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Dans le tourisme, comme dans le sport, quelles clés pour mieux performer en équipe ?

L’exemple de Noé Pottier, champion du monde de parachutisme en freefly


A 31 ans à peine, Noé Pottier, double champion du monde de saut en parachute, a bluffé les professionnels du tourisme venu l’écouter lors de la convention des EDV Centre Est en Egypte. Le jeune homme s’est, en effet, appuyé sur sa propre expérience pour souffler quelques leçons de management (et de vie) à son auditoire. TourMaG vous propose de revivre ce moment fort.


Rédigé par le Jeudi 27 Novembre 2025

Noé Pottier : "La performance passe d’abord par la connaissance de soi. Connaître nos valeurs et ce qui nous fait vibrer va nous rendre véritablement bon dans un domaine" - Photo : A.B.
Noé Pottier : "La performance passe d’abord par la connaissance de soi. Connaître nos valeurs et ce qui nous fait vibrer va nous rendre véritablement bon dans un domaine" - Photo : A.B.
En octobre dernier, les Entreprises du Voyage Centre Est ont réuni, en Egypte, quelque 70 participants, lors de leur convention annuelle qui avait pour thème « Réunir ».

A cette occasion, Yannick Faucon, le président régional, a eu l’idée de convier, en tant que conférencier, Noé Pottier, double champion du monde de parachutisme, pour aborder le sujet « Unir ses forces, réunir ses équipes ».

« Dans le parachutisme, il y a une chose qui est assez révélatrice de l'état d'esprit qu'il faut avoir, a introduit Yannick Faucon, c’est que la personne qui saute n’a pas plié elle-même son parachute, elle doit faire confiance à ses équipes ». Une anecdote qui en dit long sur l’importance de la cohésion au sein d’une équipe.

C’est ce que Noé Pottier a donc démontré durant 45 minutes, pointant du doigt les similitudes entre sa discipline et le fait de travailler en équipe au sein d’une entreprise.

TourMaG vous propose de découvrir les principaux enseignements à retenir.


1. L’union fait la force

Dans une discipline aussi risquée que le parachutisme, « où la simple petite erreur pourrait vous coûter la vie », a rappelé Noé Pottier, et qui exige de sauter jusqu’à 15 fois par jour, plus de 100 jours par an, chaque co-équipier doit pouvoir s’appuyer sur les autres pour réussir à sauter « sans avoir peur ».

« Il y a toute une chaîne d’union invisible, qui part du pilote de l'avion qui va nous larguer à 4 000 mètres - et qui connaît les vents, les directions, le bon moment pour ouvrir la porte - en passant par le plieur de voiles - qui a littéralement nos vies entre ses mains -, jusqu’à mes coéquipiers, performeurs et cameraman.

Quand je saute, je ne saute pas seul, je saute avec toute cette chaîne d'union invisible
, a-t-il décrit en ouverture. Plus qu'un saut dans le vide, c'est vraiment un acte de confiance partagée qui s'effectue à chaque fois ».

Si le métier d’agent de voyages ne nécessite pas de se jeter d’un avion, il comporte tout de même son lot de turbulences : aléas climatiques, situation géopolitique, etc. « Vous avez aussi des partenaires à coordonner, des attentes à gérer et, malgré cela, vous arrivez, à chaque fois, à créer quelque chose de fluide, d'unique et surtout d'humain », a souligné Noé Pottier.

2. La communication et la tolérance pour atteindre la symbiose

Pour décrocher le titre de champion du monde de freefly, Noé et son équipe - composée de deux performeurs dont Noé et d’un caméraman - doivent « voler en symbiose absolue pour réussir à créer, chaque année, une nouvelle chorégraphie qui n'existe pas, de 43 secondes précisément », a expliqué le sportif de haut niveau.

Une performance qui nécessite tout de même huit mois de travail, quelque 400 sauts ratés, des centaines d'heures de briefing et de debriefing où l’équipe va analyser, image par image, les blocages et trouver des solutions. « Cela implique aussi des milliers de doutes, car nous essayons d'inventer quelque chose qui n'existe pas, sans jamais être sûrs de voir un jour le produit final », a-t-il poursuivi.

Pour atteindre cette symbiose, Noé et ses coéquipiers ont pris la décision de communiquer, et notamment sur leurs inquiétudes et leurs doutes. Une évidence en théorie, qui peut, dans la pratique, tourner au cauchemar. « Mon équipe est complètement hétéroclite.

Le plus jeune est âgé de 20 ans et a un caractère assez introverti ; il a du mal à communiquer, à verbaliser ce qui se passe, surtout quand on est dans la difficulté, alors que techniquement, c'est le plus fort de l'équipe.

Mon coéquipier le plus âgé, qui a 40 ans, n'a aucune difficulté à s'exprimer, mais il va le faire de façon très brutale. Il n’a absolument aucun filtre quand il a un message à nous faire passer.

Moi, je suis entre les deux. Je n'ai pas un caractère très dominant, mais je ne m'efface jamais complètement non plus et je fais plutôt office de tampon entre le feu et la glace
».

