Une jurisprudence de la Cour de justice de l'UE met la pression sur les AGV, mais responsabilise les compagnies aériennes - Depositphotos @SomeMeans
L'Europe colle de près le tourisme.
Après les avoirs et voyages annulés qui doivent être couverts par les garants financiers des agents de voyages, voilà que les transporteurs peuvent se retourner contre ces derniers !
C'est le monde qui marche à l'envers... ou sur la tête ?
Pendant un temps, le secteur a cru que la Commission européenne allait bouger pour instaurer un système de garantie financière aux acteurs de l'aérien, afin de protéger l'écosystème en cas de faillite de l'une des compagnies, sauf que la dernière décision de la Cour de justice de l'UE (CJUE) renforce plutôt leur protection !
Bref, les agents de voyages soumis au devoir de conseil, vont devoir surtout s'assurer de délivrer la bonne information, juste et précise à leurs voyageurs, sous peine de devoir rembourser les transporteurs.
Avec l'aide de Chloé Rezlan, avocate associée au cabinet Adeona Avocats, nous vous expliquons les dessous de cette jurisprudence.
Après les avoirs et voyages annulés qui doivent être couverts par les garants financiers des agents de voyages, voilà que les transporteurs peuvent se retourner contre ces derniers !
C'est le monde qui marche à l'envers... ou sur la tête ?
Pendant un temps, le secteur a cru que la Commission européenne allait bouger pour instaurer un système de garantie financière aux acteurs de l'aérien, afin de protéger l'écosystème en cas de faillite de l'une des compagnies, sauf que la dernière décision de la Cour de justice de l'UE (CJUE) renforce plutôt leur protection !
Bref, les agents de voyages soumis au devoir de conseil, vont devoir surtout s'assurer de délivrer la bonne information, juste et précise à leurs voyageurs, sous peine de devoir rembourser les transporteurs.
Avec l'aide de Chloé Rezlan, avocate associée au cabinet Adeona Avocats, nous vous expliquons les dessous de cette jurisprudence.
Décision de la CJUE : voici le cas exposé
En septembre 2019, un voyageur autrichien se rend à Héraklion, en Grèce.
Son vol retour est prévu le 29 septembre à 18 heures, pour une arrivée à Linz prévue à 20h. La veille de son départ, l'organisateur du voyage auprès duquel il a souscrit son voyage à forfait, le contacte pour lui annoncer une modification de l'horaire du vol et de la destination finale (Vienne-Schwechat).
Rien n’indique que ladite communication soit imputable à un quelconque comportement de la compagnie aérienne. Le transporteur est un affréteur et n’effectue pas les réservations de vol lui-même.
Dans la liste des passagers qu'il a reçue 24 heures avant le vol retour, le nom du voyageur autrichien ne figurait pas. En raison du message reçu le 28 octobre, ce dernier ne s'est donc pas rendu à l'aéroport pour son retour de 18h.
Il a ensuite réclamé à la compagnie aérienne une indemnisation de 400 euros majorée des intérêts en se basant, sur le fondement de l’article 7 du règlement n°261/2004.
Sauf que ce dédommagement, la compagnie n'a jamais voulu le verser, car selon elle, la faute repose sur les épaules de l'organisateur. Dans ce cas, le tribunal a condamné la compagnie à dédommager le passager. Cette dernière a alors interjeté appel de ce jugement.
Deux autres voyageurs allemands ont connu pareil sort et porté l'affaire en justice. Cette fois-ci le transporteur n'a pas été condamné, puisque le vol n'a pas été annulé. Il a bien eu lieu, sauf que l'agence a transmis une mauvaise information aux clients.
Dans ce dernier cas, les passagers ont interjeté appel.
Son vol retour est prévu le 29 septembre à 18 heures, pour une arrivée à Linz prévue à 20h. La veille de son départ, l'organisateur du voyage auprès duquel il a souscrit son voyage à forfait, le contacte pour lui annoncer une modification de l'horaire du vol et de la destination finale (Vienne-Schwechat).
