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Demain vendrons-nous nos données personnelles ?

Y a t-il un ras-le-bol des consommateurs ?


La data est partout, vous en entendez parler à toute les sauces, mais peu de médias parlent du problème que pose le vide juridique laissé, par la propriété de celle-ci. Alors que pour le moment les GAFAM s'accaparent les données, sa monétisation parait de plus en plus probable. Ce phénomène pourrait-il modifier le paysage de la publicité en ligne ? Éléments de réponse.


Rédigé par le Mardi 6 Novembre 2018

La monétisation de la donnée est inévitable - Crédit photo : depositphotos @Faithie
La monétisation de la donnée est inévitable - Crédit photo : depositphotos @Faithie
Internet est arrivé à la croisée des chemins, entre l’ancien et le nouveau monde.

« Jusque-là au niveau du traitement des données c’était le Far West » résume assez bien Maurice Schulmann, le directeur marketing et communication du Groupe Partouche. Tout le monde pouvait vendre, acheter,échanger de la data sans limite, ni réel contrôle.

Depuis quelques mois, les Etats et les consommateurs se rebiffent contre les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft).

La fête est finie, il est temps de rendre des comptes. « Nous sommes encore dans une société pré-capitalistique de la data, car d’un côté il y a une monétisation de la donnée, alors que de l’autre, l’auteur de l’information fait un don » explique Alain Bensoussan, avocat à la Cour d’appel de Paris, spécialiste en droit des nouvelles technologies de l’informatique et de la communication.

« Nous sommes dans un pseudo marché, totalement asymétrique, puisque nous donnons notre data en contrepartie de services gratuits, mais qui ne le sont absolument pas. »

En effet, l’apparente gratuité est un leurre, car l’internaute est devenu depuis longtemps le produit. Et la ressource la plus chère en pleine 3e révolution industrielle reste la data, dont le parcours est toujours obscur.

Alors certes l’Europe tente d’y voir plus clair, avec notamment le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données), entré en vigueur au printemps 2018, mais le monde ne serait-il pas au bord d’un mai 68 numérique ?

Le peuple prend petit à petit conscience de l’importance de ces informations qu’il livre sans frais aux multinationales.

Pour preuve, on estime que 30% des surfeurs français sur le web utilisent un bloqueur de publicité, pour ne pas être dérangés par les pop-up ouvrant à l’improviste, et le taux de clics moyen d’une campagne d’e-mailing atteint 4,2% selon les statistiques d’IBM.

Pour résumer trop d’informations tuent l’information, les consommateurs en ont marre.

Tout se loue dans notre monde mais pas la donnée

Pour beaucoup d’entreprises du tourisme, l’étape de la recherche du CRM est à peine actée. Malheureusement ou heureusement, ces masses d’informations ne devraient pas se réduire dans les années à venir bien au contraire.

George Orwell l’avait imaginé, les GAFAM l’ont créé. « Le fameux RGPD ne traite ni directement ni indirectement de la propriété des données, la question apparaît seulement en creux » fait remarquer Alain Bensoussan.

Les avancées aussi minimes soient-elles ne peuvent pas être passées au pilori, mais il convient de voir plus loin.

Dans notre univers capitaliste tout se loue et s’achète ou presque « vous louez bien vos bras à votre employeur, votre voiture le week-end ou encore la piscine… mais pas vos informations » éclaire Anji Ismail, le co-fondateur de Varanida.

Il est temps que cela change. Pour cela le RGPD est une première marche dans l’escalier de la propriété, mais une start-up Varanida va plus loin.

« Nous offrons à l’utilisateur de reprendre la main sur ses informations jusqu’à la fin de sa vie en lui offrant la possibilité de la monétiser suivant ses propres envies, » explique le responsable de la start-up.

Les intérêts ne sont pas seulement pour les consommateurs mais aussi pour les publicitaires : « 20% de leur budget part en fraude, cela représente 46 milliards d'euros annuellement » rapporte le responsable de Varanida.

L'inventeur du Web prépare sa solution à la Varanida

Tout le monde est perdant, les publicités n’étant pas targetées l’utilisateur perd en expérience, et les publicitaires en impact : « la première bannière avait un taux d’engagement de 50%, quand aujourd’hui nous sommes à moins de 0,01%.»

Varanida ambitionne de devenir un « ad contrôleur », pour résumer les publicités sont bloquées, mais l’internaute peut décider de délivrer différents niveaux de données, tout en étant rémunéré pour ce geste.

« Prenez l’exemple d’une personne qui prépare ses futures vacances, elle peut décider de délivrer une partie de ses données à certains sites, afin de recevoir des publicités prédictives. »

Si la start-up n’en est qu’à ses débuts, les perspectives de développement sont réelles, puisque la communauté d’adblockers (bloqueur de publicité, ndlr) représente 100 millions de personnes dans le monde.

De plus face aux résultats devenus médiocres des campagnes publicitaires sur le web, les décideurs pourraient voir d’un bon œil le redressement des statistiques.

Et l'actualité, donne raison à Anji Ismail, puisque rien moins que le créateur du web lui même s'est emparé de la question.

Ainsi à l'image de Varanida, Tim Berners-Lee dévoilé son nouveau projet,
baptisé Solid, « open source visant à restaurer le pouvoir et l’influence des individus sur le Web. » Ainsi l'internaute bénéficiera d'un coffre fort pour stocker ses données personnelles des utilisateurs.

« Nous faisons évoluer le Web de façon à restaurer un équilibre, en donnant à chacun de nous le contrôle complet sur ses données, personnelles ou non, d’une manière révolutionnaire,» déclarait Tim Berners-Lee. La révolution qu'elle soit américaine ou française est en cours.

La monétisation des données paraît inéluctable

Dans un monde anonymisé, la perspective de passer en direct avec les utilisateurs a tout pour plaire. Voici, un exemple tout simple.

Avant de partir en vacances, l’utilisateur va effectuer des recherches sur une destination, puis en revenant de son séjour, l’internaute va encore recevoir « des publicités sur les piscines à débordement de Bali, alors que vous êtes coincés dans votre bureau gris à Paris, » pose pour exemple Anji Ismail.

Cet exemple illustre bien le parcours de la donnée, qui va de main en main, sans aucune traçabilité. Et le responsable de la start-up de préciser : « l’agence de voyages doit être force de proposition. Le seul moyen étant que l’utilisateur soit le propriétaire de la donnée

Sans être une lame de fond, plus de 150 000 personnes utilisent déjà l’outil en France et près de 30% des personnes ayant installé la solution Varanida sont prêtes à divulguer leurs données à certaines entreprises.

Cette dernière statistique démontre bien que les internautes ne veulent pas d’un monde sans publicité, mais d’un monde avec moins de publicité, moins d’intrusion, et un meilleur ciblage.

Si Varanida n’est pour le moment que dans une phase de test, et ne concerne qu’une petite partie de la population, la propriété de la donnée est le réel sujet d’actualité et rien ne dit que cela ne devienne pas une réalité dans un futur proche. Et Alain Bensoussan, de confirmer : « cette position de la privatisation des données, je l’avais présentée au Conseil d’Etat, il y a 3 ans.

Sauf que dans son rapport, l’instance avait alors rejeté cette proposition, en stipulant que ce n’était pas à l’ordre du jour


Alors qu'en cette nouvelle année l’association Villes internet et plus de 120 maires de France appellaient le gouvernement à établir une stratégique publique de la donnée, que le RGPD a réglementé un temps soit peu l’utilisation des données, la question de sa privatisation n’a jamais été autant d’actualité.

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Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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