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Manor : pour détrôner Selectour, le réseau va devoir vite se structurer ! [ABO]

La structuration et la technologie deviennent indispensables pour Manor


Il y a les chiffres et il y a la réalité du terrain. Si, dans les faits, le réseau Manor Loisirs est une réussite, sa structuration et son animation laissent encore à désirer. Aujourd’hui, 450 agences de voyages le composent, pour 500 millions d’euros de volume d’affaires. Un succès d’estime qu’il reste désormais à transformer. Le plus dur est à venir, d’autant que Manor affiche l’ambition de devenir le leader français d’ici 2030. Un plan ambitieux, non sans freins.


Rédigé par le Vendredi 10 Octobre 2025

La structuration et la technologie deviennent indispensables pour Manor - RP
La structuration et la technologie deviennent indispensables pour Manor - RP
Il y a un an, le congrès Manor débutait avec une annonce d’envergure : la création de son GIE Loisirs.

Depuis déjà plusieurs années, les adhérents s’inquiétaient de la faiblesse des volumes sur ce segment, mais aussi du manque de cohérence du réseau.

Grégory Mavoian, président du réseau, avait alors pris son bâton de pèlerin pour étudier les alternatives existantes sur le marché, de Selectour à TourCom.

La solution est finalement venue d’un adhérent : Prêt à Partir.

Les tour-opérateurs voyaient d’ailleurs d’un bon œil l’émergence d’une alternative au géant à l’hippocampe, pas toujours simple à manier lors des renégociations de contrats.

Un an plus tard, l’heure des comptes a sonné.

"Le réseau compte 450 agences, à savoir les historiques de mon réseau, les adhérents Manor et celles du groupe Salaün, a énuméré François Piot à l'occasion de l'ouverture du congrès Manor 2025 en Arménie, jeudi 9 octobre 2025.

Le volume d’affaires représente 500 millions d’euros, un chiffre conséquent qui nous place entre Carrefour et Leclerc Voyages. Les fournisseurs ont vraiment bien accueilli cet accord, un accord très attendu dans la profession".

Manor Loisirs, qui s’inscrit dans une logique de croissance, vise désormais les sommets du marché français. Mais, en dépit de ce point d'étape intéressant, il lui reste de nombreux axes de développement et d’amélioration à mettre en branle.


Manor : "Notre ambition est simple : être le 1er réseau de France d’ici 2030"

Comme l’a rappelé le maître de cérémonie, Grégory Mavoian, Manor ne veut pas rester un challenger : le réseau vise l’excellence.

"Nous avons créé Manor Loisirs qui nous permet d’équilibrer la force du réseau entre le voyage d’affaires et le loisir".

En parallèle, a-t-il poursuivi, "nous avons continué à développer notre avantage concurrentiel dans le voyage d’affaires, avec le SBT Manor One. Notre ambition est simple : être le premier réseau de France d’ici 2030, rien de plus, rien de moins."

Comment atteindre cet objectif quand on reverse 100% de nos incentives à nos adhérents ? Et comment développer un réseau, sans moyens d’investir à coups de millions, ni même de capital disponible ?

Quand notre réseau réalise un bénéfice, il le reverse intégralement à ses adhérents
", rappelle son président, pour planter le décor.

Pour y parvenir, le développement devra s’appuyer sur les capacités d’investissement et l’esprit d’initiative de… ses adhérents.

Grégory Mavoian, par ailleurs CEO de Globeo Travel, a d’ailleurs lancé un appel aux fournisseurs et à la presse : "Envoyez-nous en toute confiance ceux qui souhaitent céder leurs entreprises. Nous avons des acheteurs fiables et justes."

Mais ce n’est pas tout. Manor ne souhaite pas se doter d’une centrale de paiement.

D’ailleurs, l’accord avec Tourfinance avait rencontré un succès très limité. Seulement cinq adhérents avaient franchi le pas sur une soixantaine, alors que la demande semblait bien plus importante au départ.

Pour François Piot, ce sujet est désormais dépassé. Les centrales de paiement appartiennent à un monde révolu. En plus, elles coûtent cher, autour d’un point de marge, ce qui a permis à certains réseaux de reprendre de la marge.

