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Négociations sur les minima salariaux : bientôt un nouveau round ? 🔑

La CFE-CGC retire sa signature lors de la rédaction du dernier accord


A peine adopté et déjà hors des clous... Avec la revalorisation du SMIC depuis ce 1er mai, l'accord salarial sur les minima approuvé le 5 avril dernier par les organisations syndicales et patronales de la branche des agences de voyages et des tour-opérateurs n'est plus « valable » pour les catégories A et B, dont les montants se retrouvent en-dessous du SMIC. Alors que Jean-Pierre Mas, président des EDV, déclarait dans nos colonnes être opposé à la réouverture des NAO, la loi ne va pas dans son sens et les organisations syndicales se préparent à un nouveau round. Ambiance.


Rédigé par le Mardi 2 Mai 2023

D'ici quelques jours (ou semaines), syndicats et patronat devraient à nouveau se réunir pour parler de la revalorisation des salaires des agents de voyages et des producteurs - DR : DepositPhotos.com, ra2studio
D'ici quelques jours (ou semaines), syndicats et patronat devraient à nouveau se réunir pour parler de la revalorisation des salaires des agents de voyages et des producteurs - DR : DepositPhotos.com, ra2studio
Depuis ce 1er mai 2023, c'est reparti pour un tour !

La revalorisation du SMIC. (1 747,20 euros bruts par mois, soit 1 383,08 euros nets pour 35 heures hebdomadaires) vient de faire repasser les catégories A et B de la Convention collective nationale (CCN) des agences de voyages en-dessous des minima légaux.

Et ceci, moins d'un mois après que les organisations syndicales et patronales soient parvenues à s'accorder sur une augmentation des salaires minima de 6% pour les groupes A, B et C et 1,88% pour les groupes D, E, F et G...

Autant dire que d'ici quelques jours (ou semaines), ce sera rebelote ! Syndicats et patronat (EDV et SETO) devront à nouveau se réunir pour parler de la revalorisation des salaires.

Et ce, quoiqu'en dise Jean-Pierre Mas dans nos colonnes. Il y a deux semaines, en effet, le président des Entreprises du Voyage déclarait : « Face à des syndicats bornés, je peux être très têtu. Il n'y aura aucune négociation ouverte en 2023, on ne reparlera qu'en 2024. Nous avons bien averti les syndicats de cela. »

Depuis un mois, le président du syndicat ne cache pas sa déception tandis que les syndicats ont opté pour l'accord le plus « conventionnel » parmi les deux avancés par le patronat. « Je suis très déçu de cette position minimaliste des organisations syndicales, qui ne compense pas la hausse globale du coût de la vie et qui nuit considérablement à l’attractivité de notre secteur », avait-il déclaré le 5 avril dernier.


Des échanges cordiaux, malgré la polémique

Ses déclarations dans TourMaG quelques jours plus tard ont eu pour effet de mettre le feu aux poudres.

« La CFDT a fait le choix de se concentrer sur la préservation des intérêts des travailleurs et de l'emploi. Elle appelle aujourd’hui la branche à engager de nouvelles négociations, comme le prévoit le Code du Travail (article L.2241-10),. pour la revalorisation des salaires des groupes A et B qui seront en-dessous du SMIC au 1er mai.

Maintenir ces deux groupes en-dessous du SMIC serait en parfaite contradiction avec le discours patronal délivré dans les médias
», a ainsi déclaré Stéphanie Dayan, la Secrétaire nationale CFDT en charge du secteur de l’hôtellerie, tourisme, restauration, casinos clubs de jeux et immobilier, dans un droit de réponse.

La loi prévoit en effet que « lorsque le salaire minimum national professionnel des salariés est inférieur au SMIC, les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels se réunissent pour négocier sur les salaires ». La partie patronale dispose de 45 jours pour engager ces négociations.

Toutefois, si les propos de Jean-Pierre Mas ont suscité de vives réactions parmi les syndicats (voir le communiqué de la CFTC à ce sujet), ils ne sont pas le reflet exact des échanges qu'ont pu avoir les organisations patronales (EDV et SETO) et syndicales (CFTC, CGT, CFDT, CFE-CGC et SNEPAT-FO) au cours des derniers mois.

« Les relations sont relativement courtoises, M. Mas ne participe pas aux réunions de la Commission Paritaire Permanente de Négociation et d’Interprétation, donc il ne voit pas la qualité ou les défauts du dialogue social et cela se passe relativement bien », tient à rétablir Ophélia Dufort pour la CFTC.

