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Tourisme : pourquoi tant de haine ? [ABO]

L'humeur de Jean Pinard


Les critiques contre le tourisme se multiplient dans les médias et les débats publics. Le discours anti-tourisme refait surface, (c'est la saison)... et accuse le secteur de tous les maux... ce que contexte Jean Pinard dans cette chronique !


Rédigé par le Vendredi 9 Mai 2025

Tourisme : pourquoi tant de haine ? Depositphotos.com  Auteur Wavebreakmedia
Tourisme : pourquoi tant de haine ? Depositphotos.com Auteur Wavebreakmedia
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L’info est passée inaperçue, mais il y a une quinzaine de jours un Président d’une communauté de communes de l’Ile d’Oléron a présenté un projet de création d’une prime pour inciter les propriétaires de meublés touristiques à les louer sur le plus long terme, donc aux touristes afin de favoriser l’accès au logement à la population locale.

En soi l’idée peut avoir du sens, même si on peut s’étonner du montant accordé pour cette « re- reconversion » de logement, mais c’est tout le débat qui a accompagné cette idée qui m’inquiète.

Vous la sentez cette petite musique qui monte, qui consiste à accuser le tourisme de tous les maux de la terre. Les glaciers fondent en montagne, c’est la faute du ski, les plages sont bondées le premier mai sur la côte d’opale parce qu’il fait 27 degrés et que les « gens » ont eu envie de voir la mer, vite un arrêté pour lutter contre le surtourisme à… Wimerreux !

Je ne vais pas faire le tour de France des prises de position visant à critiquer le tourisme, qualifié d’industrie par certains, mais dans le débat qui a accompagné l’idée de l’édile d’Oléron, dans certaines émissions qui consistent à faire commenter l’actualité par tout un tas de gens atteints du syndrome de l’expert, je retiendrai cette remarque : « bon le tourisme en France ça commence à bien faire, on est en train de devenir un grand parc de loisirs et on voit bien que cette économie ne crée pas de richesses et affaiblit la France ».


Tourisme en France : pourquoi un tel désamour, de telles critiques ?

Alors bon, ce n’est pas la première fois qu’on entend ce discours, à croire que les salariés de la filière tourisme sont payés en francs, voir en anciens francs, mais le tourisme bashing est devenu tendance dans les salons et les médias.

Il y a peu, l’analyste économique Emmanuel Le Chypre, s’en prenait à l’économie du tourisme sous un angle assez hasardeux, puisqu’il reprochait à la France, d’avoir un PIB tourisme plus faible que le Monténégro !

On en est donc là, et comme l’été ne va pas tarder une fois qu’on aura commenter les 10 enquêtes pour savoir où iront les Français en vacances, le débat se recentrera sur le tourisme du trop, parce qu’au 15 août pour peu qu’il fasse super beau, on se demandera si toutes ces migrations saisonnières vers les plages, ne doivent pas être mieux encadrées, parce que quand même ça fait du monde, trop de monde !

C’est étonnant ce discours sur le « trop » du tourisme, parce qu’il n’est étayé par aucun chiffre, aucune donnée sérieuse. L’offre touristique en hébergements marchands ces huit dernières années a baissé, la fréquentation dans ces mêmes hébergements est stable, alors oui il y a une augmentation dans les locations saisonnières, mais la fréquentation touristique française n’explose pas comme on veut nous le faire croire, alors qu’est qui ne va pas plus avec le tourisme en France, pourquoi un tel désamour, de telles critiques ?

A lire aussi : La Grande-Motte fait sa révolution : un bilan au-delà des chiffres !

Le tourisme c’est « un truc » qui marche tout seul

Cette situation pose question à l’heure où les débats économiques se concentrent sur le sujet de réindustrialisation de la France qui consiste à faire revenir la production industrielle ou définit comme telle, qu’on a laissé partir dans des pays où la main d’œuvre coute moins cher.

Pour soutenir cette stratégie de réindustrialisation, et la création d’emplois qui va avec, on ne lésine pas sur les aides publiques, mais si on faisait un comparatif entre le volume de subventions par création d’emploi entre l’industrie et le tourisme, je ne prends pas de risque en affirmant que l’emploi tertiaire du tourisme, ne compte pas beaucoup dans les politiques économiques des collectivités.

