
Arnaud Fontanille (EDV) : IATA, SNCF... "Nous voulons changer le rapport de force" - Photo Marietton
TourMaG - Vous êtes depuis l'an dernier en charge de la commission transport au sein des Entreprises du voyage, quelle est la feuille de route ?
Arnaud Fontanille : L'objectif était de poursuivre le travail engagé par Valérie Sasset (BCD Travel), qui occupait cette fonction jusqu’à l’année dernière.
La commission Transport a bien sûr repris ses discussions avec la SNCF, Amadeus, et Air France.
Cependant, j'ai un peu revu l'organisation des rencontres avec ces différents intervenants, afin d'être plus proches d'eux, et d'anticiper au maximum les changements qui pourraient nous affecter.
TourMaG - C'est à dire ?
Arnaud Fontanille : Les décisions que peuvent prendre ces trois grandes entreprises peuvent avoir un impact sur les opérateurs de voyages et de séjours. Elles changeaient souvent de système sans forcément tenir compte de l’opérationnel des agences.
Des évolutions étaient mises en place, et les agences les découvraient après coup : c’était la catastrophe, cela bouleversait tout... Nous n'étions pas prévenus, ou mal prévenus.
La grande priorité a donc été d’essayer de travailler avec ces partenaires pour anticiper les évolutions afin d'être informés de ce qui se passe - sous le sceau de la confidentialité - et surtout que nous puissions anticiper les problèmes potentiels.
Il fallait aussi pouvoir leur demander de modifier leur développement ou leurs priorités, afin que la transition soit la plus fluide possible. D’ailleurs, depuis quelques mois, nos relations sont plus sereines.
Arnaud Fontanille : L'objectif était de poursuivre le travail engagé par Valérie Sasset (BCD Travel), qui occupait cette fonction jusqu’à l’année dernière.
La commission Transport a bien sûr repris ses discussions avec la SNCF, Amadeus, et Air France.
Cependant, j'ai un peu revu l'organisation des rencontres avec ces différents intervenants, afin d'être plus proches d'eux, et d'anticiper au maximum les changements qui pourraient nous affecter.
TourMaG - C'est à dire ?
Arnaud Fontanille : Les décisions que peuvent prendre ces trois grandes entreprises peuvent avoir un impact sur les opérateurs de voyages et de séjours. Elles changeaient souvent de système sans forcément tenir compte de l’opérationnel des agences.
Des évolutions étaient mises en place, et les agences les découvraient après coup : c’était la catastrophe, cela bouleversait tout... Nous n'étions pas prévenus, ou mal prévenus.
La grande priorité a donc été d’essayer de travailler avec ces partenaires pour anticiper les évolutions afin d'être informés de ce qui se passe - sous le sceau de la confidentialité - et surtout que nous puissions anticiper les problèmes potentiels.
Il fallait aussi pouvoir leur demander de modifier leur développement ou leurs priorités, afin que la transition soit la plus fluide possible. D’ailleurs, depuis quelques mois, nos relations sont plus sereines.
NDC : "Nous sommes presque au bout, mais il faudra encore environ six mois de travail"

Arnaud Fontanille : Sur le sujet de la hausse de la Taxe de Solidarité des Billets d'avion (TSBA) qui a été anticipée avant le vote et finalement suspendue suite à la censure du gouvernement, nous avons travaillé avec les compagnies : Air France, Corsair et d'autres pour faciliter son remboursement. Si nous avions suivi les consignes initialement prévues par les transporteurs, cela aurait tourné au cauchemar.
Idem avec la SNCF, ils ont de nombreux projets dans les cartons et nous essayons d'anticiper.
TourMaG - Sur NDC comment se sont déroulées les séances de travail ?
Arnaud Fontanille : Concernant NDC, il s’agissait de veiller à ce qu’Amadeus et Air France communiquent efficacement et qu’il y ait une cohérence globale entre les fonctionnalités mises en place, que ce soit dans les GDS ou par les compagnies aériennes, en particulier Air France.
Concrètement, à chaque commission, nous passions en revue, dans le détail, l’ensemble des fonctionnalités prévues dans la feuille de route, afin de vérifier qu’elles correspondaient à nos attentes.
