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APG : une transmission où "les fondamentaux n'ont pas changé" 🔑

Destins croisés : Episode 2 !


Après la "proposition Madrid", retrouvez l'interview croisée de Sandrine de Saint-Sauveur et Jean-Louis Baroux qui reviennent sur leur aventure entrepreneuriale et familiale. Ce second volet aborde les débuts de Sandrine de Saint-Sauveur à la tête d’APG, son management, son énergie, avec, déjà pour elle aussi, la question de la transmission.


Rédigé par le Vendredi 7 Juin 2024

Sandrine de Saint-Sauveur et Jean-Louis Baroux dans les locaux parisiens d'APG le 12 avril 2024. Photo : C.Hardin
Sandrine de Saint-Sauveur et Jean-Louis Baroux dans les locaux parisiens d'APG le 12 avril 2024. Photo : C.Hardin
TourMaG - Concrètement, comment s’est effectué le passage de relais ?

Jean-Louis Baroux : La vraie question après cet échange à l’aéroport de Madrid, était de se dire, comment va-t-on faire techniquement ?

On a monté un MBO sous la supervision d’experts et Sandrine a racheté APG. On s’est appliqué à très bien border l’opération avec beaucoup d’expertise, et je crois que ce que nous avons fait de bien, c’ est que personne ne donne rien à personne.

Et le 31 mars j’ai quitté mon bureau dans lequel nous sommes aujourd’hui et qu’occupe maintenant Sandrine et je suis parti m’installer dans les étages.

Au départ les gens continuaient à venir me voir et je leur répondais : « Le bureau de la direction n’a pas changé. C’est au même endroit donc vous redescendez ».

Cela a duré huit jours et ensuite c’était terminé, plus personne n’est venu me demander une autorisation.


TourMaG - Saviez vous à ce moment si Sandrine allait marcher dans vos pas quant à la stratégie ?

Jean-Louis Baroux : La seule chose que je savais c’est qu’elle était capable de reprendre le flambeau. Elle dirige très différemment de la façon dont je le faisais.

Et là aussi les choses, se sont faites très naturellement. L’important était comme je l’ai dit d’assurer techniquement la succession.

Il fallait que Sandrine soit actionnaire majoritaire sans demander à qui que ce soit quoi que ce soit. Elle dirige et elle n’a rien à demander à personne ni même à moi. Des fois j’ai des idées, je lui en parle. Elle me dit non, elle me dit oui.


TourMaG - Sur cette idée du combat de trop, pourquoi vous êtes-vous dit cela à ce moment-là ?

Jean-Louis Baroux : Parce ce que j’ai toujours eu la hantise de sentir me faire pousser dehors. Il faut partir avant. Plein de gens ont voulu me retenir, j’ai dit non. Surtout ne pas s’accrocher. J’ai cependant la chance d’avoir encore des activités.


"On ne peut pas avoir 80 ans et être encore à la fête"

TourMaG - Des chroniques régulières...

Jean Louis Baroux : Oui, j’écris une chronique toutes les semaines. Je note régulièrement des idées dans le but d’écrire quelque chose qui puisse intéresser le lecteur.

Je n’ai pas cependant la prétention de réformer le transport aérien, mais j’ai la prétention de dire ce que j’en pense. J’ai cette liberté, je ne dois rien à personne et d’ailleurs depuis que j’écris, j’achète tous mes billets d’avion.

Je ne conçois pas d’écrire pour ou contre quelqu’un sans avoir ma liberté parce que je demande un billet.


TourMaG - Au World Connect il y a cette dualité aussi, vous êtes comme un duo avec Sandrine.

Jean-Louis Baroux : Concernant le World Connect, nous en sommes arrivés à un moment où je pense qu’il faut que je sorte.

Je le fais doucement, mais cette année ou l’année prochaine, il faut que je sorte complément. On ne peut pas avoir 80 ans et être encore à la fête, c’est impossible.


TourMaG - Ça existe pourtant, demandez à Joe Biden !

Jean Louis Baroux : (rires) Oui, ou alors je me présente à la Présidence de la République.

Mais cela ne veut pas dire non plus que je vais arrêter de travailler. Cela ne veut pas dire que sur le World Connect, je ne donnerai pas quelques idées. Mais on ne peut pas être Président du World Connect à 80 ans.

Et je pense que très naturellement c’est Sandrine qui va prendre la Présidence. Ce sera aussi bête que de mettre du sucre dans le café !

Sandrine de Saint-Sauveur : "on ne peut pas réussir tout seul"

TourMaG - Vous Sandrine, quand Jean-Louis ce jour-là vous a demandé de prendre le relais, il n’y a pas eu de « vertiges » quant à prendre les commandes d’APG ? Là aussi cela s’est fait tranquillement ?

Sandrine de Saint-Sauveur : (malicieuse) Oui. Et moi je suis de nature plutôt curieuse. Quand vous avancez, il y a des choses effectivement que vous ne connaissez pas, mais vous savez que vous allez les apprendre. Je n’ai donc pas eu véritablement d’appréhension.

