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Accueil clients : "aucune chance de devenir vendeur si tu ne sais pas sourire..."

Interview Arnaud Moulin, co-dirigeant du Groupe IFCV et internvenant lors du Convenc'Tour


Le Convenc'Tour 2019 s'est achevé sur la chaleur catalane, mais les preceptes de ce rendez-vous demeurent. Au lieu de faire un compte-rendu des ateliers et plénières, nous vous proposons une interview d'Arnaud Moulin, du Groupe IFCV sur les styles sociaux, les traits de caractère des vendeurs et clients, mais aussi le management à la française.


Rédigé par le Mardi 4 Juin 2019

Arnaud Moulin : "il n'y a aucune raison de devenir vendeur si tu ne sais pas sourire" - Crédit photo : Cediv Travel
Arnaud Moulin : "il n'y a aucune raison de devenir vendeur si tu ne sais pas sourire" - Crédit photo : Cediv Travel
TourMaG.com - Dans un premier temps, pourriez-vous vous présenter ?

Arnaud Moulin :
Je suis co-dirigeant d'un groupe qui s'appelle IFCV, qui comprend plusieurs écoles autour de la communication et de la vente avec différents départements que sont la banque, l'assurance, la distribution, etc.

Me concernant, j'interviens plus particulièrement sur la mise en place de parcours de développement managérial ou des actions de formation très ciblées sur des problématiques bien spécifiques à chaque entreprise.

Dans le cadre du CEDIV et du Convenc'Tour 2019, j'ai été sollicité sur un module que nous avons appelé "mieux se connaître pour mieux manager ou vendre".

L'idée étant de comprendre comment nous (individu, ndlr) fonctionnons avec ses zones de confort et ses zones d'efforts, puis essayer de mieux comprendre les autres pour pouvoir adapter son discours en fonction du profil de son interlocuteur.

TourMaG.com - Comment identifier la personnalité de la personne qui nous fait face ?

Arnaud Moulin :
Pour cela nous utilisons un produit que nous appelons "Persona", pour lequel nous avons une certification. Nous abordons la problématique des styles sociaux et de communication.

En résumé, il est possible de vendre le même voyage à 4, voire même 16 personnes aux styles sociaux différents, d'une manière bien contrastée.

"...il convient d'adapter son discours, pour vendre mieux et donc plus..."

TourMaG.com - Pourriez-vous nous expliquer justement ce que sont les styles sociaux ?

Arnaud Moulin :
Il existe quatre grands styles que sont "Promouvant", "Facilitant", "Contrôlant" et "Analysant". Avant de rentrer dans l'explication, chacun doit comprendre que nous sommes tous différents, avec un mode de fonctionnement préférentiel et dominant.

L'idée est de faire un travail sur soi, car nous avons tous les qualités de nos défauts et les défauts de nos qualités. Quand une personne veut rentrer dans une optique de développement personnel, il est inévitable de faire un travail d'introspection.

Cela permet d'identifier ces zones de confort et de vigilance, toutes ces réflexions sont utilisables pour se positionner face à son interlocuteur et émettre des hypothèses sur cette personne.

Un individu "promouvant" va se mettre naturellement en avant, prendre la parole, et se tourne vers les autres, il convient d'adapter son discours, pour vendre mieux et donc plus.

TourMaG.com - D'où vient le modèle "Persona" ?

Arnaud Moulin :
C'est une technique américaine. Le modèle "Persona" découle de la psychosociologie qui remonte à Freud, Young et l'Ecole de Palo Alto. Il est enseigné partout dans le monde à partir d'institut ayant des certifications.

Pour revenir sur l'origine du modèle, il faut remonter dans les années 50, suite aux premiers travaux, la technique a été améliorée, affinée grâce aux différentes statistiques faites au cours des dernières décennies.

"le Français serait sensiblement "promouvant" donc centré sur lui-même"

TourMaG.com - En utilisant ce modèle, comment peut-on qualifier la population française ?

Arnaud Moulin :
Il existe des cultures dominantes dans les pays, ce qui ne veut pas dire que tous les styles sociaux ne sont pas présents.

Ainsi, le Français serait sensiblement "promouvant" donc centré sur lui-même, mais néanmoins nous avons une exception propre d'être vindicatifs, et souvent dans l'émotion.

Lorsque nous combattons, nous le faisons avec émotion, ce n'est pas toujours rationnel. Cette préférence naturelle peut s'appliquer aux peuples latins.

En France, il est toujours difficile de mettre en place des choses, car nous n'aimons pas les cadres, alors que les pays nordiques sont "contrôlants" et donc dans l'efficacité, ce qui est aussi le cas dans certains pays asiatiques.

Ces styles sociaux peuvent expliquer les problèmes de gouvernance de notre pays, nous sommes capables de choses extraordinaires car le Français est créatif, intuitif qui sent bien les choses.

