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Sommet France : "Que feront Airbnb et les autres, pour rendre le tourisme durable ?" 🔑

Retour sur le Sommet Destination France et ses annonces


Jusqu'à la veille, personne (excepté les lecteurs de TourMaG.com) n'avait entendu parler du Sommet Destination France. Depuis jeudi dernier, tout le microcosme touristique ne parle que de ça. Entre le discours volontariste du Président de la République et les participants au premier rang desquels les mastodontes de l'industrie et les annonces, le voile se lève sur ce premier sommet. Si pour Didier Arino, directeur général de Protourisme la France doit se tourner vers une véritable stratégie touristique, pour Jean Pinard, le directeur du CRT Occitanie et Damien Duval, le directeur général de Cap France, il y a aussi quelques importants ajustements à faire.


Rédigé par le Dimanche 7 Novembre 2021

"Si vous regardez, au-delà des aides de l'Etat, ce qui a fait que l'industrie a tenu depuis deux ans, c'est le marché intérieur," selon Damien Duval le DG de Cap France - DR
"Si vous regardez, au-delà des aides de l'Etat, ce qui a fait que l'industrie a tenu depuis deux ans, c'est le marché intérieur," selon Damien Duval le DG de Cap France - DR
En l'espace de seulement quelques heures, le Sommet Destination France est devenu LE sujet de l'industrie.

"Je trouve que c'est une bonne chose pour le tourisme.

Il n'y a pas de déception (à la non-invitation, ndlr) car le tourisme est une équation complexe visant à répondre à la fois à un marché intérieur, à celui émetteur, le tout dans un contexte sans clientèle internationale depuis 2 ans,
" tempère Damien Duval, le directeur général de Cap France.


"Airbnb et les autres, ils vont faire quoi pour rendre le tourisme plus durable ?"



Bien que non invité, contrairement à certains concurrents plus visibles et reconnus, pas de frustration, mais plutôt des interrogations, à la lecture des voeux du président de la République.

Lire aussi :
Sommet France : "S'appuyer sur les territoires pour bâtir un plan stratégique" (D. Arino)

Malgré tout un point a perturbé le responsable, à l'instar d'autres acteurs du tourisme.

"L'objectif de devenir une destination durable en 2030, cela m'interpelle voire même me fait un peu rire. Le Gouvernement débat autour du durable, mais en même temps, s'adresse uniquement à la clientèle internationale et ne parle que de mono-saison avec l'été ou l'hiver.

Pour moi c'est incompatible avec le développement durable.
"

D'ailleurs vendredi matin, Jean-Baptiste Lemoyne, Secrétaire d'Etat en charge du tourisme, remet en avant l'objectif qualitatif plutôt que quantitatif. La France ne viserait plus les 100 millions de visiteurs, mais plutôt un panier moyen gonflé.

A de très rares moments, les voyageurs français ont été cités dans la stratégie 2030 du Gouvernement.

D'ailleurs en quoi consiste la notion de développement durable ?

"Pour moi, si vous parlez durable, vous parlez local. C'est donc parler aux destinations, aux territoires et aux indépendants, car nous pouvons aussi avoir notre mot à dire."

Et comme aime à le rappeler Jean-Baptiste Lemoyne, le Sommet Destination France a vocation à s'ancrer durablement dans le paysage politique comme peut l'être Choose France.

Un autre événement composé de multinationales. Pour un autre militant d'un tourisme local et plus social, Jean Pinard, il n'est pas question de dénigrer l'événement, mais d'en montrer les angles morts.

A commencer par l'absence des destinations touristiques françaises, qui réclament à tour de rôle, une stratégie pour le secteur.

"Ce qui me désespère, c’est ce manque de culture coopérative.

Bien sûr que les régions et les offices du tourisme auraient dû être invités, car Airbnb et les autres, ils vont faire quoi pour rendre le tourisme plus durable ?,
" interpelle Jean Pinard.

Pour expliquer l'absence des collectivités, le secrétaire d'Etat a précisé que le Sommet Destination France était orienté "très business". Circulez, il n'y a rien à voir pour les CRT, ADT et autres agences d'attractivités qui pourtant investissent et maillent notre industrie.

"Ce qui a fait que l'industrie a tenu depuis deux ans, c'est le marché intérieur"

Vous n'entendrez jamais aucun chef d'entreprise critiquer le soutien précieux du Gouvernement, ni même l'investissement de Jean-Baptiste Lemoyne. L'Etat a en effet été présent tout au long de la crise.

Mais, bien sûr il y a un mais : l'exécutif oublie parfois que le tourisme en France existe essentiellement par et pour... les Français.