Le tourisme c’est « un truc » qui marche tout seul, et ça marche tellement bien … donc il faut critiquer cette économie invisible dans ces retombées économiques, mais devenue subitement trop visible dans ses usages du territoire.

Lors d’un débat il y a peu, dans lequel je rappelais l’impact du tourisme en zone rurale, sur ce qu’il est convenu d’appeler l’économie présentielle, un citadin qui avait fait le déplacement dans le seul objectif de venir « casser du tourisme », m’a traité de conservateur.

Je venais de préciser qu’en trente ans, les activités présentielles ont vu leurs effectifs (emplois) augmenter de 42% sur l’ensemble de la France, tandis que la sphère productive perdait dans le même temps 6% d’emplois en moyenne, et que finalement cette image d’une France qui ne serait plus qu’un grand parc de loisirs, ce n’est pas si mal, surtout si cette activité engendre un excèdent de 15.8 milliards d’euros du tourisme dans la balance commerciale.

Ça serait ballot que dans 50 ans, on parle de re-tourismisation de la France

En rentrant de débat auréolé du statut de conservateur, je me suis posé (encore plus) la question de l’origine de cette critique croissante autour du tourisme en France. Je ne parle pas de l’impérieuse nécessité de réguler les excès du tourisme, tels que les survols de plus en plus nombreux du Mont Blanc en hélicoptères, non je parle du temps des vacances, des loisirs, de l’insouciance, des voyages en train pour aller au bord de la mer, des Pass rail pour les jeunes qu’on supprime sans prévenir…

Si critiquer le tourisme parce que des gens partent en vacances en France tous les ans aux mêmes endroits relève d’une vision progressiste, alors j’endosse avec plaisir le costume conservateur.

S’émerveiller comme je l’ai lu dernièrement, que de plus en plus de Français, qui vivent dans des petites maisons, d’une économie liée à la vie rurale, au potager, au bricolage, renoncent, je cite, à faire du tourisme parce qu’ils sont attachés à ce que le temps soit utilement utilisé, en opposition au temps de vacances inutile, est une vision du progrès qui se discute. Je la soumettrais bien à tous ceux qui n’ont ni maison, ni jardin pour rendre leur temps libre… utile.

Je fais partie de ceux qui pensent que le temps libre qu’on passe en vacances est utile, à l’émancipation des jeunes, à la vie sociale, au repos de l’âme, et que ce temps utile crée une économie utile, dans des territoires qui comme l’île d’Oléron ou la montagne étaient en souffrance il y a de cela à peine 50 ans.

Il y a plein de choses à améliorer pour rendre l’économie du tourisme encore plus utile, et surtout moins prégnante sur l’environnement, mais prenons garde à force de dézinguer cette économie, à ce qui n’arrive pas à la France la même chose qui est arrivé à l’industrie il y a 50 ans.

Ça serait ballot que dans 50 ans, on parle de re-tourismisation de la France et de l’Ile d’Oléron !

Jean Pinard - Mini Bio

Jean Pinard - DR
Jean Pinard - DR
Président de la société de conseils Futourism :

Forestier et géographe de formation, Jean Pinard a toujours travaillé dans le secteur des sports et du tourisme.
Moniteur de kayak, chauffeur de bus, guide, gestionnaire de sites touristiques, directeur de CDT et de CRT (Auvergne et Occitanie), Jean Pinard est redevenu consultant, son premier métier à la SCET, à la fin de ses études.

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Tags : jean pinard
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Commentaires

1.Posté par Martino180 le 09/05/2025 09:40 | Alerter
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J'aime ce bon sens qui échappe à nos bobos déclinistes en mal d'autodestruction sur leur smart phone.

Bien sûr que sur l'Ile d'Oleron ou sur la côte d'azur il y a beaucoup de monde et que c'est une nuisance pour les locaux à cette période. Mais ces mêmes locaux sont très contents quand il revende leur bien immobilier à des prix qu'ils n'auraient jamais imaginé il y a 30 ou 40 ans.

En fait, je crois que le problème c'est que la population vieillie et que les baby boomers issus de 68 sont devenus des vieux réacs et veulent rester entre eux bien tranquilles sans penser à la jeune génération qui n'aurait pas de bouleau sans ça.

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