TourMaG.com - Cette culture est-elle compatible avec un bon vendeur ou manager ?

Arnaud Moulin :
Bien souvent, j'entends que la France est un désert managérial. Il existe une vraie problématique à ce niveau.

Quand une entreprise va recruter un manager et que la personne en charge des ressources humaines, lui demande ce qu'est son métier, les réponses données, bien souvent, sont partielles alors qu'un manager est un cadre au sens propre du terme.

Nous avons rajouté des couches décennies après décennies, pour arriver à la bonne définition. Dans les années 70, le métier de manager était associé à celui de cadre, nous étions avant les chocs pétroliers, un moment où il fallait respecter des règles pour produire plus.

Deux crises plus tard, le manager devient "motive acteur", car la dynamique économique est à la concurrence, il est indispensable de conquérir des parts de marché pour exister et fixer des objectifs.

Puis une décennie après, ce constat ne suffit pas, il faut devenir un leader. C'est une personne qui a une vision, donne et tient un cap. Puis dans les années 2000, ce rôle est dépassé, le manager doit devenir un coach, il développe les compétences, il soutient son équipe.

Et le jour, où un candidat me sortira qu'un manager doit être un cadre, un motiv-acteur, un leader, mais qui est au quotidien aussi un coach, sauf qu'en France nous n'avons pas cette culture.

En France "le management très mal enseigné dans nos écoles"

TourMaG.com - Pourquoi, la France n'est pas un pays de managers ?

Arnaud Moulin :
Tout simplement car le management est très mal enseigné dans nos écoles. Nous parlons de management des organisations ou de projets, mais rarement des hommes.

De l'autre côté de l'Atlantique, les Américains ont cette culture du management. Lors du Convenc'Tour, nous avons abordé la notion de quotient émotionnel (capacité à gérer ses émotions, ndlr). Des études nous prouvent qu'une personne ayant un fort quotient émotionnel réussira plus facilement dans les organisations modernes qu'une personne sur-diplômée.

C'est un peu du bon sens, en gérant au mieux ses émotions, les décisions prises sont plus factuelles, moins dans l'enthousiasme ou la colère. Dans les universités américaines, les travaux de Daniel Goleman (quotient émotionnel, ndlr) sont depuis des années enseignées.

Il y a 10 ans, si vous abordiez ce sujet, vous étiez à la limite de l'ésotérisme. Cela a changé avec le temps, nous y venons doucement. Mais il est vrai que nous avons en France un train de retard.

TourMaG.com - Est-ce aussi le cas dans la vente ?

Arnaud Moulin :
Un peu aussi, nous nous inspirons des pratiques américaines, pour vendre mieux ou plus. Finalement, le management et la vente sont des actes de communication.

A partir du moment où l'individu maîtrise sa com' et qu'elle se comprend mieux elle-même, ce qui implique les autres aussi, et bien les ventes seront de meilleures qualités et plus nombreuses.

"Nous avons encore un énorme travail à faire sur l'élégance comportementale et relationnelle"

TourMaG.com - Que doit rassembler comme qualités un agent de voyages ?

Arnaud Moulin :
Au-delà des qualités, une personne "promouvante" est tournée vers les autres, qui se met en avant et prend la parole, est de bonne typologie pour vendre.

Attention, cette affirmation ne veut pas dire que des bons "analysants" ou "facilitants" ne feront pas des commerciaux hors pair. Il ne faut pas oublier que la compétence prime sur le style social.

Pour être un bon vendeur, il est indispensable d'aimer les gens. car une demande cela s'accueille. Le sens du service est fondamental. L'écoute est aussi un aspect important pour réaliser une argumentation qui soit sélective, pour mettre en évidence que tu as bien compris les besoins de ton client.

Il suffit de se promener dans les agences de voyages ou les commerces pour se rendre compte que le minimum n'y est pas. Pour se rendre compte du chemin à parcourir, il faut se rendre Aux Etats-Unis. Il ont là-bas une telle qualité d'accueil et de service qui nous fait dire que nous sommes encore très loin de leur niveau.

En France, nous avons encore un énorme travail à faire sur l'élégance comportementale et relationnelle. Je fais une petite métaphore pour résumer la chose. Il n'y a aucune raison de devenir vendeur si tu ne sais pas sourire, ça n'a pas de sens.

"Nous sommes un peuple dans le jugement et l'émotion"

TourMaG.com - En France, nous avons un véritable problème à accepter la différence. Je vais citer l'exemple d'Unai Emery, l'ancien coach du PSG qui confiait récemment "quand je suis arrivé à Paris, j'ai essayé de parler français. Et la réponse, sarcastique, était que je ne le parlais pas bien. À Londres, j'utilise un Anglais très basique et tout le monde me sourit et me remercie d'avoir essayé." Cela pèse-t-il sur nos relations et notre sens de la vente ?