TourMaG - Vous êtes Sandrine et Jean-Louis, deux personnalités différentes.
Avez-vous, Sandrine, apporté une nouvelle forme de management chez APG ?


Sandrine de Saint-Sauveur : Nous sommes différents biens sûrs. Et donc l’interaction est, de fait, différente.

Cependant sur le fond, on ne peut pas réussir tout seul. Il faut impliquer les équipes. Pour ça, il faut les aimer et penser à eux. Papa a toujours fait ça et moi j’ai absorbé cela.

Ce sont des fondamentaux qui n’ont absolument pas changé. C’est une continuité avec cependant des techniques qui peuvent être différentes. Hier, j’ouvrais un séminaire en Géorgie et j’ai redit ce message :« pensez les uns aux autres, nous sommes liés ». Mon message n’est pas différent de ce qui a toujours été.

L’image d’APG, ce sont des gens qui restent soudés. Même pendant les coups durs, les équipes APG restent ensemble, car elles ont ce sentiment d’être véritablement liées.
C’est cela qui fait sens.

"Ne pas se prendre au sérieux"

TourMaG - Vous avez, Sandrine, cette générosité et vous êtes à la tête d’une grande entreprise qui nécessite aussi de la fermeté ?

Jean-Louis Baroux : On ne fait rien sans générosité, surtout dans notre métier, mais cela n’empêche pas la fermeté.

Sandrine de Saint-Sauveur : Exactement. Je ne suis pas une drôle vous savez et je peux être extrêmement dure ou cassante.

TourMaG - Vous forcez votre nature alors ?

Jean Louis Baroux : Non pas du tout, elle est sanguine.

TourMaG - Mais ensuite, vous en voulez-vous, des fois, d’avoir été trop dure ou cassante ?

Sandrine de Saint-Sauveur : Quand je me mets en colère, je suis souvent malheureuse après. Cela veut dire que quelque chose ne va pas, je n’ai pas su faire passer le message et en tant que dirigeante c’est aussi ma responsabilité. C’est mon problème. Et je suis aussi en colère contre moi-même.
Mais ça ne dure pas.


TourMaG - Dans ce bureau ou nous sommes avec ces toiles et ces statues qui incitent au voyage, au spiritisme, à la sérénité cela vous aide à faire tomber la colère et relativiser les choses ?

Sandrine de Saint-Sauveur :Oui et entre nous le rôle d’un entrepreneur, ce n’est pas le sujet de la vie. Faisons-le sérieusement, mais ne nous prenons pas trop au sérieux.

La difficulté, c’est quand les gens se prennent trop au sérieux et pensent qu’ils se définissent par leur position. C’est triste, ce n’est qu’un bout des choses.


TourMaG - Le fait d’être une femme n’a pas posé de difficultés quand vous êtes arrivée à la tête d’APG ?

Sandrine de Saint-Sauveur : J’ai eu une éducation ou la femme avait toute sa place au sein d’un couple et où elle ne se laissait pas faire. C’était une constante dans ma famille.

TourMaG - Vous dirigez cependant une entreprise qui a des bureaux partout y compris dans des pays où il reste encore beaucoup de progrès à faire quant à l’égalité femme /homme.

Sandrine de Saint-Sauveur : Oui et que cela plaise ou pas il faut que je fasse avec et des fois il faut s’adapter.

Jean-Louis Baroux : Une fois pour une signature avec une compagnie dans le Golfe elle m’a dit « il faut que tu viennes, tu feras pot de fleurs… Et j’ai fait pot de fleurs. »

Une chose évidente, c’est que l’ensemble du réseau qui est composé de cent dix membres ne s’est pas posé la question et n’a eu aucun ressenti. C’était Sandrine.

Savoir déconnecter

TourMaG - Jean Louis, votre fils Éric n’a pas été, lui aussi, intéressé pour prendre le relais ?

Jean Louis Baroux : Non Éric, son truc c’est la comptabilité et il fait carrière dans ce domaine. Quand nous avons fait la transmission, nous avons fait en sorte de régler équitablement les choses et il n'y a jamais eu le moindre conflit à ce sujet. Je ne l’ai jamais ressenti.

TourMaG - Vous êtes donc la patronne d’une entreprise où il se passe toujours quelque chose quelque part. Comment fait-on pour déconnecter de temps en temps ?

Sandrine de Saint-Sauveur : Vous le décidez. Vous faites vos choix. Je n’ai pas pris de vacances ces derniers temps, c’est mon choix.

TourMaG - Cela vous manque ?

Sandrine de Saint-Sauveur : Si cela me manque, je le fais.

TourMaG - Comment concevez vous le repos, le break ?

Sandrine de Saint-Sauveur :Avec un très bon bouquin. Avec une sieste.

TourMaG- C’est suffisant ?

Sandrine de Saint-Sauveur : Ce n’est pas une question de temps. C’est une question de perception.

Tous les matins également je fais un break et je pète la forme. Et si cela ne suffit pas, je vais à un endroit, je vais nager, je m’abandonne à la contemplation, la méditation.

