la zone euro. N'ayant plus beaucoup de marge de manœuvre, la contraction de l'économie peut durer.
La troisième raison réside, dans le risque de crise politique et existentielle de notre zone euro. S'il n'y a aucun doute sur la pérennité des USA dans le temps, ce qui n'est pas le cas pour l'Euro et l'Union Européenne.
Personne ne peut dire que dans 10 ans et en l'état, la zone euro sera toujours là . La monnaie repose sur la confiance, c'est tout le danger. Voilà pourquoi l'euro baisse et cela peut durer, tant que nous n'avons pas inversé la tendance.
La BCE va augmenter les taux, mais notre monnaie peut continuer de baisser, surtout en cas de crise en Italie.
Marc Touati : Tout d'abord, il y a une différence de politique monétaire entre les Etats-Unis et la zone euro.
Les Américains ont remonté leurs taux d'intérêt monétaires, pour lutter contre l'inflation. Le coût de l'argent est à 2,5%, alors qu'il est de 0,5% en Europe. Cet écart de 2 points, sans risque, fait que de nombreux investisseurs s'engouffrent dans la brèche.
Ils s'endettent en euros, puis placent en dollars.
Le deuxième point : la récession dans la zone euro. N'ayant plus beaucoup de marge de manœuvre, la contraction de l'économie peut durer.
La troisième raison réside, dans le risque de crise politique et existentielle de notre zone euro. S'il n'y a aucun doute sur la pérennité des USA dans le temps, ce qui n'est pas le cas pour l'Euro et l'Union Européenne.
Personne ne peut dire que dans 10 ans et en l'état, la zone euro sera toujours là . La monnaie repose sur la confiance, c'est tout le danger. Voilà pourquoi l'euro baisse et cela peut durer, tant que nous n'avons pas inversé la tendance.
La BCE va augmenter les taux, mais notre monnaie peut continuer de baisser, surtout en cas de crise en Italie.
Biographie de Marc Touati :
Marc Touati est le fondateur du cabinet ACDEFI. Un cabinet de conseil et de formation économique et financier indépendant au service des entreprises et des professionnels.
ACDEFI possède un catalogue composé de plus de 1 500 clients.
Il est aussi un économiste reconnu pour ses ouvrages, dont quelques best sellers dans le domaine, dont "Le dictionnaire terrifiant de la dette" en 2013, réédité et passé en édition poche en 2015, puis "Guérir la France La thérapie de choc" en 2015, qui a reçu le "Prix du livre d’actualité 2015" décerné par le Cercle de l’Excellence RH.
Marc Touati anime aussi une chaine Youtube de vulgarisation des sujets Ă©conomiques.
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ACDEFI possède un catalogue composé de plus de 1 500 clients.
Il est aussi un économiste reconnu pour ses ouvrages, dont quelques best sellers dans le domaine, dont "Le dictionnaire terrifiant de la dette" en 2013, réédité et passé en édition poche en 2015, puis "Guérir la France La thérapie de choc" en 2015, qui a reçu le "Prix du livre d’actualité 2015" décerné par le Cercle de l’Excellence RH.
Marc Touati anime aussi une chaine Youtube de vulgarisation des sujets Ă©conomiques.
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Publié par Romain Pommier