Faisant le parallèle avec la distribution de voyages, où 90% des agences sont composées de petites équipes, « la diversité des profils n'est pas du tout un handicap », a estimé Noé Pottier, « c'est au contraire une richesse, que l’on va réussir à exploiter seulement si on arrive à développer suffisamment de tolérance les uns envers les autres, et si on arrive à s'accepter tel que l'on est.

Notre perception du monde, qui est liée à notre histoire, à notre conditionnement, à notre éducation, nous allons forcément la transposer aux autres et penser que la nôtre est plus juste.

Et je pense qu’il est difficile de rentrer réellement en communication ou en symbiose avec quelqu'un de son équipe si on n'arrive pas à marcher un petit peu dans ses chaussures, si on n'arrive pas à sortir de soi pour parvenir à vibrer à la même fréquence que les autres
».

3. Evacuer la jalousie

Atteindre cet état de tolérance ne se fait pas du jour au lendemain.

Noé Pottier aura mis plus de cinq ans pour avoir le déclic. « J’ai rencontré mon coéquipier le plus jeune quand il avait 13 ans, et je l'ai littéralement détesté parce qu'il incarnait tout ce que j’enviais.

Il est issu d'une famille de parachutistes, il avait été déscolarisé pour voler, et son père lui avait payé 1 500 heures d’entraînement en soufflerie - un simulateur qui permet d'apprendre à voler - sachant qu'une heure de simulateur de chute libre équivaut à environ 800 euros
».

Quand il fait sa rencontre, Noé enchaîne les petits boulots depuis six ans. Le bac en poche, il a stoppé ses études pour se consacrer à sa passion, qui coûte plus cher qu’elle ne rapporte, financièrement du moins. « J'ai été ouvrier d'usine, serveur, intérimaire, j'ai travaillé sur les fêtes foraines, et en six ans, je m'étais payé 20 heures de soufflerie.

En réalité, je ressentais énormément de jalousie et de frustration. Je trouvais que cette situation était complètement injuste
», a-t-il ajouté.

En réalisant un travail sur lui-même, il a réussi à évacuer cette jalousie, il a cessé de se comparer. « La comparaison entraîne forcément une division et ne permet pas de s'associer.

Quand j’ai retrouvé mon coéquipier six ans plus tard, sans jugement, en l'acceptant, nous sommes devenus amis et avons décidé de créer une équipe, puis nous sommes devenus champions du monde ensemble.

Avec le recul, je me dis que je n’y serais jamais arrivé sans lui, parce qu'il a vraiment un talent particulier. Il vole bien mieux que moi et il nous a permis de bénéficier de toute cette infrastructure de vol où j'ai fait 650 sauts pour aller au championnat du monde.

Mais lui n’y serait pas arrivé non plus sans moi, parce que mon parcours que je considérais, au départ, comme un désavantage, m’a donné une force de caractère. La niaque, c’est quelque chose qui ne peut pas s'acheter, c'est ce qu'on vit qui va nous l'offrir
».

4. Accepter les idées des autres, sans jugement

Présenter une chorégraphie inventée de toutes parts en championnat du monde ne s’improvise pas.

Dans un premier temps, cela va nécessiter une bonne dose de brainstorming. « Il va falloir sortir des idées de sa tête qui sont complètement loufoques, décalées », a relaté Noé Pottier.

Avec ses coéquipiers, ils se sont fixé une règle d’or : « quand un autre coéquipier propose une idée, même si on la trouve stupide ou irréalisable, on va quand même l'accepter, on ne va pas la juger stupide, a-t-il expliqué. Dans 90% des cas, une idée ne va pas marcher, mais le fait de donner une chance à cette idée - par exemple tester un mouvement en l'air -, va nous permettre de rebondir dessus. Une idée va en entraîner une autre ».

De fil en aiguille, l’équipe va créer une petite séquence de quelques secondes, qui va s’ajouter à d’autres petites séquences et lui permettre de dérouler son saut.

5. La franchise, pour progresser plus vite

Une fois la chorégraphie en phase de test dans les airs, pas question de gaspiller trop de sauts pour des idées qui ne fonctionnent pas dans la pratique.

« Lorsqu'on ne ressent pas le saut, lorsqu'on est vraiment dans le flou, on le verbalise. On est obligé de se le dire, on ne peut pas perdre une demi-saison, soit 250 sauts, à s'égarer sur un chemin.

Alors, ce n'est pas évident d'oser parler de ses faiblesses, ou de dire "je ne ressens rien, j'ai l'impression que je ne suis pas capable de le faire", mais le fait d'oser parler de ses doutes, de ses difficultés, permet à mes coéquipiers d'apprendre à me connaître. Mieux ils me connaîtront, plus ils réussiront à m'apporter des éléments pour que j'arrive à progresser
».

6. Savoir mettre son ego de côté

Faire croire à ses coéquipiers que tout va bien pour garder la face n’amène finalement qu’à répéter tout le temps les mêmes erreurs.

« Il faut arriver à mettre son ego de côté pour penser collectif. Il existe des équipes qui sont des additions de talents individuels et qui n'ont jamais gagné, alors qu’elles étaient bien plus fortes que nous », a témoigné Noé Pottier.

