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Vols France - Chine : le casse-tĂȘte chinois pour Air France 🔑

Air France a des capacités limitées vers la Chine


Évoquant une distorsion de concurrence et une rentabilitĂ© disparue suite Ă  son interdiction de survol de la Russie, Air France et le gouvernement limitent considĂ©rablement les vols vers la Chine au grand dam des professionnels du tourisme. Un retour rapide Ă  la situation d’avant crise semble compliquĂ©.


Rédigé par le Lundi 22 Mai 2023

Les plus ĂągĂ©s d’entre nous se rappellent peut-ĂȘtre du film de Jean Yanne « Les Chinois Ă  Paris ». Un scĂ©nario catastrophe oĂč les Chinois envahissent la France avec un Haut-Commissaire installant son quartier gĂ©nĂ©ral au Galeries Lafayette !

Cinquante ans plus tard, Nicolas HouzĂ©, directeur gĂ©nĂ©ral des Galeris Lafayette, Mecque des prodigues touristes chinois Ă  Paris, Ă©tait un des signataires d’une lettre adressĂ©e Ă  Emmanuel Macron avant son voyage en Chine pour plaider le retour des touristes en provenance de l’Empire CĂ©leste.

Également signataires de la missive, des poids lourds du tourisme et des voyages : Augustin de Romanet, PDG du groupe ADP, SĂ©bastien Bazin, PDG d’Accor et Henri Giscard d’Estaing, PDG du Club Med.

A l’origine de cette inquiĂ©tude de ne pas revoir dans les semaines qui viennent les touristes chinois, la suspension de l’accord bilatĂ©ral sino-français signĂ© en mars 2017 et prĂ©voyant pratiquement la mise en place progressive d’un pont aĂ©rien entre les deux pays.


Vols France - Chine : un peu d’histoire

C’est en fait en 1966 qu’un premier accord bilatĂ©ral avait Ă©tĂ© signĂ©.

En mars 2017, l’accord avait Ă©tĂ© renĂ©gociĂ© pour permettre une montĂ©e en cadence en passant de 50 vols par semaine et par pavillon Ă  126 en 2020. À l’époque, l’aĂ©rien français envisageait avec gourmandise une Chine de plus en plus ouverte, dans un espace aĂ©rien serein entre les deux continents.

Air France s’apprĂȘtait d’ailleurs Ă  avoir une concurrence française avec deux opĂ©rateurs : Aigle Azur et XL Airways qui avaient obtenu des droits de trafic.

Tout semblait donc bien parti Ă  l’époque, cependant et fort opportunĂ©ment, une clause du traitĂ© prĂ©voyait sa suspension en cas de fermeture de l’espace aĂ©rien russe. Sage intuition puisqu’avec le dĂ©clenchement de la guerre en Ukraine on en est lĂ  aujourd’hui.

Un temps de vol rallongé

Quelles sont les contraintes, pour les compagnies, d’un espace aĂ©rien russe fermĂ© ? Un temps de vol rallongĂ© de deux heures minimum.

L’ellipse classique avec un vol qui monte vers la SibĂ©rie pour redescendre vers la Chine n’est plus possible. Il faut dĂ©sormais effectuer une longue ligne droite, passer au dessus de la Turquie pour Ă©viter l’Ukraine et continuer tout droit.

Le temps de vol se voit donc considérablement rallongé, augmentant fortement la consommation de carburant et donc le coût du vol.

De plus et cela est moins Ă©voquĂ©, le temps de vol trĂšs rallongĂ© ne va plus permettre aux Ă©quipages d’effectuer l’aller-retour en 24 heures obligeant la compagnie Ă  programmer beaucoup plus de navigants qu’avant pour un mĂȘme nombre de rotations.

Mais pour les compagnies chinoises, l’espace aĂ©rien reste ouvert, crĂ©ant de fait une distorsion de concurrence Ă©vidente aggravĂ©e par l’impossibilitĂ© pour Air France de vendre des siĂšges sur les compagnies chinoises avec lesquelles elle est en partage de code.

Une manne qui s’est tarie

Rien qu’en Île-de-France, cette clientĂšle reprĂ©sente 5,6 millions de nuitĂ©es et permet Ă  certaines enseignes de rĂ©aliser prĂšs de 30% de leur chiffre d’affaires.CrĂ©dit : Depositphoto
Rien qu’en Île-de-France, cette clientĂšle reprĂ©sente 5,6 millions de nuitĂ©es et permet Ă  certaines enseignes de rĂ©aliser prĂšs de 30% de leur chiffre d’affaires.CrĂ©dit : Depositphoto
Une situation qui n’est pas du gout de Benjamin Smith, le PDG d’Air France - KLM et des autoritĂ©s françaises reprĂ©sentĂ©es par la DGAC (Direction gĂ©nĂ©rale de l'Aviation civile).

L’objectif est clair : ne pas laisser les compagnies chinoises dominer le marchĂ© grĂące aux conditions plus favorables que permet le survol de la Russie.

