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Faux reportages IA : le tourisme face à une vague de désinformation sans précédent

La chronique de Guillaume Vigneron, fondateur de la Super Agence SAS


Un couple persuadé de partir pour un paradis malaisien découvre, une fois sur place, que Kuak Hulu n’existe pas : leur destination rêvée était une pure invention de l’intelligence artificielle. Guillaume Vigneron, fondateur de la Super Agence SAS revient sur ce cas et bien d'autres qui illustrent une menace grandissante pour le tourisme : la prolifération de faux contenus générés par IA...


Rédigé par le Lundi 8 Décembre 2025

Destination phare du tourisme mondial, la France reste pourtant l'une des plus difficiles à commercialiser pour les agences françaises. Marges réduites, accès direct aux hébergements, morcellement de l’offre, perception que l’agence coûte plus cher : autant d’obstacles qui freinent le développement d’un marché pourtant immense. Pourtant, il apparait indispensable pour une agence de voyages de savoir vendre la France. Et les solutions existent, à condition d’adapter méthodes, outils et positionnement.

Faux reportages IA : le tourisme face à une vague de désinformation sans précédent - Photo d'un village provençal générée par IA (Sora)
Faux reportages IA : le tourisme face à une vague de désinformation sans précédent - Photo d'un village provençal générée par IA (Sora)
Comme nous vous le révélions dans un précédent article, le tourisme n'est pas épargné par la déferlante de faux contenus générés par l'IA.

Un couple planifie ses vacances en Malaisie après avoir visionné une vidéo époustouflante : téléphérique futuriste, zoo sous-marin, plages immaculées. Arrivés sur place après des heures de transport, la stupeur : Kuak Hulu, la destination de leurs rêves, n'existe pas !

C’était une pure création de l'intelligence artificielle.

Cette histoire n'est hélas pas un cas isolé. Elle illustre une tendance inquiétante qui frappe de plein fouet le secteur du tourisme : la multiplication des faux contenus générés par l'IA. Des vidéos ultra-réalistes, des articles de presse contrefaits, des photos retouchées à la perfection... L'intelligence artificielle permet désormais de créer des destinations entières de toutes pièces.

En Alsace, le phénomène touche également les professionnels locaux. Des faux reportages concernant des villes et villages typiques de la région se multiplient, truffés de mensonges et d'erreurs. Une situation qui met en péril la crédibilité de l'ensemble du secteur.

A lire aussi : Comment détecter, grâce à l’IA, les tendances de voyage sur les réseaux sociaux ?


Faux reportages IA : des chiffres alarmants, en augmentation constante

Autre vue du village provençal générée par IA (SORA)
Autre vue du village provençal générée par IA (SORA)
Les données récentes révèlent l'ampleur du phénomène.

Selon l'entreprise "The Transparency Company", le nombre de faux avis en ligne générés par IA augmente de 80% chaque mois depuis juin 2023. Autrement dit, ces contenus frauduleux doublent presque tous les 30 jours !

L'analyse de SEO Travel montre que 90% des itinéraires générés par des outils comme ChatGPT comportent des erreurs factuelles : lieux fictifs, horaires incorrects, attractions inexistantes. Par ailleurs, environ 6% des avis en ligne sont aujourd'hui générés par l'IA, un chiffre qui paraît faible mais dont la croissance exponentielle inquiète les professionnels, en dépit de la vigilance des plateformes (Tripdavisor, Trustpilot, Yelp, etc).

L'industrialisation de cette désinformation atteint des sommets.

Certains créateurs de faux contenus peuvent produire plus de 150 articles par jour sur un seul site, dans un objectif purement mercantile : générer du trafic pour toucher jusqu'à 100 000 dollars de revenus publicitaires ou mettre en place des arnaques à grande échelles, via le versement d’arrhes par exemple.

Une confiance en chute libre

Les conséquences sur le comportement des consommateurs sont déjà visibles. Selon une récente étude de Global Security Mag, 63% des Français se disent aujourd'hui plus préoccupés par les deepfakes qu'il y a un an. Plus d'un tiers (34%) affirment que leur confiance dans la planification et la réservation de vacances a diminué.

Le problème touche particulièrement les voyageurs soucieux de leur budget : 36% des Français cherchant à limiter leurs dépenses sont plus susceptibles de cliquer rapidement sur une offre alléchante vue en ligne, augmentant ainsi le risque de tomber dans le piège.