Nous procédions également à des exercices de repriorisation pour améliorer les choses. Cela a été un processus complexe, parfois chaotique, mais depuis 12 à 18 mois, la collaboration est devenue beaucoup plus fluide : nous travaillons désormais ensemble et la situation s’est nettement améliorée.
Nous travaillons encore sur NDC, il reste quelques petites problématiques. Nous ne pouvons pas avoir par exemple la liste des billets non utilisés. C’est une fonctionnalité qui n’a pas encore été développée. Après, c’est très technique : il reste une série de petites fonctionnalités manquantes. Nous sommes presque au bout, mais il faudra encore environ six mois de travail sur NDC. Ensuite, je pense que nous pourrons enfin passer à autre chose.
SNCF : "Nous avons un très gros sujet : c'est la régionalisation de l'offre train"
TourMaG - Avec la SNCF quels sont les sujets ?
Arnaud Fontanille : Nous avons un très gros sujet : c'est la régionalisation de l'offre train. Les ventes TGV Inoui, Ouigo, Intercités ou TER... tout passe par les mêmes canaux.
Demain, les régions vont avoir la possibilité de développer en toute autonomie leur propre système et leur propre offre. Elles pourraient donc sortir des outils SNCF, mais n'ont pas conscience de l'impact que cela pourrait avoir pour les agences de voyages.
Nous n'en sommes qu'au début des discussions. Le processus sera long, mais c’est un sujet absolument majeur, car demain, les agences auront besoin de pouvoir distribuer l’offre train facilement via des outils automatisés, sans devoir tout gérer manuellement.
Arnaud Fontanille : Nous avons un très gros sujet : c'est la régionalisation de l'offre train. Les ventes TGV Inoui, Ouigo, Intercités ou TER... tout passe par les mêmes canaux.
Demain, les régions vont avoir la possibilité de développer en toute autonomie leur propre système et leur propre offre. Elles pourraient donc sortir des outils SNCF, mais n'ont pas conscience de l'impact que cela pourrait avoir pour les agences de voyages.
Nous n'en sommes qu'au début des discussions. Le processus sera long, mais c’est un sujet absolument majeur, car demain, les agences auront besoin de pouvoir distribuer l’offre train facilement via des outils automatisés, sans devoir tout gérer manuellement.
IATA, SNCF... : "Nous sommes dans un rapport de force déséquilibré, nous voulons changer cela"
TourMaG - Un autre sujet revient souvent lors des grands congrès de la profession, c'est le modèle économique des agences qui est mis à mal par les rémunérations, ou décisions que prennent ces grands transporteurs...
Arnaud Fontanille : Effectivement, c'est un véritable sujet. Vendre du train, n'est pas rentable pour les agences de voyages.
C'est un dossier que nous souhaitons remettre sur la table et que nous allons lancer pour rediscuter du modèle économique. Nous avons un déséquilibre sur le train du fait du monopole de la SNCF.
Du côté des compagnies aériennes, c'est IATA qui met une pression d'enfer sur les agences pour avoir des garanties. En revanche quand il y a des compagnies aériennes en difficultés, rien n'est garanti. IATA est de plus en plus strict et demande de nombreuses garanties bancaires.
Les délais de paiement de l'aérien vont s'accélérer. Aujourd'hui, la majorité des agences paie à 15 jours, sous réserve que leur bilan soit bon. D'ici début 2027, il est prévu que nous passions au règlement hebdomadaire. Dès qu'il y a une décision qui est prise, elle est à notre détriment.
Ce ne sont pas des combats faciles, car tout ne se réglera pas du jour au lendemain. Mais la volonté, c'est d'aller peut-être un peu plus loin pour faire porter notre voix et essayer d'améliorer les choses autant que possible.
Le combat est plus large que cela. Nous sommes dans un rapport de force qui est totalement déséquilibré, et inégal. Nous voulons changer cela.
Avec Valérie Boned (Président des Entreprises du Voyage) l'objectif est vraiment de mettre un peu plus de pression sur ces sujets là.
Arnaud Fontanille : Effectivement, c'est un véritable sujet. Vendre du train, n'est pas rentable pour les agences de voyages.