En limitant le nombre de vols pour le moment, le prix des billets reste trĂšs Ă©levĂ© et garantit la rentabilitĂ© des vols pour Air France. Une montĂ©e en cadence de part et d’autre devra se faire en nĂ©gociant.

ConsĂ©quence : le retour des Chinois se fait pour l’instant au compte-goutte.

Alors que le trafic international est revenu Ă  91,3% Ă  Roissy CDG, celui en provenance de Chine n’était encore que de 10%.

En 2019, les 2,2 millions de touristes chinois qui avaient visitĂ© la France avaient laissĂ© dans les caisses plus de 3 milliards d’euros. Un jackpot qui s’était rĂ©duit comme une peau de chagrin en 2022 avec « seulement » 240 millions d’euros.

Rien qu’en Île-de-France, cette clientĂšle reprĂ©sente 5,6 millions de nuitĂ©es et permet Ă  certaines enseignes de rĂ©aliser prĂšs de 30% de leur chiffre d’affaires.

Ne serait-ce que pour l’aĂ©roport de Roissy CDG « le touriste chinois dĂ©pense cinq Ă  six fois plus que la moyenne des passagers de l’aĂ©roport et reprĂ©sentait, avant la crise, 15% des recettes », dĂ©clarait rĂ©cemment Augustin de Romanet le PDG d’ADP.

Christian Mantei, prĂ©sident d’Atout France, confirmait lui aussi la prodigalitĂ© de ces touristes avec un panier moyen de 1500 euros avant la pandĂ©mie.

La pression des grands du tourisme et des politiques

Cette manne qui pour l’instant leur Ă©chappe provoque l’agacement des professionnels qui ont donc Ă©crit au PrĂ©sident de la RĂ©publique pour pousser Air France Ă  remettre beaucoup plus de vols dans les semaines qui viennent.

ValĂ©rie PĂ©cresse, PrĂ©sidente de la RĂ©gion Île-de-France a elle aussi mĂȘlĂ©e sa voix aux professionnels avec un courrier Ă  Elisabeth Borne pour sommer Air France et l’exĂ©cutif d’augmenter les frĂ©quences.

On comprend bien les inquiĂ©tudes, mais Air France, comme tous ces grands groupes privĂ©s de l’industrie touristique n’a pas vocation Ă  vendre ses services ou ses produits Ă  perte.

En novembre dernier, quand le mĂ©tro parisien peinait Ă  remettre en service assez de capacitĂ©, Madame PĂ©cresse s’était fĂąchĂ©e avec un courrier ferme Ă  la RATP pour que l’entreprise « prenne immĂ©diatement les mesures nĂ©cessaires pour rĂ©tablir un trafic rĂ©gulier dans le mĂ©tro parisien avec de meilleures frĂ©quences de rames »

À moins de vouloir nationaliser Air France pour lui donner le mĂȘme statut que la RATP, ce n’est pas tout Ă  fait comme cela que ça marche avec la compagnie française.

Taxer les compagnies chinoises ?

Il faudra bien cependant remonter les cadences vers la Chine. Les discussions sont en cours pour s’accorder sur une augmentation des frĂ©quences dans un cadre le plus Ă©quitable possible.

Actuellement le nombre de rotations entre la France et la Chine est de seize par semaine. À compter du 10 juin, les droits attribuables seront de 50 par semaine, la moitiĂ© du trafic de l’étĂ© 2019.

Les négociations actuelles pour une remontée des fréquences pourraient aboutir selon la DGAC à ce que les Français et les Chinois se partagent une quarantaine de rotations hebdomadaires.

Air France pourrait, dans cette perspective et à partir du mois de juillet, opérer vers Pékin et Shanghai un vol quotidien au départ de Roissy CDG avec en plus une desserte quotidienne vers Hong Kong, qui fait l'objet d'un accord indépendant.

Tant que la guerre en Ukraine et donc l’interdiction de survol de la Russie pour Air France dureront, le trafic aĂ©rien entre la France et la Chine ne pourra retrouver toutes ses capacitĂ©s.

Si la situation devait durer, comment empĂȘcher cette Ă©vidente distorsion ? Comment remettre sur un pied d’égalitĂ© Air France et les compagnies chinoises ?

Aux États-Unis qui sont confrontĂ©s au mĂȘme problĂšme, le Financial Times rapporte, que des responsables amĂ©ricains auraient proposĂ© d'accorder aux compagnies aĂ©riennes chinoises le mĂȘme nombre de vols hebdomadaires entre les deux pays que les transporteurs amĂ©ricains, Ă  condition qu'elles acceptent de ne pas survoler la Russie.

À Paris et selon certaines sources proches du dossier, on souhaiterait que tant que cette situation perdure, le PrĂ©sident Emmanuel Macron instaure des taxes ou d'autres mesures qui crĂ©eraient une base de coĂ»ts similaire entre Air France et les compagnies aĂ©riennes chinoises.

Affaire Ă  suivre...

Christophe Hardin Publié par Christophe Hardin Journaliste AirMaG - TourMaG.com
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Tags : air france, chine
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