Pour les professionnels du tourisme, cette érosion de la confiance représente une menace majeure. Agences de voyages, offices de tourisme, hôteliers et tour-opérateurs constatent que leurs clients arrivent déjà méfiants, échaudés par des expériences négatives ou des contenus trompeurs rencontrés en ligne.

Une double menace pour les professionnels

Le phénomène des faux reportages IA constitue un danger à deux niveaux pour le secteur. D'une part, il érode la confiance globale des consommateurs envers la réservation en ligne.

D'autre part, il nuit directement à la réputation des destinations réelles, noyées dans un océan de contenus frauduleux. Les arnaques prennent différentes formes. L'IA permet de créer des e-mails et des messages d'hameçonnage (phishing) quasi parfaits, imitant à la perfection le ton de plateformes légitimes comme les hôtels, compagnies aériennes ou sites de réservation.

Les faux reportages touristiques, à l'image de Kuak Hulu, montrent qu'une destination entière peut être inventée avec des images et vidéos extrêmement convaincantes.

Quelles sont les pistes de riposte ?

Face à cette vague de désinformation, les professionnels du tourisme ne restent pas les bras croisés. Plusieurs stratégies émergent pour contrer le phénomène.

Renforcer l'authenticité. Des associations professionnelles et offices de tourisme travaillent à la mise en place de labels ou de filigranes numériques basés sur la blockchain pour certifier l'origine et l'authenticité de leurs contenus visuels. L'idée : multiplier le contenu authentique de manière identifiable. Certains utilisent les réseaux sociaux pour montrer les coulisses de la création de contenu, humanisant le processus et contrastant avec l'anonymat de l'IA.

Veille et détection active. Des outils de veille scannent désormais le web à la recherche de mentions suspectes présentant les caractéristiques de l'IA : textes génériques, images trop parfaites, fausses attractions. Certaines structures envisagent de créer des équipes dédiées, de véritables "chasseurs de faux", chargés de vérifier les nouvelles destinations virales et de démasquer rapidement les canulars.

Éduquer le public. Les professionnels multiplient les guides pratiques expliquant aux clients comment détecter un faux reportage IA. Des newsletters, blogs et posts sur les réseaux sociaux détaillent les signes qui doivent alerter : photos trop parfaites, incohérences dans les détails locaux, absence de traces sur plusieurs sources officielles.

Action légale et réglementaire. Les associations professionnelles font pression pour obtenir des règles plus strictes. Le lobbying s'intensifie auprès des instances nationales et européennes, notamment concernant l'AI Act, pour exiger un étiquetage obligatoire des contenus générés par l'IA. Certains envisagent des actions en justice groupées contre les plateformes ou créateurs de faux contenus les plus dommageables.

La nécessité d’une mobilisation urgente

Pour les experts du secteur, le temps presse. La production de faux contenus double chaque mois, et la méfiance des consommateurs s'installe durablement. Quand la confiance globale s'effondre, tout le secteur en pâtit car les acteurs honnêtes comme les fraudeurs sont mis dans le même panier.

La stratégie recommandée combine plusieurs approches : investir dans l'authenticité certifiée, mettre en place une veille anti-fraude numérique, éduquer les clients pour qu'ils deviennent acteurs de la défense de l'information fiable, et peser sur le législateur pour obtenir un cadre plus contraignant.
Reste à savoir si ces mesures suffiront à endiguer un phénomène qui prend de l'ampleur chaque jour.

Une chose est certaine : le tourisme vit une transformation profonde, où la distinction entre le vrai et le faux devient un enjeu majeur pour l'ensemble de la profession.

Guillaume Vigneron - Photo : Super Agence SAS
Guillaume Vigneron - Photo : Super Agence SAS
Guillaume Vigneron est le fondateur de la Super Agence SAS, basée à Paris.

Cette agence de communication RH, à l’origine du concept d’Inbound Recruiting, travaille pour tous les secteurs d’activité en aidant ses clients à créer des messages pertinents pour leurs candidats, à mettre en place des stratégies de contenus Marque Employeur et à conseiller les métiers du recrutement et de la communication à améliorer leur efficacité.

Guillaume Vigneron est également conférencier et enseignant en communication et image de marque employeur à l’Université de Versailles et à l’ESG.

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