Chez Manor, la solution passera donc par les cartes de paiement, du moins pour les compagnies aériennes et les hôteliers, avant peut-être d’être étendue à d’autres fournisseurs.

"Nous devons accompagner nos adhérents. Avec Manor Payment, nous souhaitons favoriser l’acceptation des paiements par carte, notamment pour les fournisseurs aériens, et cela dès 2026.

Ceux qui accepteront auront un statut spécial chez nous, ils seront mis plus en avant et privilégiés
," a annoncé Grégory Mavoian.

Manor : sans centrale, la solution passera par les cartes de paiement !

La proposition a bien été entendue par les opérateurs aériens présents dans la salle, mais les réponses n'ont pas toutes été positives.

"Le coût des cartes représente un budget très élevé pour les compagnies aériennes. On parle de centaines de millions d’euros, et si nous élargissons cela aux agences, ce sont encore des coûts supplémentaires.

Aujourd’hui, le canal BSP ne coûte pas grand-chose, car les structures existent depuis des années. On est sur un coût d’environ 0,25% sur chaque transaction. Il n’existe pas de solution en carte de crédit à ce niveau de commission.

Il n’y a pas de débat. Je ferme la porte immédiatement, car je n’aime pas faire perdre du temps à nos partenaires,
" a déclaré Henri Hourcade, au nom d’Air France.

Une posture qui n'était pas partagée par les autres dirigeants de compagnies présents dans la salle.

Si Air France reste arc-boutée sur sa position, il ne fait aucun doute que, pour des challengers comme Corsair, Air Tahiti Nui ou d’autres, cela représente une opportunité de grignoter des parts de marché.

Et même s’il faut laisser des plumes et de la marge, l’enjeu en vaut peut-être le coût.

"S'il y a des avantages pour nous et surtout pour les agences de voyages, il existe un inconvénient majeur qui est son coût. Il peut atteindre jusqu’à 2,9%, ce n’est pas négligeable.

Ma position sera plus nuancée que celle de mes confrères d’Air France. A partir du moment où un partenariat entre Corsair et Manor existe, nous allons analyser la proposition avec, comme grille de lecture, que l’accord doit être profitable aux deux parties,
" s'est montré plus ouvert Pascal de Izaguirre, le PDG de Corsair.

Certains laissent donc la porte ouverte à d’éventuelles négociations, mais pour Manor, la charge n'est pas vraiment le sujet.

D'ailleurs, Grégory Mavoian a tenu à recentrer le débat, l’enjeu n’étant pas de faire peser une charge supplémentaire sur les compagnies par pur plaisir mais d’assurer la survie des distributeurs, à plus ou moins long terme.

"Les compagnies ont accepté, pour leurs passagers, tous les types de cartes afin de ne pas perdre de parts de marché.

Si elles ne l’avaient pas fait, la concurrence les aurait dépassées. Les agences, elles, sont confrontées à une problématique de trésorerie qui risque de s’accentuer, puisque nous nous dirigeons vers un paiement immédiat avec l’IATA.

De fait, nous allons tout encarter, car le client ne paie pas plus tôt, et nous ne sommes pas des banques.

Et puisqu'Air France n’a aucun contrôle sur ses clients, nous pourrions très bien leur dire que nous avons différentes cartes à leur proposer,
" prévient Grégory Mavoian.

En effet, dès 2027, le paiement du BSP sera effectué chaque semaine, contre tous les quinze jours actuellement.

A lire : Arnaud Fontanille (EDV) : IATA, SNCF... "Nous voulons changer le rapport de force"

Pour le président de Manor, les transporteurs ont encore une chance unique : celle de pouvoir toujours dialoguer avec des interlocuteurs, ce qui n’est plus le cas pour les particuliers.

Ils doivent profiter de cet espace encore ouvert, car d’une façon ou d’une autre, ils devront affronter ce sujet.

Une manière de redéfinir le rapport de force, souvent déséquilibré en faveur de l’aérien.

Manor veut avancer sur le pilotage grâce à la techno dès 2026

L’autre axe visant à stimuler le développement de Manor repose sur le pilotage des ventes, un sujet aussi ancien que les agences de voyages, mais qui peine à se concrétiser dans de nombreuses enseignes.