"Si vous regardez, au-delà des aides de l'Etat, ce qui a fait que l'industrie a tenu depuis deux ans, c'est le marché intérieur.

Tout l'enjeu pour moi est de maintenir le niveau de fréquentation franco-française sur notre territoire,
" recentre Damien Duval. Là-dessus pas de réponse, ni de réflexion.

Le patron de Cap France craint une désertion du pays, tirée par des tarifs aériens cassés, une fois les frontières complètement ouvertes.

Et Jean Pinard de lui emboîter le pas.

"Est-il possible en « même temps » de vouloir 90 millions de touristes et d'être durable ? le durable, c’est aussi le social, et là on fait quoi ? Les objectifs et les ambitions sont intéressants, mais concrètement nous faisons quoi ?"

D'après Jean-Baptiste Lemoyne, le plan de reconquête du tourisme serait en bonne voie et le Sommet participera aux arbitrages de la stratégie nationale.

En attendant, les professionnels ont toujours l'impression que le secteur navigue à vue.

"Il faut arrêter de dire que nous souhaitons être premiers partout. J'aimerais savoir sur quels indicateurs nous nous basons pour dire cela. Ce qu'il faut mesurer ce sont les efforts que nous faisons. La comparaison ne sert à rien.

Si nous voulons être meilleurs, alors nous devons nous concentrer les efforts sur les transports,
" lâche le directeur du CRT d'Occitanie.

Pour lui, le Gouvernement doit investir dans le ferroviaire, en baissant le prix des billets. Il devrait aussi dégager des marges en demandant aux concessionnaires autoroutiers de contribuer au rayonnement des destinations.

Pendant que les hébergeurs reversent une taxe de séjour, les Vinci et autres ne sortent pas un euro de leur poche, tout en profitant des envies de dépaysements des Français et des Européens.

Surtout, il sera indispensable de financer la transition de l'industrie touristique.

"La stratégie de la Caisse des Dépôts est dans une logique de concentration"

Ce n'est pas tout.

Alors que les grands patrons et autres pontes du tourisme se sont rendus à l'Elysée, une nouvelle fois, c'est une bonne chose pour le tourisme, les petites entreprises étaient assez sous-représentées.

Rappelons que le tissu économique est constitué à 80% de TPE selon Atout France. A trop céder aux sirènes des grands groupes, notre pays en oublierait presque ce qu'est la réalité de notre industrie.

Au sujet des investissements et de la remise à niveau des infrastructures touristiques, il s'en remettra sans doute à la Caisse des Dépôts. Une bien mauvaise nouvelle pour les TPE et PME, pense savoir le patron de Cap France.

"La stratégie de la Caisse des Dépôts est dans une logique de concentration, de créer des mastodontes. J'aimerais qu'elle ait un regard bienveillant sur ce que j'appelle les petits dossiers de quelques millions d'euros ou moins," espère Damien Duval.

L'enjeu étant de maintenir le maillage d'indépendants en France, notamment dans l'hôtellerie, pour éviter la dépendance aux fonds d'investissement.

D'autant plus que les petits hôtels sont eux aussi à même de porter la voix de la durabilité du secteur, même davantage que certains grands groupes plus dépendants des clientèles étrangères long-courriers.

"Le premier investissement pour le tourisme durable et sa mutation c'est d'être capable d'accueillir la diversité des publics en multi-saisons intégrant 70% du marché domestique de la région aux grandes vacances européennes.

La France a des atouts. Le tourisme durable doit aussi permettre un investissement équitablement réparti pour éviter les effets de surtourisme,
" analyse Stéphane le Bihan, le directeur général chez VVF Villages.

Il serait intéressant aussi de défiscaliser les investissements pour la réhabilitation des hôtels ruraux et de mettre des moyens pour un tourisme plus social, souhaite de son côté Jean Pinard.

S'il n'y a pas de grands oubliés, des réflexions et des ambitions intéressantes, la feuille de route comporte trop d'inconnues pour le moment.

"Nous entendons parler depuis juin du plan de reconquête, j'attendais beaucoup de ce sommet. Les effets d'annonce sont sympas, mais nous devons rentrer dans le concret," affirme le directeur général de Cap France.

Le tourisme ne doit pas oublier qu'il fait partie de l'économie sociale et solidaire. Il devra prendre un virage qui s'annonce brutal, pour être durable.

"Je m’attendais à ce que le Gouvernement dise "en ce moment se tient la COP 26... et bien nous allons faire la COP du tourisme,". Or, il n'en est rien !" conclut un peu désabusé Jean Pinard.

Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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