« Il y a deux choses à ne pas confondre : le désaccord et le climat, ajoute Morgan Butty, président de la Commission Paritaire Permanente de Négociation et d’Interprétation. Le climat des réunions n'est pas désagréable, mais nous avons parfois des désaccords et nous réagissons de façon cordiale ».

Une prochaine réunion le 17 mai 2023

Néanmoins, « le Smic augmente à nouveau le 1er mai 2023, puis au minimum une fois de plus en fin d’année, Il est temps de cesser de jouer les équilibristes. Revaloriser de manière correcte et décente les minimas sociaux est attendu par les salariés du tourisme.

Nous avons encore de nombreux sujets à traiter, et les salariés méritent bien mieux que cette guerre de communication sans fin
 », martèle de son côté la CFE-CGC dans un communiqué (voir ci-dessous en pièce jointe).

La prochaine réunion de la branche est prévue le 17 mai 2023.

Pour l'heure, il devrait y être question de formation, de discussions autour de la complémentaire santé et de la prévoyance, de télétravail. « Cela fait partie des sujets d'attractivité que nous essayons de prioriser pour avancer. Ce ne sont pas des sujets nouveaux, nous avons déjà eu des discussions autour du télétravail notamment, mais tout ceci a été mis en pause pour de nombreuses raisons, explique Morgan Butty.

Cependant, l'ordre du jour n'étant pas officiellement établi, il est toujours possible que les organisations syndicales demandent au secrétaire général de mettre la question de la revalorisation des salaires à l'ordre du jour ».

Une fracture ouverte autour de la prime d'ancienneté

Malgré les échanges cordiaux et la volonté d'avancer dans l'intérêt des entreprises du tourisme, une fracture semble s'être creusée entre organisations patronales et syndicales.

Durant les neuf mois qu'ont duré les NAO (Négociation annuelle obligatoire) 2022, les EDV n'ont eu de cesse de qualifier leur seconde proposition sur les salaires (et qui a été rejetée en bloc par les syndicats) d'« ambitieuse ».

Pour rappel, EDV et SETO proposaient une réévaluation de 8% du salaire minimum du groupe A (soit +1,39% du SMIC actuel), de près de 11% des groupes B, C et D, et de plus de 5% des groupes E, F et G. A cela s'ajoutait le passage automatique du groupe A au groupe B au bout d’un an et la décorrélation de l’assiette de calcul de la prime d’ancienneté et des minima de groupes ainsi que la majoration de cette prime pour les salariés ayant entre 16 et 20 ans d’ancienneté.

Là où le patronat y voyait une « modernisation » du modèle de rémunération prévu dans la convention collective, les syndicats y ont vu la perte du dernier avantage prévu dans la CCN avec un « détricotage » de la prime d'ancienneté.

« La modernisation du mode de calcul de la prime d'ancienneté proposée par les EDV et le SETO entraîne une réduction immédiate de son montant par mois. En multipliant par 12 mois, le résultat pique les yeux…, souligne ainsi la CFE-CGC dans son dernier communiqué.

Dans le contexte actuel d'inflation, le maintien du calcul actuel de la prime d'ancienneté assure une meilleure stabilité financière aux salariés maintenant et encore plus dans le futur !

Les EDV et le SETO ne voient que par la réduction de la prime d’ancienneté qui baissera mécaniquement les salaires sur du long terme. Cette mesure comme les retraites est non recevable, quand le métier n’est plus attractif et peine à embaucher
 ».

Morgan Butty, de son côté, n'accepte pas le fait d'entendre que cette proposition de modernisation soit qualifiée de « régression » ou de « déconstruction ». « Nous proposions de déclencher la prime d'ancienneté au bout de deux ans et non plus trois ans pour valoriser cette ancienneté, avec des montants de référence plus élevés et en faisant appel à un taux de référence au lieu de faire appel au 1% par an des minima.

La position de certains syndicats a été de dire qu'à l'avenir cette prime serait moins-disante, mais en toute sincérité, personne ne peut prédire l'avenir et savoir si le résultat sera moins meilleur, égal ou moins bon sur la durée.

S'ils veulent en faire la démonstration, il leur faudra attendre un an, deux ans, trois ans, or la mise en route faisait montre d'une évolution historique à tous les endroits. C'est ce qui est assez dommage
», regrette le président de la CPPNI.

Les syndicats ont-ils manqué de données chiffrées ?