C'est un dossier que nous souhaitons remettre sur la table et que nous allons lancer pour rediscuter du modèle économique. Nous avons un déséquilibre sur le train du fait du monopole de la SNCF.
Du côté des compagnies aériennes, c'est IATA qui met une pression d'enfer sur les agences pour avoir des garanties. En revanche quand il y a des compagnies aériennes en difficultés, rien n'est garanti. IATA est de plus en plus strict et demande de nombreuses garanties bancaires.
Les délais de paiement de l'aérien vont s'accélérer. Aujourd'hui, la majorité des agences paie à 15 jours, sous réserve que leur bilan soit bon. D'ici début 2027, il est prévu que nous passions au règlement hebdomadaire. Dès qu'il y a une décision qui est prise, elle est à notre détriment.
Ce ne sont pas des combats faciles, car tout ne se réglera pas du jour au lendemain. Mais la volonté, c'est d'aller peut-être un peu plus loin pour faire porter notre voix et essayer d'améliorer les choses autant que possible.
Le combat est plus large que cela. Nous sommes dans un rapport de force qui est totalement déséquilibré, et inégal. Nous voulons changer cela.
Avec Valérie Boned (Président des Entreprises du Voyage) l'objectif est vraiment de mettre un peu plus de pression sur ces sujets là.
TourMaG - Concrètement comment mettre la pression sur IATA ?
Arnaud Fontanille : Aujourd’hui, il existe des systèmes permettant de contourner partiellement la situation grâce aux cartes de paiement, en réglant directement auprès des compagnies aériennes. C’est un sujet que nous allons mettre sur la table. Certaines compagnies permettent en effet d’être payées par carte, et la résolution IATA l’autorise, à condition que la compagnie soit d’accord.
Actuellement, un tiers des compagnies aériennes acceptent ce mode de règlement. L’avantage, c’est que le paiement par carte garantit en cas de faillite de la compagnie, ce qui est loin d’être négligeable, et le transporteur reçoit son argent immédiatement. Il y a donc un bénéfice pour tout le monde, tout en réduisant la dépendance vis-à-vis de l’IATA.
Pour les agences qui adoptent ce modèle, cela permet de diminuer leur niveau d’exposition IATA, ainsi que les garanties bancaires associées.
Ces systèmes existent, mais ils ne sont pas encore tous totalement fiables, et surtout, deux tiers des compagnies aériennes ne les acceptent pas, dont la plus importante, la compagnie nationale. Ce sera donc un point essentiel à discuter avec elles.
Arnaud Fontanille : Aujourd’hui, il existe des systèmes permettant de contourner partiellement la situation grâce aux cartes de paiement, en réglant directement auprès des compagnies aériennes. C’est un sujet que nous allons mettre sur la table. Certaines compagnies permettent en effet d’être payées par carte, et la résolution IATA l’autorise, à condition que la compagnie soit d’accord.
Actuellement, un tiers des compagnies aériennes acceptent ce mode de règlement. L’avantage, c’est que le paiement par carte garantit en cas de faillite de la compagnie, ce qui est loin d’être négligeable, et le transporteur reçoit son argent immédiatement. Il y a donc un bénéfice pour tout le monde, tout en réduisant la dépendance vis-à-vis de l’IATA.
Pour les agences qui adoptent ce modèle, cela permet de diminuer leur niveau d’exposition IATA, ainsi que les garanties bancaires associées.
Ces systèmes existent, mais ils ne sont pas encore tous totalement fiables, et surtout, deux tiers des compagnies aériennes ne les acceptent pas, dont la plus importante, la compagnie nationale. Ce sera donc un point essentiel à discuter avec elles.
Arnaud Fontanille : "la facturation électronique est un autre sujet majeur"
TourMaG - Suivez-vous aussi le changement important à venir sur la facturation électronique ?
Arnaud Fontanille : En effet ce projet est majeur. Les opérateurs n’en ont pas encore pleinement conscience, mais c’est un chantier que nous prenons en main avec les EDV. Le sujet est très complexe et va arriver très vite. Les grandes entreprises seront concernées dès septembre 2026, les autres en septembre 2027. Or, aujourd’hui, notre secteur d’activité n’est pas du tout préparé ni sensibilisé à ces enjeux.