Aussi, vous faites les breaks avec les gens que vous aimez. Je fais les breaks avec mon mari. Il est très différent de moi, mais là aussi les choses se font très bien, très naturellement.

Je m’évade beaucoup grâce aux livres. Je n’en achète aucun. C’est toujours Frederic mon mari qui me les achète. Il tombe toujours juste.

APG : quelle transmission pour pour la suite ?

TourMaG- : Et sur le sujet qui nous intéresse, la transmission. Comment la voyez-vous ?

Jean-Louis Baroux : C'est son vrai sujet.

Sandrine de Saint-Sauveur : Oui et je suis convaincue qu’à partir du moment ou l’on se dit « je m’ouvre l’esprit pour envisager la bonne formule de la continuation », qu’on est à l’écoute, qu’on ne ferme aucune porte, les choses viendront.

C’est un sujet sur lequel je travaille et les bonnes options viendront.


TourMaG - Du côté de la famille ?

Sandrine de Saint Sauveur : Peu importe, mais je suis sûre que les bonnes options viendront.

Jean-Louis Baroux : C’est une façon de saisir des opportunités. Si on se fixe des rails, on ne regarde pas les opportunités.

Sandrine de Saint-Sauveur : C’est exactement cela.

Jean-Louis Baroux : Par contre il faut avoir la capacité de décider rapidement.

Ce qui tue les grandes sociétés c’est la nécessité de faire du consensus. Donc il n’ y a plus de décision ou cela prend un temps fou. C’est pour cela que la France va mal.
S’il y a une opportunité qui passe, mais s’il faut quatre mois pour en discuter, l’opportunité est partie.


Sandrine de Saint-Sauveur : C’est exactement ça. Cela revient à cette idée du « partir » d’être toujours en mouvement. Ne pas remettre à plus tard, mais s’engouffrer.

Je me suis toujours dit : « allez tu y vas » . Si vous planifiez trop, des choses passent…


TourMaG - Avec cette philosophie du mouvement, est-ce que le mot « retraite » a du sens pour vous ?

Sandrine de Saint-Sauveur : Oui bien sûr ! Mais cela dépend comment on la conçoit. Pour moi c’est un nouveau cycle. Et les cycles sont tous liés par cette volonté de faire quelque chose qui fait sens.

TourMaG - Se consacrer à quoi par exemple ?

Sandrine de Saint-Sauveur : L’art.

TourMaG - Sous quelle forme ?

Sandrine de Saint-Sauveur : Aller découvrir de nouveaux artistes, aller à leur rencontre, comprendre comment nait une œuvre, discuter avec eux. Ce sont des gens passionnants qui ont un état d’esprit différent.

TourMaG - Vous avez vous-même ce côté artiste quand par exemple vous accueillez derrière le bar les pontes du transport aérien, on voit cette aptitude à animer.
Ce que l’on voit moins chez Jean-Louis.


Sandrine de Saint-Sauveur :Ah non pas du tout ! Bien sûr que les générations avant moi avaient un management un peu plus « conservateur », mais Papa je vous le dis il était capable de monter sur la table !

Finalement être artiste, c’est la conviction que vous pouvez transformer si vous travaillez. Vous ne pouvez pas arriver à quelque chose si vous ne le rêvez pas.
Et moi j’ai des rêves en tête. Le jour où vous ne rêvez plus, vous êtes mort. Il faut « écouter » ses rêves.


TourMaG - La Légion d’honneur, vous n’en avez pas rêvé, mais vous avez été décorée. Comment l’avez-vous vécue ?

Sandrine de Saint-Sauveur : Cet un honneur, je l’ai pris comme un honneur sachant qu’on ne vit pas d’honneur.

Jean-Louis Baroux : La Légion d’honneur, ça ne se demande pas, ça ne se refuse pas et ça ne se porte pas.

Sandrine de Saint-Sauveur : Et ça ne me définit pas non plus.

TourMaG - Vos fiertés sont ailleurs ?

Sandrine de Saint-Sauveur : J’ai plus de la fierté à faire en sorte qu’APG nourrisse des familles partout dans le monde, qu’on essaie de faire les choses du mieux possible, qu’on embauche des gens en CDI…et de payer mes impôts en France.

Je considère que je dois faire ma partie. Je donne toujours cet exemple de cette légende amérindienne du colibri.

La forêt brûle, tous les animaux sont effrayés et tétanisés et le colibri va chercher de l’eau goutte par goutte. On lui dit "tu es idiot tu crois que tu vas arrêter le feu ?"
Non, répond le colibri, mais je fais ma part.

Je ne changerais pas le monde, mais je fais ma part avec le plus d’honnêteté possible. Apporter ma pierre à l’édifice. Faire mon petit colibri.


Un grand merci à Frederick DESPREAUX pour son aide précieuse quant à la réalisation de cet entretien.

Christophe Hardin Publié par Christophe Hardin Journaliste AirMaG - TourMaG.com
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Tags : apg, baroux
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