Arnaud Moulin :
Nous sommes un peuple dans le jugement et l'émotion. Par exemple, chez nous un vendeur avec une belle voiture sera mal vu, aux USA ce sera le contraire, un véhicule cher signifie qu'il faut bosser avec lui, car il est performant.

Nous avons une culture du secret, cela correspond à notre zone d'effort ou défaut. Après nous sommes aussi très créatifs, ce qui nous permet aussi de nous en sortir et retomber sur nos pattes.

TourMaG.com - En tant que professionnel de l'observation et du comportement, comment analyses-tu les adhérents du CEDIV ?

Arnaud Moulin :
J'ai trouvé des personnes très sympathiques, qui ont plaisir à se retrouver. Tout au long de ma carrière j'ai eu la chance de faire énormément de congrès, j'ai rarement été intégré à ce niveau, avec l'impression de faire partie de la "famille".

En général, les adhérents sont très faciles d'accès, avec une communication bienveillante et un état d'esprit assez agréable. Le réseau est mené avec fermeté, c'est une qualité indispensable pour apporter du cadre et fixer un cap.

Pour tout vous dire, j'ai été réellement surpris par la capacité à être festif et dans le même temps être sérieux et concerné.

"Internet...oblige à nous professionnaliser"

TourMaG.com - La montée en puissance d'internet a-t-elle changé le comportement des clients ?

Arnaud Moulin :
C'est une certitude que les modes de consommation ont changé. Mais d'après une récente étude l'achat moyen sur internet tourne autour de 70 euros.

Internet doit être vu comme un outil générateur de trafic, le client prend de l'information avant de venir en agence, ce qui implique une super formation des vendeurs.

Avec le web, le niveau d'exigence a augmenté. Je ne pense pas que les agences physiques disparaîtront, car nous avons toujours besoin de l'expertise humaine.

TourMaG.com - Ce qui implique aux agents à être plus "contrôlant" (être dans le détail, ndlr) ?

Arnaud Moulin :
Je ne sais pas, mais cela oblige surtout les vendeurs à très bien connaître leur métier et être à l'écoute de leurs clients.

Cette constatation ne se limite pas au tourisme. Elle s'applique dans tous les secteurs d'activité. Internet ne remplacera jamais la relation humaine, la communication interpersonnelle, mais oblige à nous professionnaliser.

"...le voyage serait-il une vente plus émotionnelle ?"

TourMaG.com - Les agents de voyages sont majoritairement des femmes, contrairement à l'automobile par exemple. Auriez-vous une explication à cela ?

Arnaud Moulin :
C'est une excellente question et je dois bien vous avouer que je n'ai pas d'explication à ce phénomène. Historiquement, il y a toujours eu des secteurs qui sont féminins ou masculins.

Cela peut sans doute s'expliquer par une sensibilité que les hommes non pas. Je reconnais ne pas vraiment savoir. L'automobile est une activité très masculine, alors que le tourisme l'est moins.

Je me suis fait cette réflexion lors de cette convention, le voyage serait-il une vente plus émotionnelle ? Je ne le pense pas, car acheter une voiture relève aussi de l'émotion. Il n'y a rien de rationnel, ni même de précédent historique.

L'aspect organisationnel des femmes découlant de la société d'après-guerre pourrait "peut-être" expliquer cette constatation.

Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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Commentaires

1.Posté par d'Amécourt le 05/06/2019 12:08 | Alerter
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Bravo Arnaud et Romain pour ce bel article. Arnaud juste pour partager mon point de vue avec toi et les CEDIVIENS, je pense au contraire que la vente de voyages est fortement émotionnelle. Car un agent de voyages vend un beau projet, non palpable, et qui peut souvent être très cher, type l'équivalent d'une cuisine à refaire ou autre investissement fréquent et important ; le client final doit payer à l'avance ce projet qui de plus peut parfois être gâché par une mauvaise météo. Peu ou pas de produits ou prestations se payent à l'avance pour l'obtenir après. Soit une situation d'achat stressante pour le client final et certainement une des ventes les plus compliquées à faire, du fait notamment de cet aspect émotionnel. En tout cas bravo à vous tous chers partenaires, vous faites vraiment un beau métier !

2.Posté par Arnaud le 05/06/2019 16:26 | Alerter
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Merci Stéphane,
Mais je suis tout à fait d’accord avec toi, le vente d’un voyage est une vente émotionnelle par définition. Avoir de la compétence émotionnelle consiste à gérer ses émotions mais également à comprendre celles de son interlocuteur pour adapter sa vente et être au plus proche de ses réalités, attentes et besoins.

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