Ce travail ne passe pas par la commission transport, mais s’effectue plutôt en chambre, en lien avec le gouvernement, la DGFIP (Direction générale des Finances publiques) et les services fiscaux, afin de définir les modalités de mise en œuvre de cette facturation électronique.
A la lecture des textes, il s’agit, je le répète, d’un changement majeur pour le fonctionnement des agences, mais aussi pour les compagnies aériennes, la SNCF, etc.
Un groupe de travail a été constitué, réunissant les EDV, quelques agences, la SNCF et Air France, afin de trouver une position et une méthode communes, et de proposer un amendement au texte pour rendre la transition plus fluide pour tous.
C’est un point très positif de pouvoir se réunir. Le seul bémol, c’est que nous n’avons pas encore obtenu les validations de l’État, même si le processus est en cours. Une fois cette étape franchie, il restera tout le travail d’accompagnement à réaliser auprès des agences.
Arnaud Fontanille : En effet ce projet est majeur. Les opérateurs n’en ont pas encore pleinement conscience, mais c’est un chantier que nous prenons en main avec les EDV. Le sujet est très complexe et va arriver très vite. Les grandes entreprises seront concernées dès septembre 2026, les autres en septembre 2027. Or, aujourd’hui, notre secteur d’activité n’est pas du tout préparé ni sensibilisé à ces enjeux.
Ce travail ne passe pas par la commission transport, mais s’effectue plutôt en chambre, en lien avec le gouvernement, la DGFIP (Direction générale des Finances publiques) et les services fiscaux, afin de définir les modalités de mise en œuvre de cette facturation électronique.
A la lecture des textes, il s’agit, je le répète, d’un changement majeur pour le fonctionnement des agences, mais aussi pour les compagnies aériennes, la SNCF, etc.
Un groupe de travail a été constitué, réunissant les EDV, quelques agences, la SNCF et Air France, afin de trouver une position et une méthode communes, et de proposer un amendement au texte pour rendre la transition plus fluide pour tous.
C’est un point très positif de pouvoir se réunir. Le seul bémol, c’est que nous n’avons pas encore obtenu les validations de l’État, même si le processus est en cours. Une fois cette étape franchie, il restera tout le travail d’accompagnement à réaliser auprès des agences.
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TourMaG - Qui compose la commission Transport ?
Arnaud Fontanille : Nous avons tous les types d'acteurs, agences loisirs, affaires, TMC, groupes, des petits réseaux, des grands réseaux, des petites agences, des plus importantes, nous avons même des prestataires technologiques.
Il y a une dernière chose que j’aimerais mettre en place : offrir aux agences, dans le cadre de cette commission, une présentation des nouveaux produits qui arrivent sur le marché.
Dans le domaine des paiements, par exemple, il y a actuellement beaucoup de changements et d’innovations. Or, les agences plus petites n’en ont pas toujours connaissance. L’idée serait donc que la commission transport devienne une sorte de plateforme où ces nouveautés puissent être présentées et expliquées, afin que les agences puissent ensuite choisir de les adopter ou non. L’essentiel est qu’elles soient informées de ce qui existe et des solutions disponibles en matière de nouveaux produits et d’innovations, car aujourd’hui, elles subissent souvent ces évolutions sans réelle visibilité.
Arnaud Fontanille : Nous avons tous les types d'acteurs, agences loisirs, affaires, TMC, groupes, des petits réseaux, des grands réseaux, des petites agences, des plus importantes, nous avons même des prestataires technologiques.
Il y a une dernière chose que j’aimerais mettre en place : offrir aux agences, dans le cadre de cette commission, une présentation des nouveaux produits qui arrivent sur le marché.
Dans le domaine des paiements, par exemple, il y a actuellement beaucoup de changements et d’innovations. Or, les agences plus petites n’en ont pas toujours connaissance. L’idée serait donc que la commission transport devienne une sorte de plateforme où ces nouveautés puissent être présentées et expliquées, afin que les agences puissent ensuite choisir de les adopter ou non. L’essentiel est qu’elles soient informées de ce qui existe et des solutions disponibles en matière de nouveaux produits et d’innovations, car aujourd’hui, elles subissent souvent ces évolutions sans réelle visibilité.