Au sein de sa team, il n’y a donc pas de « leader » attitré - un concept disruptif pour le monde du sport, comme pour celui de l'entreprise. « Chez nous, le leader c'est celui qui, à un instant T, est suffisamment à l'aise dans son saut pour pouvoir insuffler de l'énergie aux autres et pour pouvoir porter le groupe », a-t-il expliqué.

Le leader devient donc interchangeable en fonction des énergies de chacun. « Dans la plupart des sports, il y a un capitaine d'équipe, une figure qui doit toujours aller bien et réussir à porter le groupe. Moi je trouve que c'est difficile de garder ce masque, parce qu'on est humain, on a forcément des phases où ça va moins marcher que d'autres », a-t-il partagé à son auditoire.

7. Se synchroniser avec son équipe

Une fois dans les airs, les parachutistes ne peuvent plus se parler et doivent donc mettre au point une communication non verbale, ainsi que des règles de distanciation.

Chaque mouvement qu'exécute l’un d’entre eux indique à l’autre que c’est le moment de changer également de position. « Nous faisons du vol en triangulaire, ce sont donc trois personnes qui vont voler ensemble en synchronicité.

Pour cela, nous avons des clés et des timings qui sont définis en permanence
», a expliqué Noé Pottier. « Notre performance ne réside pas uniquement dans le fait d'arriver à exécuter notre chorégraphie, mais dans le fait de savoir où se situe chaque personne à l'intérieur du saut et d'arriver à se transposer à sa place. C'est le seul moyen de parvenir à créer cette synchronicité ».

Une pratique que Noé Pottier a comparé au monde de l'entreprise : « Quand on est nombreux, le fait de savoir où chacun se situe, quelles sont ses difficultés, comment est-ce qu'il fonctionne, peut permettre d’arriver, un peu comme pour une patrouille, à voler ensemble, en synergie », a-t-il relevé.

8. Rester fidèle à ses valeurs

Alors que Yannick Faucon lui demandait ce qui le faisait avancer dans la même direction que ses coéquipiers, Noé Pottier a répondu : « Si on arrive à surmonter autant de difficultés et à tolérer autant de différences, c’est parce que ce qu'on fait a véritablement du sens pour nous ».

Et cette quête de sens « sera toujours reliée à nos valeurs, c’est-à-dire au socle de notre équilibre ».

Pour Noé Pottier, chaque individu peut choisir d’agir en accord avec ses valeurs, ou à leur encontre. Selon qu’il fera l'un ou l'autre, le cerveau réagira différemment. « Il produira deux réactions chimiques complètement différentes qui vont influer sur notre énergie et sur la façon dont on va s'unir à son groupe - ou se désunir de son groupe », a poursuivi le double champion du monde.

« Quand on agit contre ses valeurs, notre corps et notre esprit vont réagir. Ils viennent libérer des hormones, principalement le stress et la noradrénaline, qui vont brouiller nos pensées, générer du stress, saper notre motivation, baisser notre niveau d'énergie ».

Parmi les facteurs qui peuvent déclencher cette cascade de stress figure le manque de sens, lorsqu’un individu exécute des tâches qu’ils jugent vides et inutiles, quand il ne sait pas ce qu’on attend réellement de lui ou qu’on lui laisse peu ou pas d'autonomie.

« La bonne nouvelle, c'est que l'inverse est aussi vrai. Quand on agit en accord avec ses valeurs, notre cerveau vient libérer un cocktail d'hormones et de neurotransmetteurs qu'on peut appeler la DOSE : c'est la Dopamine qui, en se libérant, vient nous donner de la motivation, l'Ocytocine qui renforce le lien et la confiance aux autres, la Sérotonine pour le bien-être et le sentiment d'accomplissement, et l'Endorphine, qui crée le plaisir et va surtout nous apaiser », a expliqué Noé Pottier, devant un auditoire fasciné.

« Finalement, la clé de la performance, de la motivation, se trouve avant tout dans l'alignement. Si j'arrive à être aligné et cohérent avec mon équipe, je vais disposer de ce potentiel-là et c'est ce qui va me permettre d'avancer et d'aller chercher un titre de champion du monde ».

Être aligné avec ses valeurs et les alimenter tous les jours permet d’entretenir un cercle vertueux et d’aller chercher toujours plus de performance.

Pour conclure sa présentation, Noé Pottier a rappelé que « la performance passe d’abord par la connaissance de soi. Savoir ce qui nous alimente et ce qui nous fait vibrer va nous rendre véritablement bon dans un domaine ».

Alors que dans le sport à haut niveau, comme dans les entreprises, la rivalité existe, lui a choisi de voir les autres comme des alliés. « Je me dis qu'on peut associer nos compétences, parce que nous sommes tous complémentaires : aligner les sens, orchestrer les rôles afin que chacun trouve sa place, et amplifier l'énergie.

Car l'énergie, ça n’est ni de la motivation, ni de la magie ; c'est vraiment de la chimie et c'est important de le savoir pour activer ces leviers-là
».

Pour suivre Noé Pottier, rendez-vous sur son compte Instagram.


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