Rien n’indique que ladite communication soit imputable à un quelconque comportement de la compagnie aérienne. Le transporteur est un affréteur et n’effectue pas les réservations de vol lui-même.
Dans la liste des passagers qu'il a reçue 24 heures avant le vol retour, le nom du voyageur autrichien ne figurait pas. En raison du message reçu le 28 octobre, ce dernier ne s'est donc pas rendu à l'aéroport pour son retour de 18h.
Il a ensuite réclamé à la compagnie aérienne une indemnisation de 400 euros majorée des intérêts en se basant, sur le fondement de l’article 7 du règlement n°261/2004.
Sauf que ce dédommagement, la compagnie n'a jamais voulu le verser, car selon elle, la faute repose sur les épaules de l'organisateur. Dans ce cas, le tribunal a condamné la compagnie à dédommager le passager. Cette dernière a alors interjeté appel de ce jugement.
Deux autres voyageurs allemands ont connu pareil sort et porté l'affaire en justice. Cette fois-ci le transporteur n'a pas été condamné, puisque le vol n'a pas été annulé. Il a bien eu lieu, sauf que l'agence a transmis une mauvaise information aux clients.
Dans ce dernier cas, les passagers ont interjeté appel.
Sur quoi la CJUE devait-elle se prononcer ?
Les juridictions allemandes et autrichiennes ont alors adressé deux questions à la CJUE.
La première étant de savoir si la notion de « refus d’embarquement » englobe le refus d’embarquement anticipé sur un vol qui a pourtant été opéré ?
Puis la 2e interrogation découle de la réponse.
Si elle est affirmative, le transporteur aérien peut-il être tenu pour responsable des informations erronées relatives au report ou à l’annulation d’un vol que l’organisateur de voyages a communiqué aux passagers ?
La première étant de savoir si la notion de « refus d’embarquement » englobe le refus d’embarquement anticipé sur un vol qui a pourtant été opéré ?
Puis la 2e interrogation découle de la réponse.
Si elle est affirmative, le transporteur aérien peut-il être tenu pour responsable des informations erronées relatives au report ou à l’annulation d’un vol que l’organisateur de voyages a communiqué aux passagers ?
Qu'a décidé la CJUE ?
La Cour de justice de l'Union européenne a fourni une réponse quelque peu déconcertante, pour les professionnels du tourisme.
"Un passager aérien qui disposait, dans le cadre d’un voyage à forfait, d’une réservation confirmée pour un vol peut demander au transporteur aérien effectif l’indemnisation dans l’hypothèse où l’organisateur de ce voyage a, sans en informer préalablement ce transporteur, avisé ce passager que le vol ne serait pas assuré, alors même que ce vol a été opéré comme prévu," affirme le rendu.
Pour parvenir à cette solution, la Cour considère d’abord que l'objectif de protection des voyageurs énoncé dans les considérants du Règlement impose que ses dispositions soient interprétées de sorte qu’une protection élevée soit offerte aux passagers.
Pour justifier sa décision, elle s'appuie sur 2 décisions précédemment rendues, notamment celle de LATAM Airlines Group (C-238/22), en 2023.
Elle expliquait alors qu’un transporteur aérien effectif ayant informé à l’avance un passager de son refus de le laisser embarquer, est tenu d’indemniser le passager même en l'absence de présentation à l’embarquement.
Dans le cas présent, la CJUE estime que le fait que l’annulation ait été communiquée par l’organisateur du voyage et non par le transporteur ne modifie en rien l’obligation d’indemnisation qui incombe à ce dernier.
La Cour poursuit, sur la base de l'arrêt Azurair (C-146/20), en expliquant que les passagers peuvent se fier aux informations transmises par l'organisateur de leur voyage.
Et estime que « le risque que des organisateurs de voyages fournissent des informations inexactes aux passagers dans le cadre de leurs activités doit être assumé par le transporteur aérien ».