"La première étape, lors de la création de Manor Loisirs, a été de conserver tous les fournisseurs traditionnels de Salaün et Prêt à Partir, sans écarter personne.

Nous avons signé avec tout le monde afin d’avoir un référencement large. Le deuxième étage de la fusée sera le pilotage de ces accords. Nous devons récompenser ceux qui nous rémunèrent le mieux.

Il y aura, sur une période de trois ans, une évolution des contrats avec l’émergence de partenaires privilégiés.

Au-delà de la rémunération, nous voulons des fournisseurs qui croient en nous et nous aident à vendre, pas des clubs privés (suivez mon regard, ndlr)
", a expliqué François Piot.

Pour atteindre cet objectif, une solution technologique sera bientôt mise en place.

Après l’échec du rapatriement des mutins du CEDIV partis chez Selectour, en raison notamment du manque de structuration du GIE Loisirs et d’un paiement des commissions jugé défavorable sur le plan calendaire, le GIE va devoir agir rapidement, pour se montrer plus attractif.

D’autant que des opportunités de recrutement pourraient bientôt se présenter. "Pour faciliter ce pilotage, nous avons ouvert des discussions avec des outils technologiques, du type Orchestra, mais elles n’ont pas encore abouti.

Nous serons en mesure de soumettre des propositions au conseil d’administration de Manor au début de l’année 2026.
Non seulement nous allons gagner en pilotage, mais les agences verront aussi leur productivité s’améliorer
", estime le patron de Prêt à Partir, en première ligne sur le sujet.

L'objectif premier n'est plus vraiment de faire grossir le réseau par de la croissance externe, mais plutôt de le faire grandir par lui-même.

Manor : "Pour piloter les ventes, vous devez vous structurer !"

Un chantier loin d’être gagné d’avance. Le chemin à parcourir semble encore long.

"Si on veut piloter les ventes, il faut des remontées tous les mois, pas seulement en fin d’année. Il est nécessaire d’avoir une structure au niveau du siège, avec des commerciaux qui viennent dans les agences, former les équipes et rencontrer les fournisseurs. Donc tout cela doit se structurer.

Ce qui m’interpelle, c’est que chez Manor, vous renversez tout et vous ne gardez pas d’argent pour agir
," a interpelé, sous forme de conseil, Guy Zekri, le directeur général de Beachcomber Tours.

Des propos qui visaient à aider la jeune organisation, mais aussi à lui faire prendre conscience de ses contradictions. Il ne sera pas possible d'évoluer et d'atteindre ces objectifs ambitieux sans rogner sur ses promesses de redistribution.

Au-delà de ça, il sera aussi nécessaire de se structurer, mais aussi d’harmoniser la fiscalité et les informations comptables entre les 80 adhérents. Pour l’heure, la tuyauterie est encore en chantier.

"Nous faisons face à une grande complexité pour harmoniser les flux, entre les chiffres d’affaires que nous réalisons et les différents modes de calcul appliqués par les adhérents.

Dans le même temps, vous avez des fournisseurs qui clôturent leur année au 31 octobre, d’autres au 31 décembre.
Cet éclatement des règles fait que nous avons des difficultés à contrôler nos engagements et à les respecter
", reconnaît Philippe Taïeb, le président du Groupe Jancarthier.

Un constat partagé par François Piot. Selon lui, les tour-opérateurs sont eux aussi un peu dilettantes. Ils sont très rares à faire remonter les statistiques mensuellement, condition pourtant essentielle pour permettre ce pilotage tant rêvé.

"J’aime bien voyager léger. Je relance sans cesse chaque tour-opérateur pour obtenir des chiffres réguliers. Ceux qui le font voient leurs ventes progresser. Les partenaires ont accès à Wordvivo, qui est une mine d’informations, de partage et d’entraide.

Demain, la technologie va s’imposer. Nous pouvons tout imaginer, mais il faudra établir un rapport clair entre le coût et ce que cela rapporte. Nous devons être opportunistes
", conclut François Piot.

Comme Rome, le futur numéro 1 de la distribution va devoir se bâtir, mais en quelques jours, mois et surement années.


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Commentaires

1.Posté par shirley michel le 10/10/2025 11:13 | Alerter
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