Mais pour les syndicats, les organisations patronales n'ont pas fourni de chiffres, de données statistiques, ni même un rapport de branche, nécessaires à la bonne réalisation de ces négociations.

« Une négociation de branche n'est pas différente des autres négos. Elle s'apprécie par l'équilibre final trouvé, et c'est bien normal puisque les intérêts sont divergents. Pour apprécier cet équilibre, il faut partir d'éléments transparents ET partagés. Question de visibilité et de sincérité. Pour cela, la Loi - dans sa grande sagesse – a prévu qu'un Rapport de Branche soit fourni aux négociateurs. Le Code du Travail parle de "loyauté" dans la négociation... », rappelle la CFTC.

« On ne peut pas forcer les entreprises à nous donner leur structure de rémunération dans les détails et dans leur intégralité, tout est une question de bonne foi, justifie Morgan Butty.

Sur ce type de négociations, nous décrochons nos téléphones et nous appelons autant d'entreprises que possible sans qu'elles nous donnent tous les détails si elles ne le souhaitent pas, mais nous leur expliquons que nous sommes en train de négocier, nous leur parlons de l'augmentation de la grille et de l'impact que cela peut avoir pour elles, savoir si elles payent au-dessus ou en-dessous des minima ».

Modernisation vs austérité ?

Dernier point de crispation : la mise en place du passage automatique de la catégorie A à B au bout de 12 mois.

« C'est une proposition des organisations syndicales et non pas des EDV et du SETO, rappelle le SNEPAT-FO dans son dernier communiqué (voir ci-dessous en pièce jointe).

Soyons clairs, est-ce normal que des salariés soient considérés comme des débutants (groupe A) 5 à 10 ans après leur arrivée dans différentes entreprises de notre secteur d’activité ? Pour toutes les organisations syndicales, c’est NON ! ».

Mais rajoute le syndicat, « les employeurs bizarrement n’accepteraient cette proposition qu’en contrepartie de la décorrélation de l’ancienneté (pourtant reconfirmée dans la nouvelle convention collective signée en 2022 par les 2 parties, syndicales et patronales) mais la refuse dans leur deuxième proposition d’augmentation des minimas de groupes. Où est la logique ? », s'interroge le SNEPAT-FO.

« La proposition que nous avons faite s'articulait autour de deux axes, rappelle Morgan Butty. Un axe de modernisation, avec une construction cohérente qui lie tous les éléments : une avancée sur les minima, une sur le groupe A et sur la prime d'ancienneté.

Un autre axe « à défaut » dans lequel on continue de réviser les minima conventionnels comme cela a toujours été le cas. Les syndicats ont opté pour la proposition d’austérité
 ».

La CFE-CGC en désaccord avec la rédaction de l'accord

Si les échanges vont se poursuivre dans les prochains mois, les organisations patronales se disent refroidies par le rejet en bloc de leurs propositions de « modernisation ».

« A l'avenir, quand nous aurons des réunions de NAO, nous nous contenterons de faire ce qui a toujours été fait, nous discuterons des minima conventionnels, ajoute Morgan Butty.

Vous savez, après neuf mois de discussions, nous avons eu une grande remise en question, nous nous sommes réellement demandés si nous avions été assez clairs, si nous avions expliqué clairement les mécanismes.

Nous comprenons que certains représentants syndicaux puissent nous dire qu'en l'état des données, ils ne se sentent pas suffisamment confortables pour se projeter et prendre le risque d'opter pour notre proposition, même si de notre côté, nous sommes disposés à prendre ce risque.

En revanche, nous avons du mal avec les syndicats qui nous accusent de dissimuler des données ou des informations et de ne pas respecter la législation, car cela est une accusation grave
 ».

Face à cette situation, la CFE-CGC a décidé de se retirer de la rédaction de l’accord salarial sur les minimas, rédigée par les EDV et le SETO. « Il y a une rédaction qui est floue. Pour nous, l'écriture de l'accord salarial sur les minima n'est pas conforme juridiquement, il y a un mélange dans les termes, entre le SMH, le SMCG et le SMC, on ne sait plus qui est qui », commente la CFE-CGC, que nous avons sollicitée.

Nous avons demandé que cela soit modifié à nouveau, en faisant une proposition de rédaction, mais cela n'a pas été possible ».

Le retrait du syndicat n'aura pas d'impact sur la mise en place du nouvel accord, qui conserve une approbation à la majorité.

Anaïs Borios Publié par Anaïs Borios Journaliste - TourMaG.com
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