Même si le poids de l'indemnisation, en cas d'erreur de l'organisateur de voyages, pèse sur les compagnies, la Cour affirme que celles-ci peuvent se retourner contre les agents de voyages !
Quoi qu'il en soit et conformément à l’article 13 du règlement en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers, une fois l’indemnisation versée, le transporteur pourra se retourner contre l’organisateur de voyage fautif pour obtenir un remboursement.
"Un passager aérien qui disposait, dans le cadre d’un voyage à forfait, d’une réservation confirmée pour un vol peut demander au transporteur aérien effectif l’indemnisation dans l’hypothèse où l’organisateur de ce voyage a, sans en informer préalablement ce transporteur, avisé ce passager que le vol ne serait pas assuré, alors même que ce vol a été opéré comme prévu," affirme le rendu.
Pour parvenir à cette solution, la Cour considère d’abord que l'objectif de protection des voyageurs énoncé dans les considérants du Règlement impose que ses dispositions soient interprétées de sorte qu’une protection élevée soit offerte aux passagers.
Pour justifier sa décision, elle s'appuie sur 2 décisions précédemment rendues, notamment celle de LATAM Airlines Group (C-238/22), en 2023.
Elle expliquait alors qu’un transporteur aérien effectif ayant informé à l’avance un passager de son refus de le laisser embarquer, est tenu d’indemniser le passager même en l'absence de présentation à l’embarquement.
Dans le cas présent, la CJUE estime que le fait que l’annulation ait été communiquée par l’organisateur du voyage et non par le transporteur ne modifie en rien l’obligation d’indemnisation qui incombe à ce dernier.
La Cour poursuit, sur la base de l'arrêt Azurair (C-146/20), en expliquant que les passagers peuvent se fier aux informations transmises par l'organisateur de leur voyage.
Et estime que « le risque que des organisateurs de voyages fournissent des informations inexactes aux passagers dans le cadre de leurs activités doit être assumé par le transporteur aérien ».
Même si le poids de l'indemnisation, en cas d'erreur de l'organisateur de voyages, pèse sur les compagnies, la Cour affirme que celles-ci peuvent se retourner contre les agents de voyages !
Quoi qu'il en soit et conformément à l’article 13 du règlement en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers, une fois l’indemnisation versée, le transporteur pourra se retourner contre l’organisateur de voyage fautif pour obtenir un remboursement.
Que retenir de cette décision :
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Dans le cadre d'un voyage à forfait, si l'agence de voyages (organisateur de voyages) délivre à son client (voyageur), une fausse information sur un possible retard ou annulation du vol, que la personne ne se présente pas à temps, alors la compagnie pourra se retourner contre le professionnel, dans le cas où il est condamné à payer une indemnité.
Cette décision de la CJUE s'applique si le voyageur ne se présente pas à l'aéroport à l'heure pour embarquer, en raison d'une mauvaise information envoyée par l'organisateur.
Une décision fera parler, puisque la compagnie est responsable de l'indemnisation, mais le professionnel de la justesse de l'information.
Et dans ces moments de turbulence, comme les grèves ou évènements naturels, il n'est pas toujours facile d'obtenir avec précision les dates et horaires de son vol.
En résumé, chers lecteurs, faites attention aux informations que vous délivrez et assurez vous bien auprès de la compagnie que le vol n'aura pas lieu ou qu'il sera effectivement en retard.
Cette décision de la CJUE s'applique si le voyageur ne se présente pas à l'aéroport à l'heure pour embarquer, en raison d'une mauvaise information envoyée par l'organisateur.
Une décision fera parler, puisque la compagnie est responsable de l'indemnisation, mais le professionnel de la justesse de l'information.
Et dans ces moments de turbulence, comme les grèves ou évènements naturels, il n'est pas toujours facile d'obtenir avec précision les dates et horaires de son vol.
En résumé, chers lecteurs, faites attention aux informations que vous délivrez et assurez vous bien auprès de la compagnie que le vol n'aura pas lieu ou qu'il sera effectivement en retard.